Une nouvelle défaite en ouverture du Tournoi des Six nations et à moins d'un an de la Coupe du monde : le XV de France s'est encore incliné vendredi soir, face au pays de Galles (24-19), au terme d'un match qu'il avait pourtant bien entamé mais qu'il a ensuite laissé filer. Les Bleus sont toujours malades. Le diagnostic, implacable, est partagé par le président de la Fédération française de rugby lui-même. Invité de l'émission "Face aux auditeurs", dimanche soir sur Europe 1, Bernard Laporte a livré son analyse d'une situation de crise, tout en jugeant que les Bleus avaient encore "une possibilité" de tutoyer les sommets à l'automne prochain, lors de la Coupe du monde.
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"Ça ne peut être que dans la tête". "Le fait d'encaisser sept points, ça arrive à tout le monde", estime d'abord le président de la FFR, revenant sur l'essai gallois marqué suite à une bourde de Yoann Huget, vendredi soir, alors que les Bleus menaient encore nettement (16-7). "Le problème, c'est que cette bévue, elle paralyse", analyse Bernard Laporte, évoquant l'incapacité des joueurs tricolores à reprendre le dessus. "C'est une équipe qui est en manque de confiance, qui se dit : 'Mais on ne s'en sortira pas, ça y est, ça recommence. (…) Ça ne peut être que dans la tête. Un joueur, ça ne devient pas mauvais en une mi-temps."
Pour l'ancien sélectionneur du XV de France (2000 à 2007), la mauvaise passe traversée par la discipline au niveau international - masculin - crée une forme de cercle vicieux. "Si on a moins de licenciés, ce n'est pas à cause de tous les accidents tragiques que l'on a eus. C'est qu'on a une équipe de France qui ne fait plus rêver aujourd'hui, c'est une évidence, et ça fait pratiquement dix ans. Il faut retrouver le chemin de la victoire, parce que c'est la vitrine de notre sport."
Le chantier de la formation "va payer". Au-delà de cette crise de confiance, l'équipe de France "manque de profondeur", estime Bernard Laporte, qui souligne l'importance de la réforme de la formation mise en place par la FFR, à hauteur de "9 à 10 millions d'euros de dépenses par an". "Les joueurs étrangers qui sont arrivés massivement dans nos clubs ont pris la place de nos joueurs, et aujourd'hui on est en pénurie, à certains postes, de joueurs de très haut niveau. (…) Mais ce chantier va payer. On aura, d'ici une dizaine d'années, quatre ou cinq très bons demis d'ouverture, six très gros demis de mêlée, pléthore (de bons joueurs) à tous les postes."
Et en attendant ? Pour la Coupe du monde 2019, qui aura lieu au Japon à partir du mois de septembre, "tout est programmé et nous irons ensemble", commente le président de la FFR, excluant tout remplacement du sélectionneur Jacques Brunel, même en cas d'autres mauvais résultats dans le Tournoi des Six nations. "Ce serait difficile et certainement dangereux de changer à nouveau", un an après le remplacement de Guy Novès, balaye-t-il.
"Une Coupe du monde, ça va très, très vite". Avec quelles ambitions le XV de France, versé dans la poule C avec l'Angleterre, l'Argentine, les États-Unis et le Japon, entamera-t-il la compétition ? "Je ne parierais pas ma maison en disant que c'est sûr qu'on va être champions du monde", lâche Bernard Laporte, reconnaissant que les Bleus ont "mathématiquement peu de chances". "Mais il y a une possibilité, parce qu'une Coupe du monde, ça va très, très vite", pointe-t-il. "Rappelez-vous en 2011, la Nouvelle-Zélande perd ses trois demis d'ouverture, elle joue avec le quatrième, ce n'est plus la même équipe. La France en 2011, elle peut être championne du monde alors qu'elle a failli ne pas sortir des poules…"
"Alors oui, on n'est pas favoris, c'est une certitude", conclut Bernard Laporte. "Mais notre équipe en a le potentiel et, avec un peu de chance, tout est possible. Je crois que les dernières Coupes du monde permettent de le dire." Quatre ans après le Japon, la suivante sera organisée par la France, en 2023. Candidat annoncé à un deuxième mandat à la tête de la FFR à partir de 2020, Bernard Laporte pourrait être alors toujours le patron du rugby français.