80 ans et pas une ride ! Batman, l'un des super-héros les plus populaires depuis sa création en 1939, est célébré dans le monde entier samedi pour le "Batman day". À Paris, un masque géant orne l'entrée des Galeries Lafayette sur les Champs-Élysées, où un stand dédié est installé jusqu'à dimanche. En revanche, les "gilets jaunes" ont eu raison du super-héros puisque le "Bat-signal" qui devait être projeté sur la façade du bâtiment samedi soir a été annulé pour des raisons de sécurité.
Alors Batman, on le connaît surtout grâce aux films de Tim Burton, Joel Schumacher et Christopher Nolan. Sauf que les meilleures histoires du Chevalier Noir n'ont pas été racontées sur le grand écran mais dans les petites cases des comics, les BD américaines. Un genre pas évident pour les néophytes tant les super-héros sont réinventés en permanence, sans la moindre numérotation des aventures. Pour vous aider à vous y retrouver, nous avons sélectionné les trois comics de Batman indispensables, à lire dans l'ordre de préférence.
Année Un, là où tout a (re)commencé
Année Un, c’est la BD idéale pour entrer dans l'univers de Batman puisqu’elle raconte ses débuts. En 1986, alors que les comics se vendent moins, DC Comics, l'éditeur de Batman, décide de repartir de zéro et confie la tâche de réécrire l'histoire du Chevalier Noir à Frank Miller, un jeune auteur en vogue à l'époque. Sauf que lui trouve l'histoire originale, celle de Bob Kane et Bill Finger, parfaite ! Il va donc se contenter de l'enrichir et la noircir un peu, pour donner cette image de héros tourmenté qui reste encore aujourd'hui celle qui prévaut au cinéma et dans l'imaginaire collectif.
L'histoire de Batman dans Année Un, c'est d'abord celle de Bruce Wayne, fils du milliardaire Thomas Wayne et de sa femme Martha. Un jour, en sortant d'un cinéma, le couple est abattu par un voleur. Bruce, qui n'a que 8 ans, assiste impuissant au meurtre de ses parents. L’orphelin hérite de la fortune familiale, colossale, mais grandit hanté par ce crime. À sa majorité, il s’exile pour endurcir son corps et son esprit. Il apprend à se battre. Son but : lutter contre le crime qui gangrène la ville de Gotham. Pour inspirer la peur à ses ennemis, il se fabrique un costume high-tech inspiré par les chauves-souris. Ainsi naît le Batman…
Si Année Un reste un classique, c'est parce que Frank Miller s’intéresse plus aux failles de Batman qu’à ses forces. On voit un super-héros qui tâtonne, qui s’interroge sur la violence de ses actes. Cela peut paraître étonnant vu son image de justicier solitaire mais Batman ne tue jamais personne. Il amoche volontiers les malfrats mais il se retient toujours au dernier moment, y compris face aux pires psychopathes. Ces doutes, on les observe dans Année Un à travers les yeux de Jim Gordon, un jeune policier intègre et idéaliste. D'abord hostile à Batman, il finira par devenir son allié le plus précieux.
Et puis Année Un, c’est surtout une excellente BD, avec une histoire efficace, racontée en à peine 100 pages. Les dessins de David Mazzuchelli ont apporté à l'époque une touche de modernité. Il s'est beaucoup inspiré des peintures urbaines d’Edward Hopper (Nighthawks notamment) pour livrer une vision sombre de Gotham et de son héros. Bref, Année Un, c’est un incontournable.
Silence, 200% Batman
Maintenant que vous êtes familier des ruelles sombres de Gotham et de la quête de justice du Chevalier Noir, on va s’attaquer à une histoire plus conséquente, celle de Silence. Batman est un super-héros, mais c’est avant tout un détective. Et là, on a une enquête passionnante, qui nous tient en haleine sur 300 pages ! Sorti en 2002, Silence est un "comic-somme", qui contient à lui seul toute la dramaturgie du personnage.
On retrouve un Batman plus expérimenté, qui s’est fait de nombreux ennemis au fil des ans : Killer Croc, Poison Ivy, L’Épouvantail, Harley Quinn, et le plus connu de tous, le Joker. Les uns après les autres, ils resurgissent pour le défier. Mais dans l’ombre, un homme tire les ficelles et vise Bruce Wayne. Bousculé comme rarement, Batman va devoir faire appel à ses alliés - Robin, Jim Gordon, Catwoman, Superman - pour résoudre ce mystère très personnel.
Le scénario de Silence, signé Jeph Loeb, est hyper bien ficelé, avec des coups de théâtre, beaucoup d’action mais aussi des moments très émouvants. Et c’est sublimé par les dessins de Jim Lee. C’est riche, coloré, extrêmement détaillé. Juste magnifique ! Reste que Silence n’a jamais été adapté en films et c’est bien dommage. Un film d'animation qui vient de sortir permet de combler un peu ce vide.
The Dark Knight Returns, le dernier tour de Batmobile
The Dark Knight Returns, c’est LE sommet de l’œuvre de Frank Miller. C'est ce comic, paru début 1986, qui a convaincu DC de laisser cet auteur même pas trentenaire reprendre le héros depuis le début dans Année Un. Mais cette fois, Miller raconte la dernière enquête de Batman. