Cinquante minutes pour convaincre : le comité de candidature français à l'organisation de la Coupe du monde de rugby 2023 passe son grand oral lundi matin à Londres, comme ses adversaires irlandais et sud-africain, dans un contexte interne délicat, avant le vote de World Rugby le 15 novembre.
La ministre des Sports Laura Flessel soutiendra le président de la Fédération française de rugby (FFR) Bernard Laporte pour lequel elle a diligenté une enquête administrative : malaise mis à part, la France possède de solides atouts pour décrocher la timbale. Ses concurrents aussi. World Rugby émettra ses recommandations le 31 octobre sur les trois dossiers, ici passés en revue.
#France : une grande expérience... mais un contexte explosif
Habitué aux gros événements sportifs. La France a déjà accueilli avec succès la Coupe du monde en 2007 et fait valoir son expérience dans l'organisation d'autres grands événements sportifs : Coupe du monde 1998 et Euro 2016 en football notamment. Le comité de candidature insiste également sur la symbiose et les économies d'échelle avec les JO 2024 à Paris.
Pléthore de stades. Savoir-faire, stades neufs ou récemment rénovés, infrastructures modernes : le comité français ne cesse de clamer qu'il a le meilleur dossier. Au point de se faire taper sur les doigts : la Fédération a dû s'excuser début septembre pour un tweet présentant la France comme le meilleur candidat, basé sur des chiffres de World Rugby. Mais l'absence, pour le moment, de stade de repli pour France-Japon le 25 novembre tombe au mauvais moment, et le risque terroriste, très élevé, est un handicap. Le Stade de France, où se déroulerait la finale, a été la cible d'une des attaques qui ont frappé la capitale le 13 novembre 2015.
L'enquête sur Laporte en toile de fond. Mais ce sont surtout les affaires internes qui menacent, comme l'enquête administrative sur Laporte, soupçonné de favoritisme envers le club de Montpellier. En lien ou non avec cette affaire, les deux premières têtes de l'exécutif, le président Emmanuel Macron et le premier ministre Edouard Philippe, ne se rendront pas à Londres au soutien. Pas plus que, finalement, la légende des All Blacks Dan Carter.
#Irlande : une authentique première mais des capacités limitées
La diaspora américaine comme atout. Contrairement à ses deux concurrents, l'Irlande n'a jamais organisé la compétition. Pour l'obtenir, elle met en avant une candidature à taille humaine et authentique et qui favorisera le développement du rugby en Amérique du Nord, où la diaspora irlandaise compte près de 40 millions de personnes.
Les hôtels abordables, les billets aussi. Ainsi, les organisateurs ont conclu un accord avec les hôteliers empêchant légalement d'augmenter le prix des chambres de plus de 20% par rapport à ceux constatés en 2021 et 30% des billets seront vendus moins chers qu'au Mondial-2015.
L'Irlande du Nord, un handicap ? Si le projet implique aussi l'Irlande du Nord, cette dernière pourrait être un handicap par son instabilité politique et la crainte sur la circulation des personnes et des biens une fois la sortie de l'UE actée. Mais des accords post-Brexit sont déjà en place avec Dublin sur les questions de sécurité et douanes pendant le Mondial. Le réseau de transports est lui le vrai point noir de la candidature, qui garantit à World Rugby la seule redevance minimale (120 millions de livres, 135,5 millions d'euros), moins que la France (150) et l'Afrique du Sud (160).
#Afrique du Sud : un pays attractif mais instable politiquement
Stades, climat, coût de la vie... des atouts à la pelle. Après 1995, l'Afrique du Sud rêve de revoir le Mondial après trois échecs en 2011, 2015 et 2019. Le Mondial de football 2010 lui a laissé de grands stades en bon état et elle possède une bonne capacité hôtelière et un climat idéal en automne, saison prévue pour le tournoi. Le faible coût de la vie est un autre argument majeur pour attirer les étrangers.
Criminalité et corruption. Mais le contexte socio-politique difficile pourrait avoir raison, une nouvelle fois, des espoirs sud-africains. Dans un pays où la criminalité et la corruption sont deux fléaux, le gouvernement a tardé à apporter son soutien à la candidature, reprochant à sa Fédération de ne pas en faire assez pour intégrer les Noirs dans un sports traditionnellement pratiqué par les Blancs. L'instabilité politique ne devrait pas aider à rassembler les voix. Au pouvoir depuis 1994, le Congrès national africain (ANC) est affaibli par les divisions autour de la succession de Jacob Zuma, mis en cause dans une série de scandales et qui doit normalement se retirer en 2019.