Des sourires splendides, des tenues extrêmement légères et des talons hauts : pendant des années, les hôtesses étaient indissociables du Tour de France. Il était d'usage qu'elles fassent la bise aux coureurs en leur remettant un bouquet de fleurs. Sexisme ordinaire et rétrograde ou folklore de la compétition ? La direction de la Grande Boucle a fini par trancher et a choisi de ne pas choisir : il y aura toujours cette année une hôtesse, mais elle fera la paire avec un hôte. Europe 1 revient sur l'histoire de cette tradition aujourd'hui remise en cause.
Le rôle de "Miss Étape", un statut iconique
La présence des hôtesses sur le podium est presque aussi ancienne que le Tour de France. La première archive où on peut voir une hôtesse sur la compétition sportive la plus populaire de France date de 1928. À l'époque, Yvette Horner est beaucoup plus habillée que les hôtesses d'aujourd'hui, mais arbore le même sourire en distribuant son énorme bouquet de fleurs.
Au fil des ans, les "Miss Étape" deviennent indissociables du Tour de France. En 1996, Laurent Delpech, journaliste à Europe 1, en rencontre une pour son reportage. "Pour être une des quatre filles qui montent sur le podium tous les soirs, le casting a été sévère", raconte le journaliste : 40 jeunes femmes étaient candidates. "Dans la journée, on reçoit des invités, on est dans la caravane publicitaire et on travaille pour le Tour de France", raconte à l'époque une hôtesse hollandaise de 23 ans.
Sexisme, attouchements : la parole se libère
Mais au début des années 2000, les premières polémiques arrivent. Faire de la pub sur la route du Tour ne suffit pas pour justifier leur fonction de "potiche", disent les associations féministes. Surtout, depuis plusieurs années, la parole des hôtesses se libère. De plus en plus, les témoignages d'agressions et de harcèlement sexuel se multiplient. En 2013, le coureur slovaque Peter Sagan est photographié en train de pincer les fesses d'une hôtesse sur le Tour des Flandres. En 2019, Europe 1 enquête sur le sujet et recueille un témoignage édifiant d'Alice, hôtesse lors d'une soirée d'entreprise.
"C'était un grand patron : il m'a touché, m'a pris les poignets et m'a forcé à danser avec lui", racontait Alice au micro d'Europe 1. Âgée de 18 ans au moment des faits, elle décide d'en parler à son agence, qui l'a recruté et qui l'a envoyée à cette soirée. "Derrière, ils n'ont rien fait concrètement. Ils m'ont même dit que cet homme-là s'en était pris à d'autres hôtesses. L'agence m'a envoyé au casse-pipe".
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Cette année, pour la première fois donc, il y aura une femme et un homme pour remettre le maillot jaune à la fin de l'étape. Un grand pas en avant pour les associations féministes. La direction de la course ne dit rien, en revanche, sur la traditionnelle bise. Pas nécessaire, peut-être, de faire une annonce en pleine crise sanitaire...