«Un service low-cost pour un prix de luxe» : pourquoi DAZN, nouveau diffuseur de la Ligue 1, mécontente les fans

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Romain Rouillard / Crédit photo : NICOLAS TUCAT / AFP , modifié à
La Ligue 1 de football est de retour ce vendredi soir avec un premier match opposant Le Havre au Paris Saint-Germain dans un contexte marqué par la fronde de certains supporters contre DAZN, le nouveau diffuseur du championnat, accusé de pratiquer des prix trop élevés.

La parenthèse enchantée des Jeux olympiques nous l'aurait presque fait oublier. Et pourtant, la Ligue 1 de football reprend bel et bien ses droits ce week-end avec, en guise de mise en bouche, le déplacement du Paris Saint-Germain sur la pelouse du Havre ce vendredi à 20h45. Mais l'excitation qui accompagne généralement les amoureux du ballon rond, quelques jours avant le coup d'envoi d'une nouvelle saison, laisse place cette année à un goût beaucoup plus amer.

La rencontre de vendredi soir sera diffusée sur DAZN, nouveau détenteur depuis cet été des droits du championnat de France. Et c'est là que le bât blesse pour les supporters qui dénoncent les tarifs pratiqués par la plateforme britannique. Pour profiter de l'offre, comprenant 8 matchs de Ligue 1 sur 9 ainsi que la Betclic Elite (le championnat de France de basket), le MMA, la boxe et les Ligues féminines de football, il faut débourser 29,99 euros par mois et même 39,99 euros pour une offre sans engagement comprenant un préavis d'un mois pour une annulation. Pour 14,99 euros mensuels, DAZN propose l'ensemble de son catalogue, mais seulement un match par journée de Ligue 1.

Une couverture des matchs qui interroge

Des chiffres qui ont eu l'effet d'une véritable douche froide pour certains consommateurs. L'un d'entre eux, connu sous le pseudonyme "La Minute Foot" sur X, a même lancé le hashtag #BoycottDAZN qui s'est retrouvé en tête des tendances sur le réseau social ce mercredi 14 août avec près de 15.000 publications en lien. "Depuis 4 ou 5 ans, j'avais souscrit à tous les abonnements. Mais là, ce n'est pas possible", nous confie Ilhan, l'administrateur de ce compte.

Car au-delà du prix, jugé prohibitif, la couverture des rencontres soulève également une flopée d'interrogations. Selon les informations de L'Équipe et du Parisien, seules 3 des 8 affiches bénéficieront d'un dispositif classique : commentaires assurés par un journaliste et un consultant, accompagnés d'un homme ou d'une femme de terrain, sur la pelouse, au plus près des joueurs. Pour les plus petites affiches, la prise d'antenne ne s'effectuera que 10 minutes avant le coup d'envoi et aucun multiplex ne sera proposé.

29,99 euros par mois, "un juste prix" selon le PDG de DAZN

"Après 16 ans de fidélité, je ne vais pas m'abonner à la chaîne diffuseur de la Ligue 1. Un service low-cost pour un prix de luxe, c'est non", écrit Julien, supporter de Lille, sur X. "À titre de comparaison, mon abonnement à Lille me coûte 180 euros par an. Pour DAZN, on est à plus de 300 euros, donc c'est vraiment très cher. Je ne suis pas en manque de moyens, je pourrais payer. Mais là, je me sens volé", ajoute-t-il auprès d'Europe 1. Julien pointe aussi du doigt un catalogue jugé rachitique, avec uniquement la Ligue 1 s'agissant du football. 

Il faut dire que la question des droits TV a pris des allures de feuilleton tout au long de l'été. Alors que Vincent Labrune, le président de la Ligue de football professionnel (LFP) espérait un accord autour du milliard d'euros, c'est finalement pour 500 millions d'euros que les droits de diffusion ont été cédés au duo DAZN/BeIN Sports. Un deal décevant à la fois pour la Ligue, pour les clubs, dont le financement dépend à près de 50% des droits TV, et pour les consommateurs désormais confrontés à des diffuseurs en quête de rentabilité.

"Ce tarif est le résultat d'un calcul simple : c'est le nombre d'abonnés que l'on espère avoir, que l'on multiplie par le prix pour obtenir la rémunération des clubs. Donc il n'y a pas de surprise", nous explique DAZN France, qui s'appuie sur l'interview de Shay Segev, PDG de la plateforme, dans les colonnes de L'Équipe. Selon lui, 29,99 euros par mois est "un juste prix" et permet, dit-il, non pas de "payer DAZN" mais de rémunérer "la Ligue et les clubs".

La tentation des alternatives illégales

DAZN France balaie par ailleurs les allégations du journaliste Pierre Ménès, selon qui DAZN, qui espère convaincre 1,5 million d'abonnés sur les six premiers mois, n'en compterait pour l'instant que quelques centaines. "C'est complètement faux. De toute façon, nous ne communiquons pas sur nos chiffres", affirme la plateforme.

Et le diffuseur de poursuivre : "Les consommateurs verront la qualité du produit et jugeront. Nous pensons que DAZN apporte une forte valeur ajoutée au football français par rapport à un diffuseur traditionnel. C'est une plateforme qui permettra d'interagir différemment avec le contenu, avec une accessibilité aux contenus qui sera bien plus grande". Des arguments qui ne convainquent pas Marwan Belkacem, 32.000 abonnés sur X et relais de l'actualité de l'OM sur le réseau social. "Ce sont des discours qui font peser la responsabilité de cette situation sur les consommateurs. C'est aussi pour ça que je vais boycotter", indique-t-il auprès d'Europe 1. 

En guise de protestation, de plus en plus d'amateurs songent à se tourner vers des alternatives comme l'IPTV qui permet de visionner quasiment l'intégralité des chaînes du monde, via un petit boîtier ou une application. Un procédé parfaitement illégal et pourtant de plus en plus séduisant pour les consommateurs. "C'est la solution que je vais devoir employer", avoue Ilhan. "C'est forcément quelque chose qui te passe par la tête", appuie Merwan Belkacem qui dit néanmoins vouloir "rester dans la légalité". Dans un communiqué, la LFP a annoncé lundi 12 août avoir obtenu une nouvelle vague de blocages d'IPTV et de sites de streaming illégaux, qualifiés par DAZN de "menaces pour le foot français".