"Je regrette", a déclaré l'accusée mercredi matin avant que la cour ne se retire pour délibérer. "Je n'ai jamais voulu faire du mal volontairement à Hugo. Il n'y a pas un jour où je ne pense pas à Hugo, à sa famille", a-t-elle poursuivi, avant d'assurer : "je ne suis pas une meurtrière".
Les parents du petit Hugo, un maître pâtissier et une secrétaire-comptable, âgés de 42 ans aujourd'hui, espèrent obtenir "justice" et savoir enfin ce qu'il s'est passé le 22 octobre 2013. Ce jour-là, à 07h30, la mère du nourrisson dépose un bébé souriant et en bonne santé chez sa nourrice à Marlenheim (Bas-Rhin).
Moins d'une heure plus tard, vers 08h30, l'assistante maternelle appelle les pompiers, affolée. "Il ne respire plus", "il est très, très mou", dit-elle d'une voix haletante. Arrivés aux urgences, les parents de Hugo apprennent que leur fils est décédé. "Là, tout s'est effondré, on ne voulait pas le croire...", a raconté lundi le père, en larmes.
Dix ans d'instruction
La nourrice avoue avoir secoué le bébé mais explique avoir agi sous le coup de la panique car l'enfant était devenu "amorphe, comme une poupée de chiffon", après avoir englouti le contenu d'un biberon. Selon elle, le lait lui sortait par le nez et la bouche.
"C'était pour le faire revenir à lui", a-t-elle assuré en sanglotant. Selon des experts entendus par la cour d'assises, Hugo présentait des lésions correspondant à un secouement très violent survenu le jour même des faits et à un secouement antérieur, environ deux semaines avant sa mort.
L'avocate générale Claire Vuillet a appelé les jurés à la reconnaître coupable de ces deux actes de violence volontaire et à la condamner à 12 ans de prison ainsi qu'à une interdiction définitive d'exercer toute profession en contact avec des mineurs.
L'accusée, âgée de 44 ans et au casier judiciaire vierge, encourt jusqu'à 30 ans de réclusion criminelle. Elle a comparu libre après plus de dix ans d'instruction ponctuée par de nombreuses expertises et compléments d'expertises.
Secousses "très violentes"
A la barre sa belle-sœur, l'ancienne enseignante de son fils, son neveu et le patron de son mari l'ont unanimement décrite comme une personne douce et bienveillante, qui ne se mettait jamais en colère. "Sa personnalité rend invraisemblable la commission de violences volontaires", a déclaré son avocate, Charlotte Barby, plaidant l'acquittement.
Si l'ancienne nourrice a reconnu avoir secoué Hugo, les gestes qu'elle a décrits et mimés lors d'une reconstitution ne sont pas compatibles avec les graves lésions constatées chez l'enfant, dont une hémorragie rétinienne, ont souligné des experts entendus par la cour.
Pour entraîner le décès, ces secousses devaient être "très violentes", au moins 7 sur une échelle de violence allant de 1 à 10, a décrit le professeur Jean-Sébastien Raul, médecin légiste qui a autopsié le nourrisson.
"L'accusée ne nous a toujours pas dit ce qui s'est réellement passé", a regretté Pascal Créhange, l'avocat des parents de Hugo. L'ancienne nourrice avait changé de version deux mois après les faits, affirmant qu'elle avait eu un malaise le matin du drame et que le bébé avait pu se cogner la tête contre un mur. Mais les experts ont écarté toute cause accidentelle du décès.
Depuis le drame, cette mère de deux enfants a cessé de garder des enfants: son agrément, accordé en 2012 lui a été retiré après la mort de Hugo. Elle a entamé une reconversion et s'est formée récemment pour être assistante dentaire. De leur côté, les parents de Hugo ont eu deux autres fils. "On les a gardés nous-mêmes", a confié le père, sa compagne reconnaissant qu'elle ne "fait plus confiance à personne".