Deux défaites d’entrée face à l’Irlande et en Écosse, une sortie arrosée à Edimbourg qui défraye la chronique : les premiers pas du XV de France dans le Tournoi des Six Nations ressemblent à un cauchemar. Les hommes de Jacques Brunel, dans l’œil du cyclone, n’ont pas d’autre choix que de battre l’Italie, vendredi au stade Vélodrome de Marseille (21h), pour éviter l’affront ultime de la cuillère de bois (perdre tous les matches du Tournoi). La Squadra Azzurra a beau être, sur le papier, la plus faible équipe du Tournoi, le XV de France aborde cette rencontre sans grandes certitudes. Avec la peur de tomber au fond du trou.
La peur de la victoire
Le constat peut paraître sévère, mais il transpire des deux premiers matches du XV de France : cette équipe, malgré l’arrivée du nouveau sélectionneur Jacques Brunel il y a deux mois, a toujours l’air d’avoir peur de gagner. Contre l’Irlande, les Français, héroïques en défense, ont été cruellement battus dans les derniers instants par un drop d’extra-terrestre de Jonathan Sexton (13-15).
Une semaine plus tard, en Écosse, ils ont laissé échapper une victoire qui leur tendait les bras après une deuxième période catastrophique (26-32). Avec ces deux nouvelles défaites, le XV de France a étiré sa série noire à huit rencontres (sept défaites et un nul…), soit presque un an sans victoire (contre le pays de Galles, le 17 mars 2017, dans le Tournoi). "Pour le moment, il manque un petit quelque chose, mais je pense qu'on n'est pas très loin", a voulu positiver Jacques Brunel, après la défaite en Écosse. Le XV de France n’est peut-être pas très loin, mais ça commence à faire très, très long…
La peur de l’impact de la sortie arrosée d’Edimbourg
Le XV de France, déjà pas brillant sur la pelouse d’Edimbourg, a réussi à faire encore pire dans les rues de la capitale écossaise. L’image du rugby français tout entier a été (encore…) écornée par le psychodrame de la "troisième mi-temps" arrosée d’une partie des joueurs, dans la nuit suivant la défaite. Huit "fêtards" ont ainsi été exclus par Jacques Brunel (Thomas, Picamoles, Iturria, Danty, Macalou, Belleau, Lamerat, Lambey), décidé à taper fort et à ne rien laisser passer à ses troupes.
"Par ce comportement inapproprié, ils n'ont pas respecté leur statut de joueur international et les devoirs qui en découlent", avait justifié l’encadrement. Le sélectionneur n’a pas fait dans le sentiment en écartant notamment son meilleur joueur offensif, l’ailier Teddy Thomas, auteur des trois essais tricolores du Tournoi. Brunel a également choisi de se passer des services de Louis Picamoles, dont l’impact aurait pourtant été précieux contre l’Italie.
La peur d’une équipe sans repères
La "troisième mi-temps" d’Edimbourg a contraint Jacques Brunel à procéder à plusieurs retouches, avec le remplacement de Teddy Thomas sur l’aile par Benjamin Fall ou encore la sortie du deuxième ligne Arthur Itarria au profit de Paul Gabrillargues. Mais les observateurs guetteront surtout les grands débuts sous l’ère Brunel du centre Mathieu Bastareaud, à la place du "fêtard" Rémi Lamerat. Le joueur de 29 ans, suspendu contre l’Irlande et pas retenu en Ecosse, sera le guide d’une ligne de trois-quarts renouvelée à 80% (seul Geoffroy Doumayrou conserve sa place) et inexpérimentée (5 sélections de moyenne pour les quatre joueurs, hors Bastareaud).
"C'est une grosse marque de confiance que je me dois de rendre. Mais je ne me sens pas installé", a assuré le joueur de Toulon, interrogé mercredi. "J'espère qu'il va nous amener assurance, sécurité, et transmettre de la sérénité" a poursuivi, plein d’espoirs, son sélectionneur. Le XV de France, qui manque de repères et se cherche (comme depuis plusieurs années) dans le jeu, en a bien besoin.
La peur d’un exploit italien
Ce XV de France brinquebalant, considéré par beaucoup comme l’un des pires de l’histoire, peut-il pour autant perdre face à l’Italie ? Les Italiens, en plein marasme, restent sur deux cuillères de bois lors des deux dernières éditions du Tournoi, où elle n'a plus gagné un match depuis un succès en Écosse en février 2015. Cette année, la Squadra Azzurra a même encaissé la bagatelle de 102 points lors de ses deux premières rencontres, contre l’Angleterre (15-46) et en Irlande (19-56).
Le sélectionneur irlandais de l’Italie, Conor O’Shea, n’est pourtant pas inquiet, lui qui clame depuis son arrivée, en 2016, sa volonté de construire sur le long terme. "Nous avons un groupe jeune, qui n’a pas beaucoup d’expérience, nous devons apprendre à chaque match", a-t-il assuré mercredi. O’Shea a au moins un enseignement à dispenser à ses ouailles : l’Italie a déjà battu par deux fois le XV de France dans le Tournoi, en 2011 (22-21) et en 2013 (23-18), à Rome à chaque fois. Une première victoire sur le sol français, et l’opération reconstruction serait lancée pour de bon…