Marek Suchy, Geoffroy Serey Dié, Matias Delgado, Birkir Bjarnason, Michael Lang… Le FC Bâle, que le PSG affronte mercredi soir lors de la 3ème journée de la phase de groupes de la Ligue des champions, ne compte pas de stars internationales dans son effectif. Dans les rangs de ses supporters, en revanche… Le septuple champion de Suisse en titre est en effet le club de cœur d'un certain Roger Federer, natif de Bâle. Le tennisman aux 17 titres du Grand Chelem a d'ailleurs longtemps hésité entre la raquette et les crampons.
"Il était très bon au tennis et au football quand il était jeune et il a effectivement dû faire un choix vers 12-13 ans. Et il reconnaît souvent que ça n'a pas été une décision facile à prendre", nous explique Isabelle Musy, journaliste à la RTS, Radio Télévision Suisse, qui connaît très bien Roger Federer. Celui qui est régulièrement considéré comme le plus grand joueur de tous les temps aurait-il été un grand footballeur ? Europe 1 s'est posé cette question de sport-fiction.
Qualités physiques et ressources morales. "Il est certain que pour en être arrivé là où il est arrivé et se maintenir au top pendant autant d'années, il faut des qualités qui lui auraient servi dans le football, des qualités physiques, de coordination, de coup d'œil, de résistance psychologique ainsi que des ressources morales très grandes", insiste notre consultant Jean-Claude Perrin, qui a été préparateur physique de l'équipe de France de Coupe Davis mais aussi du PSG dans les années 1990. "Il y a assez peu de différences dans les qualités qu'on demande à un tennisman et un footballeur. Ce sont des qualités de vitesse, de détente, d'endurance, pour tenir un match, une saison, un tournoi.
Lors de sa carrière, "coach Perrin" a croisé un homme qui l'a impressionné par ses qualités tout terrain : Yannick Noah, footballeur émérite au sein du Variétés Club de France. "Au début de sa carrière, je l'ai vu parfois sur un terrain de foot sauter au niveau des mains du gardien de but", se souvient Jean-Claude Perrin. "Il avait des qualités de vitesse et de détente…" Federer en est pourvu aussi.
Bonne main mais pas forcément bon pied. Michaël Llodra, tout jeune retraité des courts, connaît lui aussi très bien Yannick Noah et Roger Federer. Et quand on lui demande si le Suisse aurait pu fouler la pelouse du Parc des Princes, mercredi, avec les couleurs de sa ville, pour affronter le PSG, "Mika" se montre catégorique : "Jamais il n'aurait pu être sur le terrain, jamais". "C'est dans ses rêves ça", sourit l'ancien joueur de l'équipe de France de Coupe Davis, volontiers taquin. "C'était un bon joueur suisse, un bon mais pas un grand. Chez lui, le pied gauche, c'est pour entrer dans la voiture, pas pour mettre des frappes."
Michaël Llodra reconnaît pourtant que les immenses qualités de compétiteur de Federer auraient pu l'aider dans le football : "Il est très fort physiquement, et l'adresse, la coordination, il en faut pratiquement dans tous les sports". Mais, au-delà des aptitudes physiques, la répétition des efforts - "On ne peut pas comparer quelqu'un qui fait des démarrages sur cinq à sept mètres avec celui qui court pendant 40 mètres", selon "coach Perrin" -, et le geste sportif différent du tennis au football.
"Il ne s'agit pas là de faire un beau geste de footballeur devant des photographes pour un magazine, il faut le faire en match avec des adversaires", insiste encore notre consultant. Et notre consoeur suisse Isbaelle Musy de résumer cette interrogation qui restera éternellement sans réponse : "On dit souvent d'un tennisman et de Federer en particulier qu'il a une bonne main mais aurait-il un eu un bon pied ?"
Sport individuel ≠ sport collectif. Ce n'est pas là la seule interrogation qui émerge. Car il ne s'agit pas seulement de main d'un côté (tennis) et de pied (football) de l'autre. Il y a surtout un sport individuel et un sport collectif. "On ne peut pas comparer deux sports littéralement opposés sur le plan mental", estime ainsi Michaël Llodra. "Il y en a un où tu te reposes sur une équipe, où tu peux gagner la Ligue des champions sans même jouer, alors que Federer, quand il gagne des Grand Chelem, il est tout seul sur le terrain." De là, découlent tout un tas de différences essentielles qui empêchent toute forme de spéculation, selon Jean-Claude Perrin. "Le joueur de tennis choisit son entraîneur, son médecin. Ce n'est pas le cas du joueur de football, qui subit ses choix dans le cadre du club. Il y a également les facteurs invisibles : les contrats, les agents, la répartition des prix alors que le footballeur, lui, est mensualisé."
Et puis, Federer n'avait peut-être pas forcément le tempérament pour être footballeur. Mais pas pour les raisons que vous pensez. En effet, Isabelle Musy rappelle qu'étant jeune, le Suisse était "caractériel" et qu'il cassait plus de raquettes qu'à son tour. Est-ce ce caractère bien trempé qui l'a fait choisir le sport individuel, où l'on maîtrise davantage les choses (ou on a le sentiment de davantage les maîtriser) plutôt que le sport collectif, où notre sort est aussi entre les pieds de nos coéquipiers ? Peut-être.
"Aujourd'hui, il reconnaît en tout cas en souriant qu'il a fait le bon choix", rappelle Isabelle Musy. "Il continue de suivre le FC Bâle mais aussi l'équipe suisse. Depuis qu'il ne joue plus cette année, il assiste d'ailleurs aux matches de Bâle à domicile." Même s'il est peut-être moins fondu de football qu'un Rafael Nadal par exemple, fan du Real Madrid, il ne fait aucun doute que "Roger" sera donc devant son écran pour le match très important de son équipe mercredi soir, sur la pelouse du Parc des Princes. Supporter du PSG, Michaël Llodra, resté proche de Federer et grand chambreur, sourit : "Il y a des textos qui sont partis déjà".