L'Allemagne n'a déjà plus le choix. Battus d'entrée par le Mexique (1-0), les champions du monde en titre ont 90 minutes pour éviter une élimination historique. Une défaite face à la Suède samedi, à Sotchi (20 heures), et la Mannschaft serait forcée de rentrer à la maison bien plus tôt que prévu, elle qui a systématiquement atteint les quarts de finale de la compétition depuis 1954.
Une pression "énorme". Dans les couloirs du stade Loujniki, avant même que ne résonne le Deutschlandlied, l'hymne national allemand, les visages étaient anormalement tendus, dimanche face à la "Tri". Certains y lisaient de la détermination, d'autres y décelaient les reflets du doute. Les symptômes étaient déjà là : la Mannschaft restait sur deux défaites (dont une face à l'Autriche en préparation), trois matches nuls et une victoire serrée (2-1) contre l'Arabie Saoudite, pulvérisée depuis par la Russie (5-0) en ouverture du Mondial. Et la polémique née des photos montrant les milieux de terrain Mesut Özil et Ilkay Gündogan avec le président turc Recep Tayyip Erdogan n'avait rien arrangé.
Une heure et demi plus tard, le temps de tomber face au Mexique, les maux semblaient encore plus profonds, les visages des joueurs encore plus marqués. "La pression est énorme", reconnaissait ainsi Thomas Müller, mercredi, au lendemain d'une réunion de crise avec le staff, au camp de base de Vatutinki, dans la banlieue de Moscou. "Après le premier match, tout le monde a perdu la tête, que ce soit les joueurs ou les médias", a observé de son côté l'attaquant Mario Gomez.
Les anciennes gloires s'en mêlent. Car en Allemagne, la performance de la sélection n'est pas du tout passée. La presse, mais aussi un grand nombre d'anciennes gloires de la Mannschaft n'ont pas pris de pincettes pour critiquer l'équipe. Stefan Effenberg, Lothar Matthäus et Paul Breitner ont pointé non seulement les lacunes tactiques et techniques, mais aussi et surtout l'état d'esprit de champions du monde qui ont semblé endormis sur leurs lauriers désormais fanés...
"Ce qui m’a le plus dérangé et que je ne comprends pas, c’est que nous n’avons aucun joueur capable de régler les problèmes. Aucun joueur n’est en état de trouver une solution quand ça devient difficile. Chacun fait son petit truc dans son coin, tout le monde attend qu’un autre ait une idée, et tout le monde sait qu’elle ne va pas arriver. C’est déprimant", a notamment fulminé le dernier cité, dans les colonnes de Sport.de.
Une chasse aux coupables. L'opinion, elle, réclame des têtes à Joachim Löw, connu pour sa fidélité à ses joueurs-clés : celle d'Özil, d'abord, le très décevant animateur de l'attaque, cible de nombreux réquisitoires, celle de Sami Khedira aussi, voire de Timo Werner. "La cause principale de la défaite contre le Mexique est à chercher du côté de nos joueurs leaders", s'y est même mis Manuel Neuer, le gardien de la Mannschaft, laconique en conférence de presse mardi.
"Jogi" Löw, icône depuis le titre de 2014, n'a jamais non plus été aussi près de tomber de son piédestal. Jeudi, un sondage publié sur le web allemand montrait que 67,3% des fans de football, soit plus de deux sur trois, estiment que sa composition d'équipe contre le Mexique était "plutôt mauvaise" ou "clairement mauvaise".
Maître-mot : positiver. L'auto-critique du début de semaine a néanmoins fait place à la pensée positive. "Nous devons gagner, nous n'avons plus de joker", admet par exemple Sami Khedira. "Mais le groupe est solide, nous avons beaucoup de joueurs qui n'ont pas encore joué et qui sont chauds, je crois que nous pouvons le faire".
Et Hans-Dieter Hermann, préparateur mental de l'équipe depuis 2004, de renchérir, comme pour mieux convaincre ses joueurs : "Cette équipe et cet entraîneur ont souvent prouvé qu'ils savaient gérer la pression".
Les champions du monde ont aussi reçu le soutien de Franz Beckenbauer, qui n'a pas hésité à dresser un parallèle avec la Coupe du monde 1974, lorsque son équipe avait connu de violents soubresauts avant le tournoi et perdu le match d'ouverture (1-0, contre la RDA) pour finalement soulever le plus beau des trophées devant son public. "Dans la nuit après le match ça a décoiffé. Autour de quelques bouteilles de vin, nous nous sommes dit nos quatre vérités !", s'est souvenu "der Kaiser" dans Bild. La réunion de crise de la Mannschaft "était absolument nécessaire", a-t-il alors jugé.
Un match qui s'annonce difficile. Pour les amateurs de frissons, deux autres statistiques circulent : le sélectionneur Joachim Löw a plutôt raté ses deuxièmes matchs dans les six tournois (deux Mondiaux, trois Euros, une Coupe des confédérations) qu'il a dirigés : son bilan est de deux défaites, trois nuls et une seule victoire. Et au 21ème siècle, le tenant du titre a été éliminé trois fois sur quatre en phase de poules (la France en 2002, l'Italie en 2010 et l'Espagne en 2014).
Surtout, les Suédois, qui ont déjà privé l'Italie d'un voyage en Russie, débarquent à Sotchi avec le plein de confiance, après leur victoire face à la Corée du Sud (1-0). Avec une victoire, ils seraient quasi assurés de disputer les huitièmes de finale. Et de plonger l'Allemagne dans une crise sans précédent.
Mats Hummels vers un forfait
Le défenseur central allemand Mats Hummels, touché au niveau d'une vertèbre cervicale jeudi, risque "probablement" d'être indisponible pour affronter la Suède samedi, a annoncé son sélectionneur vendredi. Cette annonce est un gros coup dur pour l'Allemagne qui perd l'un des piliers de sa défense. Pour le remplacer, Antonio Rüdiger tiendrait la corde.