À 56 ans, Christophe Galtier est devenu le nouvel entraîneur du Paris Saint-Germain pour donner un nouveau visage à l’équipe, devenue bien terne lors du passage de son prédécesseur, l'Argentin Mauricio Pochettino. Avec un début de saison tonitruant en championnat, seulement freiné dimanche soir par Monaco (1-1), le Marseillais de naissance a vite fait l'unanimité auprès des supporters. Sa gestion d’un effectif de stars est louée en interne et en externe.
En exclusivité pour Europe 1, Christophe Galtier s'est confié à Jean-François Pérès et Jacques Vendroux pendant une bonne vingtaine de minutes dans l'émission Europe 1 Sport présentée par Lionel Rosso. Son adaptation, sa découverte du club et des joueurs, sa méthode de management, son adjoint Thierry Oleksiak mais aussi les débuts du club en Ligue des Champions, le 6 septembre face à la Juventus de Turin... Entretien exclusif avec une personnalité désormais incontournable du foot français.
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Depuis votre arrivée, il y a comme l'impression que vous faites l'unanimité. Êtes-vous d’accord ?
"J'essaie de me protéger de ça. La première des choses, c'est que moi, je suis très content d'être l'entraîneur du Paris Saint-Germain. Je suis très heureux, ma famille aussi et c'est ça le plus important. Ensuite, évidemment, il y a eu beaucoup de choses dites sur mon choix. C'était légitime. Mais je suis épanoui ici, à Paris. Il y a beaucoup d'attente, beaucoup d'exposition et je dois faire très attention par rapport à cela. Mais la première personne heureuse, c'est bien moi."
On a l'impression que vous avez rendu le Paris Saint-Germain plus humain…
"Je ne sais pas. Je pense que ce serait vraiment prétentieux de croire ça. Moi, ce que j'ai découvert de l'intérieur dès mon arrivée, c'est que j'ai affaire à un groupe très humain et à de bonnes personnes. Des joueurs sérieux, potes, complices, ambitieux, certes avec de la personnalité, mais il faut de la personnalité. La sensation que vous avez, c'est peut-être le fait que je sois simplement un entraîneur français et que j'ai plus de facilité à m'exprimer avec vous, les médias, avec les gens de l'extérieur. Mais en interne, moi, j'ai découvert un groupe extraordinaire et un club où tout le monde est à l'écoute."
C'est un club qui charrie évidemment beaucoup de fantasmes. Qu'est-ce qui vous a le plus surpris entre l'image que vous aviez du Paris-Saint-Germain en tant qu'entraîneur d'équipes adverses et ce que vous vivez aujourd'hui ?
"Vous avez raison sur les fantasmes. Quand on est de l'extérieur, on écoute et on lit beaucoup de choses. La première des choses, c'est que d'un épiphénomène, on en fait un cataclysme, un séisme. Dans tous les vestiaires et dans toutes les équipes, il se passe toujours quelque chose. C'est comme ça, c'est l'être humain qui est comme ça.
J'ai découvert un club très organisé. Mais je n'avais aucun doute par rapport à ça et j'ai découvert des joueurs qui travaillent comme de grands professionnels, qui sont respectueux des uns et des autres, respectueux du personnel, respectueux du staff, du staff médical et des joueurs qui ont une grande ambition de faire une grande saison. Est-ce que on va y arriver ? Je pense qu'être ambitieux, ce n'est pas être prétentieux. On doit avoir cette ambition. Après, c'est à nous de mettre de notre côté tous les ingrédients dans les préparations de match et au quotidien, dans les séances, dans les exigences avant les séances, pendant les séances... Il faut beaucoup, beaucoup d'exigence."
Le PSG, c'est une autre dimension?
"Oui, de par l'exposition. Il faut peser le pour et le contre d'une décision parce qu'on sait qu'elle va être commentée, amplifiée, souvent déformée. Et aussi, comme avec vous les journalistes, faire très attention dans la prise de parole sur un plan public parce que vous êtes observé et scruté à la loupe. Une phrase, un mot, c'est multiplié par 100.000 quand vous êtes l'entraîneur du PSG."
Enfant, vous rêviez d'être avec ces joueurs-là ?
"Un rêve ? Non. Je n'ai jamais rêvé de cela. Entraîner des joueurs comme Kylian (Mbappé) comme Neymar, comme Leo Messi ou comme Sergio Ramos, je ne l'aurais pas imaginé. Mais au fur et à mesure que ma carrière avançait, du parcours que j'ai pu avoir, c'était une ambition. Ce n'était plus un rêve utopique, c'était une ambition. Est-ce que ça allait se présenter ou pas ? Je ne le savais pas. Mais évidemment, je suis très fier et très heureux d'entraîner ces joueurs, ces profils-là, ces joueurs de classe mondiale.
Mais on doit les entraîner de la même manière que d'autres, avec un regard ou une attention sûrement différente. Ils ont besoin d'exigence. Je ne suis pas quelqu'un de sévère, mais ils ont besoin d'exigence. Dans le dialogue, dans la relation humaine, ce sont des joueurs qui sont beaucoup plus à l'aise dans le face-à-face, que de s'exprimer face à un groupe."
Quand vous voyez Neymar, qui semblait triste et qui envoyait des mauvais signaux il y a quelques mois encore, s'éclater sur le terrain, resplendir, faire tout ce qu'il réussit depuis le début de saison, vous vous dites : ‘je fais bien mon job’ ?
"Mon objectif, c’est évidemment de rendre les gens heureux. Plus un joueur est heureux, plus il est performant."
C'est un crédo ?
