La création d'une compétition de type "Super Ligue" va "dans le sens de l'histoire", selon Jean-Claude Darmon (photo d'illustration). 2:08
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Simon Ruben, édité par Margaux Lannuzel , modifié à
La riposte annoncée par l'UEFA, qui menace les clubs qui participeraient à la Super Ligue privée de sanctions contre eux et leurs joueurs, risque fort de ne pas tenir sur un plan juridique face au dossier "très solide" des équipes fondatrices de cette nouvelle compétition. Et plus généralement, sa création, va "dans le sens de l'histoire", selon l'ancien grand argentier du football Jean-Claude Darmon. 
DÉCRYPTAGE

"Le football ne sera pas vendu à ceux que j'appelle 'la sale douzaine'." La promesse a été formulée par le président de l'UEFA Aleksander Ceferin, lundi, après l'annonce de la création par douze clubs européens d'une "Super Ligue" privée. Dénonçant "l'immoralité" de ces clubs, qui disent vouloir organiser leur saison inaugurale "dès que possible", l'UEFA a d'ores et déjà agité la menace de sanctions contre ceux qui y participeraient. Mais seront-elles effectivement mises en œuvre, et suffiront-elles à freiner le développement de ce projet, dans les tuyaux depuis plusieurs années ? Europe 1 fait le point. 

"Le dossier des douze clubs européens est très solide"

Concrètement, l'UEFA prépare une riposte sur deux fronts. D'abord, contre les clubs : l'instance veut exclure les équipes inscrites en Super Ligue - dont le Real Madrid, le FC Barcelone, Manchester United ou encore la Juventus de Turin - de la Ligue des champions. Mais l'UEFA travaille aussi sur la possibilité d'empêcher les joueurs participant à cette nouvelle ligue de jouer avec leur sélection nationale. Ils pourraient donc être exclus de l'Euro, que l'UEFA organise cet été. 

La question est de savoir si tout cela peut être défendu face à des juges. "Il y a déjà eu des décisions de justice qui ont permis la création de compétitions privées et qui ont permis aux athlètes d'y participer, échappant à toute sanction", affirme au micro d'Europe 1 Thierry Granturco, avocat spécialiste en droit du sport. "Le dossier des douze clubs européens est très solide." 

Si l'exclusion des clubs et des joueurs s'avère illégale, l'UEFA n'aura quasiment pas de marge de manœuvre sur le plan juridique. Son meilleur relais pourrait alors être la mobilisation politique, déjà forte. En France, Emmanuel Macron s'oppose au projet. Il en va de même pour les dirigeants anglais, allemands ou encore espagnols. 

"Ce big bang est inéluctable dans le temps"

Dans beaucoup de pays, les supporters se sont aussi manifestés contre ce projet. Beaucoup de clubs, comme le PSG, ont refusé d'y participer, tandis qu'un grande chaîne britannique, BT Sport, a d'ores et déjà annoncé qu'il ne diffuserait pas les matches de la Super Ligue. Pour eux, cette compétition s'oppose frontalement à la culture sportive européenne, basée sur le mérite, avec l'idée qu'on retrouve en finale les meilleures équipes, et non pas les plus riches ou les plus connues. 

Mais la Super Ligue s'adresse à un public qui n'a pas cette culture, à des fans extra-européens, plus jeunes, qui perçoivent le sport d'abord comme un spectacle et veulent voir des stars - pas des épopées de "petits poucets". Quoi qu'on en pense, ce public existe, selon l'ancien grand argentier du football Jean-Claude Darmon, interrogé par Europe 1. "Moi je suis contre, pour des principes éthiques, philosophiques, et surtout d'équité sportive. Mais je pense que ce big bang est inéluctable dans le temps", souffle-t-il. "On y arrivera dans deux, trois, cinq ou dix ans."

"Ce sont des clubs professionnels", argue encore l'homme d'affaires. "Ils ont le droit d'aller à la Commission européenne, de dire qu'il y a un monopole, qu'ils veulent s'y soustraire et organiser eux-mêmes une compétition. Et ils gagneraient." Pour Jean-Claude Darmon, le débat doit donc avoir lieu dans la perspective de la création, quoi qu'il arrive, de cette Super Ligue. "C'est un rapport de force et d'argent : ils sont condamnés à s'arranger, c'est le sens de l'histoire."