Le procès de cinq légionnaires, quatre Russes et un Ouzbek, poursuivis pour leur rôle dans un vaste réseau international de proxénétisme et de traite d'êtres humains, s'est ouvert lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille. Les trentenaires, qui ont désormais tous quitté la Légion étrangère, à l'exception de l'un d'entre eux, dont le contrat s'achèvera en juillet, sont accusés d'avoir monté un réseau de prostitution dans une quarantaine de villes moyennes à travers la France, en exploitant plusieurs dizaines de jeunes femmes venues d'Ukraine et de Russie, entre 2019 et 2021.
Les cinq hommes avaient tous eu des parcours sans incident dans la Légion, qui leur avait délivré de nombreuses médailles après des opérations extérieures, au Mali notamment, et des certificats de bonne conduite. Une seule femme les accompagne sur le banc des prévenus, une jeune Ukrainienne, ex-compagne d'un des légionnaires. Elle était elle-même venue en France en 2018 pour se prostituer, dans le but d'aider sa mère malade à régler des frais médicaux.
"Je ne fais rien, l'organisation fait tout"
L'enquête avait débuté en novembre 2020 par l'interpellation à la gare de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) d'une jeune Ukrainienne en possession de 10.770 euros et de nombreux préservatifs. Les lignes téléphoniques utilisées pour prendre contact avec les jeunes femmes, à La Rochelle, Brest, Strasbourg, Bayonne, Antibes ou encore Fréjus, entre autres, étaient géolocalisées à Nîmes. Certains titulaires de ces lignes avaient pour adresse la caserne du 2e régiment étranger d'infanterie, basé dans cette ville.
Face aux enquêteurs, les prostituées ont évoqué "une organisation" avec laquelle elles auraient pris contact via des groupes de discussion sur Telegram. La structure prenait tout en charge : billet d'avion jusqu'à Paris, taxis, billets de trains en vue d'une installation dans des villes moyennes, dans des appartements loués via des plateformes, et publication de leur annonce sur les sites.
"Je ne fais rien, l'organisation fait tout", a ainsi expliqué Nina, qui avait déjà travaillé au Danemark ou à Dubaï. Organisateurs présumés de ce réseau de prostitution, les prévenus se chargeaient de la prise de rendez-vous, jouant le rôle de standardiste. Puis le client recevait une confirmation de rendez-vous avec l'adresse et le code de l'immeuble. La seule personne de l'organisation que les prostituées rencontraient régulièrement était le collecteur, qui récupérait 50% de leurs gains.
Au premier jour du procès, prévu pour durer jusqu'à vendredi, les prévenus ont d'abord expliqué leur engagement dans la Légion, qui leur aurait valu d'être "considérés comme des traîtres par le gouvernement russe". L'un d'eux a pointé son désaccord "avec monsieur Poutine" et avec la corruption, quand "il faut donner une partie de son salaire pour la police".