Une universitaire et conseillère municipale de Dunkerque, dans le Nord, a été mise en examen pour l'"assassinat" de son époux, professeur d'université, qu'elle a avoué avoir poignardé après avoir tenté de faire croire à un cambriolage, a annoncé vendredi la procureure de Dunkerque. Justine Jotham, née en 1986, a été placée en détention provisoire, a précisé la procureure Charlotte Huet lors d'une conférence de presse. Lors de sa garde à vue, entamée mercredi, elle "a reconnu avoir porté des coups de couteau à son mari" Patrice Charlemagne, 51 ans, selon la magistrate.
La mise en cause "a bien évidemment donné une explication à son geste", "elle a participé à l'enquête et a livré, je pense, tout ce qu'elle avait à livrer à cet instant", a poursuivi la procureure selon laquelle "il n'y a pas de raison de penser que son discernement était altéré". "S'agissant du mobile, nous avons de premiers éléments aujourd'hui" qui "restent à explorer", a-t-elle ajouté sans plus de détails. Elle a précisé qu'aucune "plainte ou main courante dans la sphère conjugale" n'était parvenue au parquet.
>> LIRE AUSSI - L'épouse du professeur tué près de Dunkerque avoue l'homicide
La thèse du cambriolage rapidement écartée au vu des "incohérences"
Docteure et maître de conférences en littérature, la suspecte est enseignante chercheuse à l'Université du Littoral Côte d'Opale où enseignait également le défunt, professeur agrégé d'allemand et de néerlandais. Élue en 2020 sur la liste du maire de Dunkerque Patrice Vergriete - désormais ministre du Logement - elle est également auteure jeunesse et dirigeait une association culturelle de promotion de la lecture. Elle avait alerté la police à 04H00 lundi en affirmant que le couple avait été réveillé par des cambrioleurs et qu'elle avait quitté les lieux avec sa fillette de 20 mois, tandis que l'homme était resté dans le pavillon.
Le quinquagénaire avait été retrouvé dans une chambre au premier étage du domicile conjugal de Rosendaël, en périphérie de Dunkerque, frappé de plusieurs coups de couteau. Deux couteaux ensanglantés, une paire de gants, une lampe torche et un ordinateur portable avaient été saisis à proximité du domicile, selon une source policière. Une enquête pour homicide volontaire avait été ouverte lundi, confiée à la police judiciaire.
"En cours d'exploration" dans un premier temps, selon la procureure, la thèse du cambriolage avait été rapidement écartée, au vu des "incohérences" révélées par "les constations techniques et scientifiques sur la scène du crime, tout autant que les examens médico-judiciaires" sur la victime et son épouse.
Une "immense émotion" à Dunkerque
Au cours de sa garde à vue, elle a été confrontée à plusieurs éléments matériels suspects, selon une source proche de l'enquête. Notamment "une entaille sur sa main gauche, qui correspondait à celle d'un gant retrouvé sur place" et "l'analyse des smartphones qui laissait supposer des tensions dans le couple", ainsi que "des incohérences dans le récit des faits", a indiqué cette source à l'AFP. Sur sa page Facebook, Justine Jotham affichait en janvier 2022 une image de bonheur familial après la naissance de leur fillette, par PMA.
>> LIRE AUSSI - Les élèves du professeur d'université tué à Dunkerque sont sous le choc après les aveux de son épouse
L'enfant a été hospitalisée et le parquet va s'employer à préparer sa prise en charge "dans le milieu familial pour qu'il y ait une forme de continuité affective", a indiqué Mme Huet. La mort de l'enseignant, très investi dans la vie locale, avait suscité une pluie d'hommages et de condoléances sur les réseaux sociaux. "Notre ville a été touchée cette nuit par un terrible drame qui a coûté la vie à un Dunkerquois", avait notamment réagi lundi sur Facebook Patrice Vergriete, faisant part de son "immense émotion".
En poste depuis 1999 à l'Université du littoral, la victime enseignait dans le département techniques de commercialisation de l'IUT, qu'il avait un temps dirigé, et siégeait au conseil administratif, a indiqué l'université. "On a tous été bouleversés", avait réagi jeudi un vice-président de l'Ulco, Carl Vetters, indiquant qu'une cellule psychologique avait été mise en place sur le campus.