Comment se passer de Google ? C'est le problème auquel était confronté le fabricant chinois Huawei, deuxième vendeur de téléphones au monde, derrière Samsung mais devant Apple. Soupçonnant Huawei d'espionnage au profit du gouvernement chinois, les États-Unis lui ont interdit l'an dernier d'utiliser l'écosystème d'applications Androïd (Google, Maps, Gmail, etc.) pour ses smartphones. Huawei a donc dû trouver des alternatives. Et cocorico : pour son moteur de recherche, le géant chinois a choisi Qwant, le petit Français qui respecte la vie privée des utilisateurs.
Aller vers plus de respect de la vie privée
Concrètement, Qwant sera installé d'office comme moteur de recherche, en lieu et place de Google, sur le navigateur Internet des téléphones de la gamme P40 de Huawei (disponible en France à partir du 21 avril). Cela concerne les modèles vendus en France, en Allemagne et en Italie. "Nous avons commencé à discuter fin 2018 et la collaboration s'est faite très naturellement", explique Jean-Claude Ghinozzi, le PDG de Qwant, au micro d'Europe 1. Le modèle du moteur de recherche repose sur le respect de la vie privée des utilisateurs et la promesse de ne pas collecter ni revendre leurs données personnelles.
"On a clairement insisté, dès le démarrage des discussions, sur notre positionnement alternatif qui est très clair et absolument pas négociable. Huawei l'a accepté sans problème, ils voulaient aller vers plus de respect de la vie privée des utilisateurs", assure le PDG de Qwant. Message martelé également par le directeur général de Huawei Consumer France, Alex Huang : "Il était important que nous puissions garantir un haut niveau de sécurité à nos clients quand il s’agit de leurs données de recherche sur Internet. Qwant est le meilleur partenaire que nous puissions choisir."
Qwant essaye de se relancer
Cette annonce offre une bouffée d'air frais à Qwant qui abordait l'année dans une position très compliquée. Secoué par des enquêtes sur les pratiques managériales en interne, le fondateur Éric Léandri avait accepté de quitter la présidence de l'entreprise. Dans le même temps, l'absence de résultats significatifs après tout de même près de dix ans d'existence commençait à peser dans les comptes (Qwant revendique une audience de 5 millions de visiteurs uniques par mois en France, soit 4% de parts de marché). Une recapitalisation est ainsi prévue avec la Caisse des dépôts et consignations et le groupe allemand Axel Springer.
Nommé PDG en début d'année et chargé de donner une nouvelle impulsion au moteur de recherche, Jean-Claude Ghinozzi ne cache pas que "l'enjeu économique est important pour Qwant". "Nous venons de l'ordinateur. Ce partenariat est une opportunité pour nous d'investir le marché du mobile", précise-t-il. Surtout, Qwant pourrait élargir massivement son audience. "L'accord est fait de telle manière qu'on commence avec ces trois pays pour pouvoir ensuite, en tâche d'huile, collaborer avec Huawei sur d'autres territoires", se projette Jean-Claude Ghinozzi. "À terme, on pourrait potentiellement toucher 40 à 50 millions d'utilisateurs si on couvre le marché européen."