Trois matches, trois victoires, 141 points marqués contre seulement 19 encaissés : l’équipe de France féminine de rugby a été éblouissante lors des phases de poule de la Coupe du monde de rugby (avec notamment un cinglant 48-0 infligé à l’Australie). Il faudra jouer au moins aussi bien, si ce n’est mieux, pour espérer battre les Anglaises, tenantes du titre, en demi-finales mardi (20h45, sur France 2), à Belfast, en Irlande, un stade de la compétition que les Bleues ont déjà atteint six fois mais qu'elles n’ont jamais dépassé.
Plafond de verre. En sept participations à la Coupe du monde féminine, les Bleues ont ainsi fait preuve d’une belle régularité en atteignant les demi-finales à six reprises, terminant même troisièmes par cinq fois (1991, 1994, 2002, 2006, 2014). Pas de quoi rougir mais le fossé qui sépare la France de l’Angleterre, en termes de palmarès, est bien réel. Hasard des chiffres, les Anglaises ont disputé six finales, remportant le trophée à deux reprises (1994 et 2014).
C’est donc à un plafond de verre particulièrement résistant que les joueuses d’Annick Hayraud s’attaquent. "On a vraiment envie de passer ce cap. On a été euphoriques, un peu, après la victoire sur l'Irlande. Cela n'a duré que le soir. Dès le lendemain matin, on l'a vu dans le visage des filles : tout le monde a attaqué direct les vidéos, le travail, la récupération. On a vraiment basculé", a déclaré la capitaine Gaëlle Mignot samedi. L’expérimentée talonneuse (30 ans, 64 sélections) a encore en tête la déception de la Coupe du monde 2014, en France : devant leur public, les Bleues avait été battues d’un rien par les Canadiennes en demi-finales (18-16).
Un groupe talentueux. Gaëlle Mignot, Caroline Ladagnous, Safi N'Diaye et les autres actrices du drame de Jean-Bouin encore présentes dans le groupe ont digéré leur déception et sont reparties de l'avant, intégrant une nouvelle génération prometteuse avec l'ouvreuse Caroline Drouin, l'arrière Montserrat Amédée, le pilier Anaëlle Deshayes ou la troisième ligne Romane Ménager, toutes quatre âgées de 21 ans. Malheureusement, les Bleues seront privées de la dernière, auteure de quatre essais en poules mais blessée à un genou.
Pour passer l’obstacle anglais, l’équipe de France devra se surpasser et rester concentrée tout le match, ce qu’elle n’a pas su faire pendant 80 minutes contre l’Irlande. Les Bleues pourront compter sur leur défense de fer : seulement trois essais encaissés en trois matches (sept pour les Anglaises). Il faudra également faire parler la poudre en sublimant le jeu offensif montré en début de tournoi. Les Françaises ont su faire vivre le ballon à merveille, enchaînant percussions dévastatrices et passes dans la défense.
Impériales Anglaises. En face, l’Angleterre est un morceau de choix. Premières de leur groupe avec 159 points marqués, les Anglaises, portées par les arrières Kay Wilson et Emily Scarrat, sont sûres de leur force. La dernière confrontation entre les deux équipes a tourné à l’avantage de nos rivales. C’était lors du Tournoi des Six nations en février : après avoir mené 13-0 à la pause, les Françaises s’étaient effondrées en deuxième période pour finalement s’incliner 26-13. Mais les Bleues peuvent se rassurer en se rappelant qu’avant ce match, elles avaient battu les Anglaises sans discontinuer dans le Tournoi de 2013 à 2016.
Promouvoir le rugby féminin. Une victoire contre les Anglaises et une place en finale braqueraient un peu plus les projecteurs sur le rugby féminin en France. La Coupe du monde 2014 organisée dans l’Hexagone avait déjà permis aux Français de découvrir ces filles talentueuses. Au point de susciter des vocations : le nombre de licenciées est passé de 12.000 à 19.000 depuis le Mondial en France. Les Bleues sont de plus en plus suivies, à la télévision comme dans les tribunes.
Une popularité qui les accompagne jusqu’en Irlande. "On s’est fait la réflexion lors de La Marseillaise, on s’est dit ‘Oh la la, il y a autant de Français que d’Irlandais dans les tribunes'. Franchement, c’est génial !", se réjouit la demi de mêlée Yanna Rivoalen au micro d’Europe 1. Le soutien du public ne sera pas de trop pour aider les Françaises à battre les Anglaises. En cas de victoire, les Bleues affronteraient probablement les favorites néo-zélandaises (opposées aux États-Unis à 17 heures) en finale. Il sera alors temps de rêver d’un autre exploit, encore plus beau.