Noël approche et les éditeurs de jeux vidéo sortent les uns après les autres les nouveaux opus de leurs franchises phares : FIFA, PES, NBA2K, Battlefield, Call of Duty, Final Fantasy… Tous les mastodontes seront jouables à la Paris Games Week, qui s’ouvre jeudi… sauf un : Assassin’s Creed. Pour la première fois depuis 2009, Ubisoft ne propose pas de nouvel épisode annuel de son jeu d’aventure/infiltration. A l’exception d’un écart de deux ans entre le premier et le second, il est en effet sorti un Assassin’s Creed par an pendant sept ans. Mais pas cette année.
"Prendre le temps de créer une expérience fantastique". L’annonce a été faite en février dernier : le prochain épisode de la série sortira en 2017. Assassin’s Creed Empire aura pour cadre l’Egypte Antique, une période réclamée à cor et à cri par les fans. Dans un entretien au site spécialisé Gamespot, Yves Guillemot, le PDG d’Ubisoft, a justifié ce saut d’un an : "On a vu avec le développement du prochain Assassin's Creed qu'il y avait une opportunité de le porter à un tout autre niveau. Alors on a décidé de prendre le temps de créer une expérience fantastique". Derrière la communication de l’entreprise se cache une réalité plus terre-à-terre : les deux derniers jeux se sont révélés pour le moins décevants, tant la franchise avait établi des standards élevés.
Deux derniers épisodes moyens. Mais après des années de succès publics et critiques, Unity (2014) et Syndicate (2015) n’ont pas été à la hauteur. Le premier a été vivement critiqué, à juste titre, à sa sortie : le jeu était truffé de bugs graphiques (visages difformes, personnages qui apparaissent subitement), comme s’il n’était pas totalement fini (mésaventure qui a contraint Ubisoft à offrir un DLC, bonus d’ordinaire payant, à tous les joueurs en guise d’excuses). Quant au second, situé dans le Londres de l’époque victorienne, il n’a tout simplement pas séduit les joueurs, lassés de voir sans arrêt revenir les mêmes problèmes : histoire bâclée, combats décevants, nouvelles fonctionnalités peu intéressantes.
Développement accéléré. Comment expliquer cette baisse qualitative ? Le développement des jeux en monde ouvert, avec des graphiques soignés, demande beaucoup de temps, environ quatre ans. Même si Ubisoft dispose de plusieurs équipes pour faire tourner la production des jeux, le rythme d’un jeu par an a tout de même fini par impacter leur créativité et leur justesse technique. Ces déceptions se sont traduites par une érosion des ventes : avec 4,7 millions d’exemplaires vendus dans le monde, Syndicate affiche le pire score de la saga, et Unity le troisième plus mauvais (7,1 millions). Pour enrayer la chute, Ubisoft a donc choisi de ralentir le tempo et de se passer des sorties annuelles.
De la place pour Watch Dogs. Reporter la sortie de sa licence phare, le pari peut sembler risquer pour Ubisoft. Mais l’éditeur sait ce qu’il fait. S’il se permet ce temps de développement plus long, c’est parce qu’il a un autre atout dans sa manche. En l’occurrence Watch Dogs, nouvelle série de jeux prenant pour héros des hackers. Le premier épisode, sorti en 2014, reprenait les recettes de son grand frère (monde ouvert, mix d’aventure et d’inflitration) et les modernisait en centrant le jeu sur les nouvelles technologies et la ville moderne de Chicago.
Alterner les licences. En zappant Assassin’s Creed cette année, Ubisoft espère doper les ventes de Watch Dogs : sans « rivalité » interne, l’éditeur peut mettre le paquet sur la promotion du second épisode de Watch Dogs qui sort le 15 novembre. Une façon de pousser cette jeune licence, si d’aventure la poule aux œufs d’or Assassin’s Creed devait bientôt s’éteindre. Dans l’attente d’une telle éventualité, Ubisoft espère bien conserver ses deux franchises lucratives le plus longtemps possible avec une stratégie d’alternance : Watch Dogs les années paires et Assassin’s Creed les années impaires. Ainsi, chaque jeu bénéficiera d’un temps de développement rallongé qui devrait se traduire, en théorie, par des opus de grande qualité.
Assassins's Creed : de la console au grand écran
Le premier jeu Assassin’s Creed est sorti en 2007, suivi par huit autres épisodes principaux et neuf secondaires. Le joueur incarne à chaque fois un membre de la confrérie des Assassins et prend part à la lutte historique qui l’oppose aux Templiers. Plus que ses histoires répétitives, la force du jeu réside dans la reconstitution minutieuse des différentes périodes historiques visitées, depuis la Terre Sainte au Moyen-Âge jusqu’à la révolution industrielle à Londres en passant par la Renaissance italienne et les révolutions américaines et françaises.
Alliant aventure et séquences d’infiltration, la saga s’est progressivement imposée comme une référence des jeux vidéo dans les années 2000-2010. L’épisode le plus populaire, Black Flag, s’est vendu à plus de 14 millions d’exemplaires dans le monde. Un succès qui ne pouvait échapper au cinéma : un film Assassin’s Creed, avec Michael Fassbender et Marion Cotillard, sortira en salles le 21 décembre.