Mariam Abou Daqqa, militante du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), en visite en France pour des conférences, a été assignée à résidence dans les Bouches-du-Rhône lundi avant une possible expulsion, qu'elle contestera en justice pour "faire valoir" ses "droits". Le FPLP est une organisation qualifiée de terroriste par l'Union européenne. "Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive : j'ai un visa valide. Je ne suis pas une terroriste, mais une activiste de gauche qui ne vient (en France) que pour parler des droits des femmes et des Palestiniens. Je pensais que nous étions en démocratie ici", a-t-elle déclaré lundi à sa sortie d'un commissariat du centre de Marseille où elle doit se présenter quotidiennement.
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Membre du bureau politique du FPLP à Gaza
Interrogé par l'AFP, le ministère de l'Intérieur a indiqué que la militante était "membre du bureau politique du FPLP à Gaza" et que "le contexte actuel (programme de 15 conférences en France) est susceptible de constituer un trouble à l'ordre public qu'il s'agit de prévenir". Plusieurs conférences, lors desquelles devait intervenir Mariam Abou Daqqa, ont été interdites ces derniers jours par les autorités françaises, notamment à Lyon et à Martigues (Bouches-du-Rhône) et la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a décidé d'interdire la venue de cette militante dans l'Hémicycle le 9 novembre.
Dans son arrêté daté de dimanche et notifié à l'intéressée lundi, dont l'AFP a obtenu une copie, le ministère précise que Mariam Abou Daqqa disposait d'un visa délivré par les services consulaires français à Jérusalem en août, avant la flambée de violences entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas. Il indique que l'expulsion n'est pas applicable immédiatement car "il est nécessaire de prévoir l'organisation matérielle du départ" de Mariam Abou Daqqa, compte tenu notamment du "document de voyage" qu'elle détient actuellement. En conséquence, elle est assignée à résidence dans les Bouches-du-Rhône 45 jours, jusqu'à la fin novembre, avec l'obligation de "se maintenir dans les locaux où elle réside à Marseille de 22h00 à 07h00 du matin" et de pointer tous les jours à 12h30 au commissariat, détaille encore l'arrêté.
"Je n'aimerais pas rester en France dans ces conditions, mais si je peux faire valoir mes droits, j'attendrai" que la justice se prononce, a estimé cette militante de 72 ans qui a affirmé que 29 membres de sa famille étaient "décédés sous les bombes israéliennes à Gaza" ces derniers jours.
"Parler aux deux côtés"
Mariam Abou Daqqa, dont la venue était prévue depuis de longs mois à l'occasion de conférences sur le conflit israélo-palestinien dans plusieurs villes françaises, disposait d'un visa de 50 jours. Elle est arrivée en France fin septembre. "Nous ne demandons que le respect du droit international qui n'est pas respecté par Israël depuis 75 ans", a indiqué cette militante en référence à l'occupation israélienne des territoires palestiniens.
À sa sortie du commissariat, Mariam Abou Daqqa était accompagnée de Pierre Stambul, porte-parole de l'Union juive française pour la paix (UJFP), selon qui "l'arrêté d'expulsion est une décision illégale, car on ne peut pas expulser quelqu'un vers un pays en guerre". "La France trahit la position qu'elle avait depuis toujours, à savoir parler avec les deux côtés", a-t-il poursuivi. "On est contre toutes les victimes civiles", a ajouté le porte-parole de cette association juive laïque et antisioniste.
"Catastrophe humanitaire"
Plus de 1.400 personnes, pour la plupart des civils, ont été tuées lors d'une attaque d'une ampleur sans précédent lancée par des commandos du Hamas en Israël le 7 octobre. Les bombardements israéliens qui ont suivi sur la bande de Gaza, territoire surpeuplé et sous blocus depuis des années, ont tué au moins 2.750 personnes, en majorité des civils palestiniens, selon les autorités locales. L'enclave est menacée d'une "catastrophe humanitaire", selon l'Organisation mondiale de la Santé.
Neuf personnes, dont une membre de l'UJFP, arrêtées après avoir participé dimanche à Marseille à un regroupement interdit par le ministère de l'Intérieur pour la défense des civils palestiniens, ont été libérées après 24 heures de garde à vue. Certaines ont reçu une convocation pour le 13 novembre "aux fins de notification d'un avertissement pénal probatoire", selon un document consulté par l'AFP. "Le profil des personnes arrêtées est pacifiste, il y a des gens de toutes confessions qui sont sensibles au sort des civils. Je suis étonné par la longueur de la garde à vue", a déclaré à l'AFP l'avocat Valentin Loret qui, avec son confrère Emmanuel Docteur, défend six des interpellés.