En quelques jours, Clément Noël est devenu l'un des principaux acteurs du grand cirque blanc. Le jeune skieur français, qui fêtera ses 22 ans en mai prochain, n'avait pas encore signé le moindre podium en Coupe du monde à l'entame de l'hiver. Le 13 janvier, il a pris la deuxième place du slalom d'Adelboden, en Suisse. Une semaine plus tard, il a remporté le slalom de Wengen, en Suisse, avant de récidiver, le 26, à Kitzbühel, en Autriche, la "Mecque" du ski. Et le voilà en lice, mardi soir, à Schaldming, toujours en Autriche, pour signer un triplé historique, que seuls deux skieurs ont réalisé avant lui dans l'histoire de la Coupe du monde : l'Autrichien Benjamin Raich en 2001 et le Norvégien Henrik Kristoffersen en 2016. À 21 ans, le natif de Remiremont, dans les Vosges, est désormais sur les traces des plus grands.
OUI !!! Clément Noël s'impose sur le slalom de Wengen et décroche son premier succès en Coupe du monde pic.twitter.com/GaPo57dV3K
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Vosgien d'origine. Contrairement à beaucoup de ses camarades de l'équipe de France de ski alpin, Clément Noël n'est pas originaire de Savoie, mais des Vosges, où il a usé ses premières spatules au club de l'US Ventron, dans une petite commune de moins de 1.000 habitants. Avec son club, il enchaîne les titres de champion de France de slalom dans les catégories de jeunes : chez les benjamins en 2010, chez les minimes en 2011. Cette année-là, il est aussi sacré en géant, une discipline qu'il a pour le moment mise de côté pour se consacrer à la spécialité la plus technique du ski alpin, le slalom. Une spécialité française.
"Quand j'avais l'âge de comprendre et de regarder assidûment le ski, j'avais 12 ou 13 ans, c'étaient les grandes années de Julien (Lizeroux) et Jean-Baptiste (Grange), l'époque où ils gagnaient tout, celle de la grande équipe de France", relatait-il dans un entretien à l'AFP courant janvier. "Les deux étaient mes idoles mais si je devais en choisir un aujourd'hui, ce serait Marcel (Hirscher) car je le trouve hyper impressionnant sur tous les plans et vraiment au-dessus du lot". L'Autrichien Marcel Hirscher, la référence absolue du ski alpin, vainqueur des sept derniers Gros globes récompensant le meilleur skieur de l'hiver et encore en tête du classement général de la Coupe du monde cet hiver. Un Marcel Hirscher que Clément Noël est parvenu à devancer deux fois coup sur coup, lors de ses victoires à Wengen (Hirscher 3ème) et à Kitsbühel (Hirscher 2ème).
Très fort, très tôt. En 2012, à 13 ans, Clément Noël quitte les Vosges pour rejoindre la Savoie et la station de Val d'Isère. Après avoir fait ses débuts en Coupe d'Europe, il signe un premier résultat d'envergure lors des championnats du monde juniors 2015 (moins de 21 ans) à Hafjell, en Norvège. Âgé de 17 ans seulement, il y décroche une quatrième place pleine de promesse. Ce jour-là, la victoire revient au local Henrik Kristoffersen, avec lequel il est aujourd'hui à la lutte chez les grands…
2018, révélation aux JO. De quatrième place, il est également question trois ans plus tard, lors des Jeux olympiques de Pyeongchang, en Corée du Sud (photo ci-dessus). Clément Noël, qui a fait ses débuts en Coupe du monde en novembre 2016 avant d'y inscrire ses premiers points un peu plus d'un an plus tard, en décembre 2017, se révèle alors aux yeux du grand public lors du slalom olympique. Alors que les stars Hirscher et Kristoffersen partent à la faute, lui parvient à se défaire d'une piste piégeuse pour terminer les deux manches dans le top 10 (7ème de la première, 10ème de la seconde). Malheureusement pour le Vosgien, finalement 4ème, quatre centièmes le privent d'une médaille.
"J'ai joué la médaille, je peux être fier pour mes premiers JO même si ces quatre centièmes peuvent être frustrants", reconnaît-il après l'arrivée dans L'Équipe. "Je vais essayer de garder seulement le positif de cette journée. Je ne suis pas loin des meilleurs, c'est ma meilleure performance aussi, Coupe du monde et JO confondus." Cette performance ne reste pas sans lendemain. Le 4 mars, il prend la 4ème place du slalom de Kranjska Gora, ce qui est alors son meilleur résultat en Coupe du monde. Jusqu'à cet incroyable mois de janvier, où il ne quitte pas le top 4 en quatre épreuves (4ème, 2ème, 1er, 1er).
Jour de Noel #Kitzbuhel
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« Gagner ici c’est un rêve pour tout skieur »
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Un géant à la tête sur les épaules. Ces excellents résultats obtenus en l'espace de quelques jours seulement et ses deux victoires, acquises dans des conditions différentes (à Wengen, il était parti dernier de la 2ème manche après avoir réalisé le meilleur temps de la 1ère; à Kitzbühel, il était parti avant-dernier, avant Hirscher, après avoir signé le 2ème temps), prouvent le talent de ce nouveau géant du ski français, qui culmine à 1,91 m.
Sa grande taille lui évite de faire du chemin entre les piquets et de tirer le plus droit possible. Mais plus que sa technique, c'est son mental qui impressionne. "En biathlon, il y a Martin Fourcade et en ski alpin, on a Clément", a résumé dans L'Équipe Jean-Pierre Vidal, champion olympique de slalom en 2002. "Est-ce le fait qu'il ait quitté sa famille jeune ? En tout cas, il ne se pose pas de questions. Il est parti sur une ligne, il n'y a pas d'explosion de joie, pas d'émotion hors norme. On a l'impression que c'est normal. Il fait partie des tout grands. Il est parti pour marquer le slalom mondial." Et ce, peut-être dès jeudi soir, devant les 40.000 spectateurs, parfois hostiles, massés à Schladming…
Noël n'est pas seul. Ancien prodige lui aussi du ski français, le Savoyard Alexis Pinturault, désormais âgé de 27 ans, continue d'être le Tricolore le plus régulier en Coupe du monde. Sur les huit épreuves qu'il a disputées au mois de janvier, il n'est sorti qu'une seule fois du top 10, ce qui lui vaut aujourd'hui d'être sur le podium provisoire du classement général, derrière Hirscher et Kristoffersen. Troisième à Kitzbühel, "Pintu" aura lui aussi à cœur de faire briller le ski français, jeudi soir, alors que se profilent les championnats du monde, qui auront lieu du 5 au 17 février prochains, à Are, en Suède.