Il y a encore quatre ans ce n’était qu’une simple fonctionnalité de Facebook, mais désormais Messenger est une application à part qui entretien de grandes ambitions : devenir "la messagerie que l’on utilise avec ses amis, sa famille ou même des entreprises". Au sein de Facebook c’est un Français qui gère cette montée en puissance. David Marcus, ancien patron de PayPal, désormais vice-président de Facebook en charge de Messenger était à Paris mercredi. Europe 1 l’a rencontré.
En 2014, juste après votre arrivée, il est devenu obligatoire de passer par l’application Messenger pour envoyer des messages. Ce changement avait été mal compris par les utilisateurs...
L’objectif, c’était vraiment de dire : si la messagerie est un enjeu pour nous il faut vraiment que l’on ait une application indépendante. D’abord pour les notifications. Car un réseau de messagerie où les gens ne reçoivent pas les notifications ne fonctionne pas. Or, sur Facebook tous les utilisateurs n’activent pas les notifications. Sur Messenger, si.
Mais nous avions aussi besoin d’avoir une application séparée pour pouvoir innover et créer de nouvelles fonctionnalités. C’est ce que nous avons fait depuis avec les appels vidéo ou les appels audio. Et enfin, la messagerie est vraiment une ‘fonctionnalité de premier niveau’ donc avoir un accès dédié était essentiel pour faire de Messenger un succès.
Le résultat est-il au rendez-vous ?
Trois ans après, nous avons plus d’un milliard d’utilisateurs - 1,2 milliard selon les chiffres communiqués en avril - donc je pense que ça a bien fonctionné !
Au cours des derniers mois, vous avez ajouté une fonctionnalité baptisée Messenger Day, mais le résultat est plus que controversé. On vous accuse d’avoir copié Snapchat, c’est le cas ?
La messagerie visuelle c’est quelque chose qui est en train d’arriver un peu partout, mais qui, effectivement, a été démarré par Snapchat. C’est un format. Or comme le format du fil, qui a été inventé par Facebook, et qui est adapté sur plusieurs plateformes, les formats sont des choses auxquelles il faut s’adapter. C’est ce que le public demande. Et s’ils ont envie d’avoir une messagerie visuelle, alors on va leur apporter une messagerie visuelle. En plus de cela, ça a du sens sur une plateforme de messagerie et les usagers trouvent ça bien pratique.
Pourtant, on voit fleurir les captures d’écrans montrant que personne n’en publie…
Oui, ça fonctionne vraiment bien notamment chez les adolescents qui l’utilisent beaucoup, pour se réunir par exemple. Nous n’avons pas encore partagé de chiffres, mais nous le ferons prochainement et il y'a encore de belles évolutions à venir sur les stories.
"De belles évolutions" : c’est-à-dire ?
Nous sommes en train de construire plusieurs choses, mais nous en parlerons quand nous aurons terminé.
Parmi les nouvelles fonctionnalités certaines sont disponibles uniquement dans certains pays. C’est le cas notamment de l’échange d’argent entre amis. C’est possible depuis trois ans aux États-Unis, mais toujours pas en France. C’est si compliqué que cela ?
Oui, c’est assez compliqué si l’on veut offrir une expérience utilisateur qui soit satisfaisante. D’autant que le marché français a des spécificités. Mais nous sommes en train de travailler dessus et nous espérons pouvoir le proposer en France dès que possible. Mais, il faut bien comprendre que nous ne sommes pas les seuls maîtres du calendrier. Nous devons travailler avec les institutions financières et les banques de chaque pays et cela prend un peu de temps.
L’autre grosse nouveauté de Messenger, c’est l’intégration des ‘expériences’, des bots capables de répondre aux demandes des utilisateurs automatiquement. C’est notamment utile pour les entreprises qui veulent faire du service client. Mais beaucoup de gens ne savent ni de quoi il s’agit, ni que ça existe sur Messenger. Est-on vraiment prêt ?
Oui, les gens sont prêts. L’une des choses qui manquait vraiment était la possibilité de pouvoir découvrir toutes les possibilités, les ‘expériences’ qu’offrent ces chat-bots. Pour corriger cela, on est en train de lancer aux Etats-Unis un onglet qui permet de les découvrir dans l’application et que l’on va faire venir sur le marché français dans les mois qui viennent.
A quelle échéance ?
J’espère d’ici la fin de l’année.
Mais soyons honnêtes, ce n’est pas cet onglet qui va donner aux utilisateurs le réflexe des ‘bots’ pour échanger avec les marques…
Ça va prendre du temps car les habitudes sont établies et il faut du temps pour les changer. Pour y arriver, il faut que nous ayons des expériences satisfaisantes, notamment sur le service à la clientèle. C’est ce que nous proposons avec Air France ou la SNCF. Cette dernière permet aux clients de réserver un billet et de recevoir leur confirmation directement dans Messenger. Grâce à cela, les utilisateurs vont commencer à développer une certaine habitude de venir sur Messenger pour trouver les entreprises avec lesquelles ils souhaitent interagir.
Quant à l’intelligence artificielle que vous proposez aux États-Unis avec l’assistant M, de quoi s’agit-il ?
Son but est d’assister l’utilisateur dans une conversation existante et de le diriger vers la bonne expérience. Un exemple, si vous avez une conversation et que je vous demande où vous êtes, M va vous proposer de partager votre localisation dans la conversation. Avec le paiement, si je vous dis que vous me devez 20 euros, un bouton de paiement va apparaître. C’est aussi grâce à ce type d’interactions que l’on va pouvoir amener les utilisateurs vers les bonnes expériences dont nous parlions juste avant.
Cet assistant va-t-il arriver en France ?
Une fois que nous aurons bien maîtrisé l’espagnol (la deuxième langue avec laquelle il fonctionne, ndlr), on va s’occuper de la France. Ce ne sera pas dans un mois, mais plus vraisemblablement début 2018.
L’autre gros dossier qui vous occupe en ce moment, c’est la publicité. Je crois savoir que vous êtes en train de tester l’intégration de publicités dans Messenger ?
En fait, il y a trois façons de monétiser Messenger. D’abord il y a la publicité dans le fil d’actualité Facebook pour que les marques encouragent les utilisateurs à ouvrir des conversations dans Messenger. Ça, c’est déjà disponible. La deuxième option, c’est d’avoir les mêmes publicités, mais directement dans Messenger. Ou de mettre en avant des contenus spécifiques dans le nouvel onglet de découverte des expériences. C’est ce que nous testons actuellement en Australie et en Thaïlande. La troisième option, qui est aussi disponible, et que l’on appelle "message sponsorisé", ce sont des messages qui vont inciter l’utilisateur à reprendre une conversation qu’il avait lancée avec une entreprise.
La publicité dans Messenger va-t-elle être déployée à grande échelle ?
Tout dépendra du retour des utilisateurs. Nous avons lancé le test il y a moins de trois mois, mais pour l’instant cela se passe très bien. Nous allons l’étendre et essayer d’autres choses, mais si l’on voit que ça fonctionne, on le rendra disponible plus vite.