Certes, il explique avoir subi avec sa non-sélection l’une des plus grandes déceptions de sa carrière. Il assure également qu’il pourrait très bien revenir en sélection bientôt. Mais ce que l’on retiendra de l’entretien accordé par Karim Benzema au quotidien Marca, c’est cette phrase : Didier Deschamps "a cédé à la pression d'une partie raciste de la France". S’il n’accuse à aucun moment le sélectionneur national de racisme, Benzema estime que "DD" a été influencé au moment de de faire sa sélection pour l’Euro. Osé.
Et un petit peu ingrat. Pourquoi ? Parce que Didier Deschamps a toujours eu vis-à-vis de Benzema un discours très prudent, voire conciliant.
Le 18 décembre, sur l’affaire : Karim Benzema "n'a pas évalué la situation dans laquelle il se trouvait".
Le 21 février, après la levée du contrôle judiciaire de Benzema : "Sur un plan sportif, j'ai envie d'avoir la meilleure équipe, et donc les meilleurs joueurs. Mais ça, ce n'est que sur le plan sportif. Dans cette affaire, il y a un volet judiciaire. Il faut attendre de voir comment les choses vont avancer, même si c'est un premier pas."
Le 2 mars, sur l'annonce des 23 : "Elle (l'affaire) ne pourrit pas (le climat), non. Moi, je ne peux pas faire une sélection fiction. Après-demain, on verra. J'attendrai le 17 mars puis ensuite le 12 mai pour déterminer les choix importants à faire."
Et avant cela, Deschamps avait toujours fait confiance à Benzema, même quand celui-ci avait connu de longues traversées du désert sous le maillot Bleu, entre juin 2012 et octobre 2013 ou entre octobre 2014 et octobre 2015.
Mais Deschamps n’a pas été le supporter n°1 de Benzema. Non, ce rôle, c’est le patron de la FFF en personne, Noël Le Graët, qui l’a endossé, notamment lors de l’étonnante conférence de presse du 10 décembre, au cours de laquelle le boss de la 3F avait indiqué que Benzema n’était plus sélectionnable.
- "Je trouve que c'est un mec bien, un type né dans un quartier difficile".
- "Il est pris dans un truc 'dingo' qui le dépasse".
- "J'espère que la juge décidera que le dossier est vide, ou que Valbuena et Benzema redeviendront copains".
Le 18 janvier dernier, Le Graët en avait ajouté une couche dans un entretien à L’Équipe 21. Il avait alors dit défendre Benzema contre… un racisme latent.
" Parce que j'aime bien Benzema, on a l'impression que je deviens quelqu'un de malhonnête. Il faut dire quoi ? À mort l'Arabe ? Qu'est que c'est que tous ces gens qui m'écrivent pour me dire ‘Benzema dehors' ? Certainement pas, je gère cette affaire comme je l'entends "
Visiblement, Benzema considère aujourd’hui que ce sentiment hostile vis-à-vis de lui a finalement triomphé. C’est apporter du crédit à ce que Le Graët rapportait à l'époque, mais c'est aussi le trahir un peu...
BONUS : Mais alors pourquoi ? Pourquoi Karim Benzema n’a-t-il pas été retenu pour cet Euro, alors que son niveau sportif le lui permettait et que la levée de son contrôle judiciaire dans l'affaire de la "sextape" avait été jugé comme un "premier pas" ? Il suffit de relire le communiqué de la FFF : "Le Président de la Fédération et le sélectionneur tiennent à rappeler que la performance sportive est un critère important mais pas exclusif pour décider de la sélection au sein de l’Équipe de France de football. La capacité des joueurs à œuvrer dans le sens de l'unité, au sein et autour du groupe, l'exemplarité et la préservation du groupe sont également prises en compte par l'ensemble des sélectionneurs de la Fédération."
Traduction : selon la FFF, ce n’est pas parce qu’une partie des Français lui était hostile - quelle que soit la raison - que Benzema n’a pas été retenu pour l’Euro, mais c’est parce que les joueurs consultés par Deschamps étaient visiblement plutôt hostiles à son retour.