"Il y a, des fois, des victoires qui sont en trompe-l’œil", sourit Yannick Noah à propos de son sacre à Roland-Garros en 1983. Invité de l'émission Face aux auditeurs, diffusée dimanche soir sur Europe 1, l'ancien tennisman qualifie son parcours d'"atypique", estimant qu'il ne faut "pas faire l'erreur" de le "copier" : "C'était le plus bel accident de ma vie", assure-t-il, évoquant une combinaison de facteurs favorables, dont "beaucoup de chance". Et de fustiger l'accompagnement des jeunes champions, qu'il juge toujours largement insuffisant en France.
>>> FACE AUX AUDITEURS - Écoutez Yannick Noah sur Europe 1, dimanche de 20 heures à 21 heures
"Ton frangin a acheté un bon bouquin, et puis toi t'arrives avec une Porsche Cayenne"
"Quand j'ai gagné Roland-Garros, mon téléphone était dans l'annuaire !", se souvient Yannick Noah. "Je me rappelle très bien de ma relation avec les filles avant que je gagne, ça n'était pas pareil. J'étais timide, je ramais comme c'est pas possible. Il fallait vraiment qu'il y ait un slow de rêve et que la fille vienne vers moi sinon j'étais incapable. Et puis, tout à coup, il y a eu plus d'attention. On m'a apprécié différemment..."
Cette soudaine évolution nécessite, selon le champion, d'"être accompagné". Généralisant son propos aux jeunes sportifs dont la carrière décolle brusquement, il déroule : "Quand tu as gagné un peu d'argent, et que pour l'anniversaire de ton père, ton frangin a acheté un bon bouquin, et puis toi t'arrives avec une Porsche Cayenne.... Ça part d'un bon sentiment mais imagine la gueule de ton frère ! La relation avec l'autre est complètement faussée."
"Quand tu as fini l'entraînement, tu as beaucoup de temps"
"Il y a beaucoup de choses à faire par rapport à l'accompagnement psychologique, pas seulement des joueurs, mais dans la formation des entraîneurs, dans l'accompagnement des parents", estime alors Yannick Noah. Revenant au tennis, l'ancien joueur illustre : "Ça n'est pas facile de laisser ton môme ou ta fille, à 12 ans, avec un entraîneur qui sait certes t'apprendre à courir, faire un coup droit, revers, faire des pompes et des abdos... Mais quand tu as fini l'entraînement, tu as beaucoup de temps. Et ce temps quand tu es môme il est précieux, c'est là que tu te forges et c'est là que tu deviens un champion."
"Je pense qu'à ce niveau-là, on est au degré zéro", conclut le chanteur. "On est nuls, on est nuls. (...) C'est dans la tronche, donc on botte en touche. Mais non, c'est ça qui est passionnant justement. Il y a tout ce travail qui n'est pas fait."