Qu’elle semble loin la finale de la Coupe du monde de rugby 2011. À l’époque, le XV de France avait failli arracher l’exploit en finale face aux redoutables All Blacks (défaite 8-7). Sept ans plus tard, les fans de rugby sont amers : en panne de résultats, les Bleus ne rivalisent plus avec les meilleures nations du monde. Depuis un an, les rugbymen tricolores n’ont gagné que deux de leurs douze matches, face à l’Italie et l’Angleterre (contre un nul et neuf défaites). Boudés par le public, les hommes du sélectionneur Jacques Brunel abordent la tournée d’automne, qui débute samedi à 21h contre l’Afrique du Sud, avec un esprit de (re)conquête. Europe 1 vous a trouvé cinq raison de ne pas boycotter la rencontre, ni les deux autres qui suivront.
Une équipe jeune et volontaire
Le départ à la retraite de nombreux cadres des Bleus après la Coupe du monde 2015 a laissé le XV de France sans leaders et sans expérience ces dernières années. Reparti de zéro, Guy Novès a échoué a créé l’enthousiasme au sein de son groupe. Jacques Brunel, qui a récupéré les Bleus en décembre dernier, a poursuivi dans la même voie en faisant confiance aux jeunes. La moitié des joueurs convoqués pour la tournée d’automne ont moins de 25 ans (15 sur 31). Demba Ba (pilier, 20 ans), Julien Marchand (talonneur, 23 ans) et Félix Lambey (deuxième ligne, 24 ans) devraient même porter le maillot bleu pour la première fois.
Une jeunesse qu’il va falloir canaliser face à d’expérimentés Springboks. "Je n'ai rien à redire sur l'intensité et la qualité des entraînements. J'ai même dû calmer les joueurs car il y a avait beaucoup d'envie et d'excitation. J'espère que c'est de bon augure pour samedi", s’est réjoui le capitaine Guilhem Guirado. Avec ses 60 sélections, le capitaine du XV de France (32 ans) fait office de vieux briscard, épaulé par la bande des trentenaires Yoann Maestri, Louis Picamoles (qui fait son retour après sa sanction en février), Mathieu Bastareaud, Yoann Huget et Maxime Médard. Des cadres chargés d’accompagner les jeunes talents tricolores, parmi lesquels Gaël Fickou, Antoine Dupont, Damian Penaud et Arthur Iturria. S’ils parviennent à jouer tous ensemble, le XV de France pourrait (enfin) faire des étincelles.
Le XV de départ contre l’Afrique du Sud : Médard - T. Thomas, Bastareaud, Doumayrou, Penaud - (o) Lopez, (m) Serin - Iturria, Picamoles, Lauret - Maestri, Vahaamahina - Gomes Sa, Guirado (cap.), Poirot
Des adversaires alléchants
Afrique du Sud, Argentine, Fidji. Voilà le menu épicé du XV de France pour cette tournée d’automne. Si ces trois test-matches ne seront pas une partie de plaisir pour les hommes de Jacques Brunel, ils devraient en revanche rassasier les amateurs de rugby. Les Bleus débuteront avec un morceau de choix : les Springboks. Pas au mieux au sortir de la dernière Coupe du monde, les Sud-Africains ont remonté la pente cette année sous l’égide du nouveau sélectionneur Johan "Rassie" Erasmus. Misant plus que jamais sur leur incroyable densité physique, les Boks ont même réussi l’exploit de s’imposer en Nouvelle-Zélande, en septembre dans le cadre du Four Nations (36-34). Une performance inédite depuis 2009.
Une fois passée la montagne sud-africaine, les Bleus défieront des Argentins (le 17, à Lille) qui évoluent dans les mêmes eaux du rugby mondial (ils sont neuvièmes au classement IRB, juste derrière la France). Toujours joueurs mais inconstants, les Pumas ont largement bénéficié de leur intégration au Four Nations en 2012 et sont désormais capables de rivaliser ponctuellement avec l’Australie et l’Afrique du Sud (ils ont battu les deux lors du Four Nations cet été). Enfin, le XV de France terminera sa tournée automnale contre les Fidji (le 24, au Stade de France), qu’ils ont toujours battu. Mais cette affiche promet un joli spectacle, les France-Fidji étant toujours riches en essais.
Les Bleus ne sont pas à l’abri d’un exploit
Soyons honnêtes : une victoire des Bleus en ouverture contre les Sud-Africains serait un exploit. Le XV de France n’a plus battu les Springboks depuis… 2009. Dans la forme de leur vie, les premiers adversaires des hommes des coéquipiers de Guilhem Guirado apparaissent imprenables. Pourtant, les Bleus peuvent y croire, pour la simple raison que la tournée d’automne est plus favorable aux Européens. En effet, les équipes de l’hémisphère sud nous rendent visite en fin de saison, quand les organismes des joueurs sont à bout (et vice-versa pour la tournée de juin).
L’an dernier, les Bleus avaient fait quasiment jeu égal avec la Nouvelle-Zélande (deux défaites serrées) et… l’Afrique du Sud (défaite 17-18). Alors que la tournée estivale dans le Sud est en général un long chemin de croix pour le XV de France, il n’est jamais aussi proche de l’exploit qu’en automne, sur ses terres. À un an de la Coupe du monde, nul doute que les Bleus ne voudront pas manquer l’occasion d’accrocher un "gros" du rugby mondial à leur tableau de chasse.
L’ambiance rugby à moindre coût
Plus de huit Français sur dix déclarent avoir une bonne image du XV de France, en dépit de ses mauvais résultats : c’est l’enseignement d’un sondage Harris Interactive pour RMC Sport publié jeudi. Un engouement qui ne se retrouve pourtant pas dans les ventes de billets. Pour remplir le Stade de France samedi, la Fédération a même été contrainte de vendre des billets à moitié prix (25 euros au lieu de 50 en catégorie 3, mais il reste des places à 15 euros). Si vous hésitez encore, toutes les places ne sont pas parties.
Cette grande braderie vise officiellement à "séduire un nouveau public". Vrai ou non, l’argument de la FFR offre surtout aux amateurs de rugby comme aux néophytes l’occasion de voir jouer le XV de France à moindre coût. Les deux affiches suivantes ne font pas le plein non plus : il reste des places à 33 euros pour France-Argentine, à Lille, et à 10 ou 25 euros pour France-Fidji, à Saint-Denis.
La Coupe du monde en ligne de mire
Dans moins d’un an, les Bleus s’envoleront pour le Japon afin d’y disputer la Coupe du monde (20 septembre-2 novembre). Pour les tricolores, la préparation commence en réalité samedi soir, sur la pelouse du Stade de France face aux Boks, avec la nécessité d'engranger dès maintenant résultats et certitudes. Il ne reste en effet que onze matches à Jacques Brunel pour trouver la bonne formule (trois en novembre, cinq pendant le Tournoi des six nations, et trois de préparation au Mondial) avant le rendez-vous japonais, où les Bleus ont été placés dans la "poule de la mort" (avec notamment l'Angleterre et l'Argentine).
Pour lancer une dynamique, le XV de France semble très motivé. "Il n'y a pas 36 questions à se poser, il faut gagner, car c'est dans la victoire qu'on créé beaucoup de choses. Si on ne créé pas une équipe, on ne pourra rien faire (au Japon)" a convenu Arthur Iturria. En bon vice-capitaine, Mathieu Bastareaud a fixé l'objectif de "trois victoires" sur le sol français. Un peu trop ambitieux les Bleus ? Peut-être, mais ça vaut le coup de plonger dans la mêlée avec eux.