Puisqu’il n’a pas été autorisé à le mettre sur le terrain, Karim Benzema a décidé de le mettre en dehors. C’est en substance que pense Vincent Duluc, journaliste à L’Équipe et suiveur historique des Bleus, après l’entretien accordé à Marca par l’attaquant du Real Madrid, récent vainqueur de la Ligue des champions. "Ce que je pense, c’est qu’à l’intérieur de l’équipe de France, les joueurs se sentent abandonnés et trahis par l’interview de Benzema. Ce que dit Benzema aujourd’hui, c’est ‘je ne pense qu’à moi, je n’en ai rien à fiche de votre Euro’ et, en plus, si vous vous plantez, ‘ça m’arrange’, c’est ça le sous-texte. Valbuena a dit ‘Je parlerai, mais après l’Euro’. Lui, Benzema, a fait le choix de parler avant l’Euro, il choisit de mettre le feu. Il trouve donc que son cas est plus important que celui de l’équipe de France."
"Ce n'est pas du tout la question". Sur le fond des propos de Benzema, qui estime que le sélectionneur national, Didier Deschamps a cédé sous la pression d’une partie raciste de la population, Vincent Duluc estime que l’attaquant du Real essaie de duper son monde. "C’est une victimisation qui est peu supportable car le fond de l’affaire, c’est qu’il n’est pas en équipe de France non parce qu’une partie de la France est raciste - cet état de fait, on peut en débattre c’est possible, probable peut-être, mais ce n’est pas du tout la question -, Benzema n’est pas en équipe de France parce qu’il est mis en examen après l’affaire du chantage à la 'sextape' de Valbuena."
"Certes, il n'est pas condamné, mais..." Dans son entretien, "Benz" juge sa non-sélection injuste, compte-tenu de son rendement sportif et du fait qu’il n’a pas été encore jugé dans l’affaire de la "sextape". "Certes, il n’est pas condamné, mais comment voulez-vous faire une équipe quand l’avant-centre est mis en examen parce que le meneur de jeu a porté plainte. La décision (de ne pas retenir Benzema) n’est pas purement sportive mais elle était inévitable et n’a rien à voir avec ses origines. D’autant qu’il ne peut pas reprocher ça à Didier Deschamps. Je veux bien que Didier Deschamps ait des défauts mais il a défendu Benzema au-delà de ce qu’il aurait fallu. Moi, je trouve qu’il est même allé trop loin. Il voulait encore au mois de mars le faire venir alors que les conditions n’étaient pas réunies, donc il ne peut pas reprocher ça à Deschamps ni à la Fédération française de football (FFF)."
Vincent Duluc considère que de tels propos peuvent plomber l’atmosphère autour de l’équipe de France. "Ce qu’il a dit, mais aussi ce qu’ont dit Éric Cantona et Jamel avant lui", insiste le journaliste de L’Équipe. "Parce que je pense que ce qui lui a donné le courage de dire ça, c’est ce qu’ont dit Cantona et Jamel Debbouze sur le même sujet." Et l’auteur d’Un printemps 76 de s’irriter contre le discours tenu par l’humoriste, qui avait regretté de ne pas avoir de "nos" représentants dans le groupe France : "C’est irresponsable, c’est clivant, ça divise la société, et ça divise un domaine qui symbolise le vivre-ensemble. Et puis après, ça veut dire quoi ? Il faut que chacun soit représenté, que Gourcuff soit en équipe de France, pour que les Bretons introvertis soient représentés ?" C’est une bonne question.