Après un an et demi sans compétition, Jérémy Chardy (35 ans) a eu du mal à lancer son premier tour, ce mardi, à l'Open d'Australie, mais il a su trouver les sensations et le chemin de la victoire, contre le Colombien Daniel Galan (1-6, 7-5, 6-1, 6-4). "Je ne savais même pas si je pourrais rejouer au tennis, donc pouvoir être ici, en Grand Chelem, sur le court, jouer, m'entraîner, c'est juste du plaisir et du bonus. Je savoure chaque moment et le résultat est même le moins important", assure le vétéran de 35 ans dans un grand sourire épanoui.
En juillet 2021, il s'est hissé en quarts de finale du tournoi olympique où il a été battu par le futur médaillé d'or Alexander Zverev. Puis il a perdu au premier tour de l'US Open, et depuis, plus rien. Le natif de Pau, dans le sud-ouest de la France près de la frontière avec l'Espagne, est sorti des radars et même du classement ATP, lui qui avait atteint le 25e rang en 2013, année où il avait joué les quarts de finale à Melbourne, son meilleur résultat en Grand Chelem.
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"Perdu un bout de cartilage"
Peu avant sa disparition du circuit, il avait expliqué ne plus être en état de jouer en raison d'une mauvaise réaction au vaccin contre le Covid, obligatoire à l'époque pour être accepté dans les tournois. Il perdait très rapidement toutes ses forces au moindre effort physique, sans que les médecins puissent rien y faire. Alors petit à petit, il a eu peur de ne plus pouvoir exercer sa passion, le tennis.
Puis, quand il a commencé à aller mieux, qu'il s'est remis à jouer un peu, il s'est blessé au genou: "j'ai perdu un bout de cartilage", raconte-t-il. Et le voilà reparti pour des mois de convalescence avec des périodes mentalement "très difficiles".
"Du jour au lendemain, tu passes d'avoir plein d'objectif, t'entraîner à... plus rien. Ta vie change du jour au lendemain…" souligne-t-il. Directeur du tournoi Challenger de Pau, impliqué dans le développement du circuit UTS imaginé par Patrick Mouratoglou, Chardy est également devenu il y a quelques mois le coach d'un autre joueur français : Ugo Humbert. "Ca m'a fait du bien, ça m'a gardé dans la compétition", explique-t-il.
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"L'inconnu"
Parallèlement, il a repris l'entraînement avec un objectif : l'Open d'Australie. "Le fait d'avoir un objectif précis, un tournoi que j'ai toujours rêvé de jouer quand j'étais petit, ça m'a aidé à m'entraîner dur, à pousser chaque jour", explique-t-il en précisant que parfois, il se poussait tellement qu'il était obligé d'interrompre les séances à cause des douleurs.
Et effectivement, il est parvenu à être suffisamment en forme pour venir à Melbourne où, après tout ce travail et ces espoirs, il a soudain eu peur d'entrer sur le court. "Je n'étais pas stressé, j'avais peur. C'était l'inconnu: je ne savais pas comment j'allais jouer, comment j'allais me sentir, comme si je ne connaissais plus mes schémas de jeu…", avoue-t-il.
"J'avais l'impression que je n'avais jamais joué au tennis. Je ne savais pas comment servir, faire un coup droit, un revers, j'étais dans le noir… Et petit à petit, j'ai commencé à me sentir mieux, à trouver des repères, et voilà…", poursuit-il. Du coup, au bonheur retrouvé et primordial de "ne plus avoir de douleur" et d'être "bien physiquement", s'ajoute quand même celui de la victoire et des sensations retrouvées de joueur de tennis.
Et la possibilité d'une retraite redevient un sentiment plus flou. "Pour l'instant, je joue. Si je joue bien, je voudrai continuer", assure-t-il. Reste que, maintenant qu'il est coach ET joueur, le sort pourrait lui jouer le vilain tour de le mettre face de son poulain Humbert, qui jouait son premier tour à l'Open d'Australie contre son compatriote Richard Gasquet. "Je n'ai vraiment pas envie de le jouer ! Ce serait bien qu'on trouve un coach pour lui", précise Chardy en promettant : "Tant qu'il n'aura personne, je ne le lâcherai pas".