"Oui. Mais c'est dans la vie de tous les jours. Un salarié malheureux n'est jamais un salarié performant pour son entreprise. Un joueur heureux est toujours une valeur ajoutée à l'équipe. Pour en arriver là, je fonctionne de manière très simple : il ne peut pas y avoir de non-dit, il faut avoir un dialogue direct, franc, avec beaucoup de respect. Quel que soit le joueur et quel que soit le profil de carrière et l'âge du joueur, toujours avoir du respect, mais il peut pas y avoir de non-dit. Le joueur a le droit de tout me dire. Une fois qu'on a évacué tous ces non-dits, on met tout à plat. Je dois arriver à faire en sorte que le joueur puisse s'épanouir au sein du collectif, au sein du groupe, pour qu'il soit vraiment une valeur ajoutée à l'équipe."
Le PSG a concédé son premier match nul de la saison dimanche face à Monaco (1-1)… Bonne ou mauvaise chose ?
"On avait besoin de vérité. Monaco était le premier grand rendez-vous de la saison sur un plan national, Monaco est le troisième du championnat la saison dernière. C'est une équipe qui est habituée à la Coupe d'Europe. Ce sont des joueurs internationaux. C'est un bon niveau. On ne s'est pas endormi par rapport aux belles prestations précédentes. Simplement, on a eu un niveau d'adversité beaucoup plus élevé en terme de valeur individuelle, en termes de valeurs collectives, en terme d'intensité et on a mis du temps à répondre à ce niveau-là."
La Ligue des champions débute dans huit jours à peine face à la Juventus de Turin, un club légendaire…
"Évidemment, c'est un grand rendez-vous pour le club. C'est un rendez-vous pour les joueurs, pour moi. On a l'ambition d'aller le plus loin possible dans cette compétition. Vous, les médias, faites en sorte que le Paris Saint-Germain apparaisse comme le favori de ce groupe-là. Je ne le pense pas. Si vous posez la question, que ça soit à Benfica ou à la Juventus, ils vous diront que c'est un groupe très ouvert où ces trois équipes ont la possibilité de se qualifier. Après, il y aura la vérité du match. Tout le monde veut gagner, tout le monde veut aller le plus loin possible. C'est une saison singulière dans l'histoire du football avec la Coupe du monde au milieu, avec des matches de Coupe d'Europe d'une semaine à l'autre, ce qui est très rare.
Il faudra faire en sorte d'avoir un état de forme optimal pour pouvoir être performant aussi. On y travaille beaucoup avec notre cellule médicale, performance et physique pour présenter toujours une équipe performante dans un calendrier très chargé. Il va y avoir une coupure après notre match à Lyon le 18 septembre, il y a une coupure pour trois à quatre joueurs parce que tous les autres joueurs de l'effectif seront en sélection. Ils n'auront pas de coupure donc jusqu'au 13 novembre, et derrière, ils vont partir pour la Coupe du monde. C'est pour ça que je parle aussi souvent avec mes joueurs sur le fait d'accepter de ne pas démarrer un match et d'accepter de sortir en cours de match parce que ça peut être une saison à 70 matches et une saison de 70 matches aussi longue, c'est la première fois."
Comment va Kylian Mbappé ? Comment le trouvez-vous au quotidien, à la fois sur le terrain et en dehors ? C’est un joueur fondamental pour le PSG et les Bleus à moins de 3 mois de la Coupe du monde…
"Très bien ! Déjà, j'ai été très heureux qu'il reste au Paris-Saint-Germain et encore plus lorsque j'ai été nommé entraîneur. Sa préparation n'a pas été tronquée mais elle a été différente parce que il y avait chez moi aussi cette obsession de gagner le Trophée des Champions. Il avait été suspendu, il n'était pas là. Puis après, il était un peu contrarié par un petit problème à la hanche aussi. Pour ce jeune joueur... Il n'aime pas quand je dis ça (sourire)…
Quand vous l'appelez "jeune joueur" ?
"C'est un jeune homme. Mais très mature. C'est quelqu'un qui est très intelligent, très structuré sur le plan mental et sur un plan intellectuel. Qu’on le veuille ou non, quand vous prenez la décision de rester à Paris avec tout ce que cela engendre, je pense que derrière, il y a une petite décompression et qu'on a du mal à repartir."
Quel est le rôle de votre binôme, Thierry Oleksiak ?
"C'est quelqu'un avec qui je collabore depuis une dizaine d'années. L'avantage d'avoir un adjoint aussi fidèle, compétent, c'est que sur un regard, il sait comment m'aborder. Et ça, c'est très important. Il est aussi celui qui absorbe beaucoup les discussions ou la frustration des joueurs. Il me fait remonter dans le bon moment, au bon timing, de la bonne manière ce que je dois savoir sur la situation des joueurs. Donc évidemment, c'est un fidèle, très compétent mais qui me connaît parfaitement. Je crois qu'il me connaît beaucoup mieux que certaines personnes de ma famille."
Ce qu'il se passe autour de Paul Pogba nous a tous choqués. Avec Luis Campos (le directeur sportif du PSG), le problème de l'entourage des joueurs est-il quelque chose qui vous préoccupe depuis des années ? Est-ce que vous en tenez compte quand il est question d'établir des recrutements ?
"Ça fait partie des bases de la réflexion, automatiquement. L'environnement familial, l'environnement professionnel, la psychologie du joueur. C'est déjà tellement difficile de trouver le bon profil, on doit automatiquement non pas mener une enquête de voisinage, mais il y a beaucoup de questions posées sur l'environnement du joueur. Mais il y a 20 ans ou 30 ans en arrière, c'était déjà plus ou moins pareil."