En Catalogne plus qu'ailleurs, foot et politique se jouent sur le même terrain. D'abord parce que le FC Barcelone est, comme son slogan l'indique, més que un club (plus qu'un club) et ses joueurs du cru, Gerard Piqué en tête, les hérauts de l'identité catalane. Mais aussi parce que dimanche, cinq millions et demi d'électeurs sont appelés aux urnes pour les élections régionales et pourraient bien donner une large majorité au Parlement à la liste indépendantiste menée par Artur Mas et soutenue… par Pep Guardiola.
Une question politique, économique et sportive. Si la victoire annoncée dans les sondages venait à se dessiner, se poserait alors frontalement la question de l'indépendance de cette communauté autonome, la plus riche d'Espagne. Une question politique, un serpent de mer historique, mais aussi un casse-tête sportif pour le club de foot le plus titré en Europe ces dernières années, le FC Barcelone, dont l'aura médiatique et la réussite économique reposent en partie sur la rivalité avec l'ennemi du Real Madrid, le fameux clasico.
L'Espagne se fait menaçante. Or, les décideurs politiques et sportifs l'ont tous clamé, l'indépendance de la Catalogne entraînerait l'exclusion immédiate des deux clubs barcelonais présents en Liga (le FC Barcelone et l'Espanyol Barcelone). Javier Tebas, le président la Ligue de Football Professionnelle espagnole a clairement annoncé que "ni le Barça, ni l'Espanyol ne seraient autorisés à participer à notre championnat." "Si l'Espagne se rompt, la Liga se rompt", avait-il conclu, lapidaire. Le Barça se retrouverait alors contraint de relancer le championnat de Catalogne, une compétition disparue depuis les années 30.
Un deal perdant-perdant. Le secrétaire d'Etat aux Sports est lui aussi sans appel : "Si une partie du territoire disparaît, il ne peut entrer dans une compétition espagnole". Alors, coup de pression ou réelle détermination à déchoir Barcelone de son statut de grand d'Espagne ? La question se pose, car l'exclusion du Barça serait un deal perdant-perdant pour le club comme pour la Liga. Les blaugranas perdraient beaucoup en droits télé et en compétitivité, tandis que le championnat espagnol se trouverait amputé de l'un de ses plus beaux palmarès et de ses meilleurs joueurs.
Le Barça louvoye. Dans cette affaire, le FC Barcelone, dont les clubs jouent aussi en première division en basket et en handball, tente de louvoyer entre ses objectifs sportifs et économiques, qui exigent de jouer le championnat espagnol, et son identité et ses socios, unis autour de la Catalogne et le rejet de la domination madrilène. C'est pourquoi le président du club, Josep Maria Bartomeu enchaîne les déclarations contradictoires ces dernières semaines. Car pour lui comme pour Léo Messi et toutes les stars barcelonaises, le scrutin de ce dimanche sera més que una eleccio.