Bon vivant, séducteur, passionné par le terroir, mais aussi par le sport. Sous les deux septennats de Jacques Chirac, mort jeudi en fin de matinée, le sport tricolore a connu l'une de ses périodes les plus fastes en termes de récompenses : deux Coupes Davis, 108 médailles en trois Jeux olympiques - 1996, 2000 et 2004 - et surtout un titre de champion du monde de football en 1998.
Une compétition que Jacques Chirac a presque vécue de l'intérieur tant il a été associé de très près à l'organisation de l'événement. Le président s'était rendu à Clairefontaine pour y rencontrer les joueurs d'Aimé Jacquet, partager un déjeuner, assister à un entraînement, et avoir un petit mot pour chacun des artisans de la première étoile sur le maillot tricolore.
"Il était extrêmement joyeux et aussi fier que nous de cette victoire"
"Le foot n'était peut-être pas sa première passion, mais il était présent et très estimé", résume au micro d'Europe 1 Noël Le Graët. "Je me souviens de cette image, vous savez, quand il criait le nom des joueurs dans le stade [le soir de la finale, ndlr]. Quelquefois, il confondait un peu les noms c'est vrai, mais véritablement la Coupe du monde l’a passionné, et le vestiaire lui était ouvert", raconte le président de la Fédération française de football, alors président de la Ligue.
Cette porte du vestiaire, le chef de l'Etat n'a pas hésité à la franchir, notamment après ce France-Brésil du 12 juillet 1998. Un moment dont se souvient parfaitement Lilian Thuram, sur la pelouse ce soir-là : "Il était extrêmement joyeux et aussi fier que nous de cette victoire", relate le défenseur. "On finissait même un peu par oublier qu’il était le président de la République. Il avait toujours un mot très gentil et très agréable pour tous les joueurs, pas simplement parce qu’on avait gagné la Coupe du monde, mais parce que je pense que c’était quelqu’un de très humain".
"Des petits gestes qui en disent beaucoup"
"Je pense que, comme tous les Français, c’était un soir magique pour lui. Et dans ses yeux, on voyait la fierté de notre victoire", conclut le défenseur, auteur de deux buts en demi-finales face à la Croatie (2-1). Deux jours après la victoire finale, tous les joueurs et leurs femmes avaient été conviés à la garden party de l'Élysée pour le 14-Juillet.
Comme toute la France, Jacques Chirac est en communion avec cette équipe "black-blanc-beur" et ne manque pas de prendre le micro pour adresser un mot aux champions : "Je voudrais leur dire notre admiration, notre reconnaissance, et notre amitié. Ils sont la plus belle image que vous garderez cette année de la France dans votre cœur", avait alors déclaré Jacques Chirac.
Lilian Thuram se souvient d'un petit geste. "Généralement, les joueurs font des photos avec la Coupe et le président. Mais Jacques Chirac a appelé nos femmes pour qu'elles soient elles aussi sur les photos. Il avait compris que si nous avions pu avoir cette victoire, c'était en partie grâce à elles, et qu'il fallait donc leur rendre hommage. Ce sont des petits gestes qui en disent beaucoup", analyse au micro d'Europe 1 le champion du monde 1998.
Dans un texte transmis à la presse, Didier Deschamps, sélectionneur des Bleus et capitaine en 1998, a lui aussi l'annonce de la mort de Jacques Chirac "avec beaucoup de tristesse". "J'ai eu l'immense privilège, en tant que capitaine, de recevoir de ses mains la Coupe du monde, le 12 juillet 1998" au Stade de France, s'est-il rappelé. "Je me souviens de son bonheur éclatant après le match, dans notre vestiaire, mais aussi et surtout du soutien constant qu'il avait témoigné à l'ensemble de l'équipe de France dans les mois qui avaient précédé ce premier sacre mondial."
"On se sentait à l'aise quand on le rencontrait"
Mais l'empreinte de Jacques Chirac ne s'arrête pas au football : du ballon rond à l'ovale, le président savait s'adapter, avec toujours une convivialité et une proximité qui étaient "sa grande force", rapporte Bernard Laporte. "Il était venu à Marcoussis pour l'inauguration du Centre national du rugby [en 2002, ndlr]. Je me rappelle ses tapes amicales dans le dos, ses grandes poignées de main. Il était toujours très chaleureux et on se sentait à l'aise quand on le rencontrait", se remémore l'ancien sélectionneur de l'équipe de France, désormais à la tête de la Fédération française de rugby.
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Ce "respect" pour Jacques Chirac, qui était également grand fan de sumo, Bernard Laporte l'a conservé en dehors des terrains, même lorsqu'il était ministre des Sports sous Nicolas Sarkozy : "C'était un monument pour la droite française, il a fait deux mandats et c'était un grand homme d'État".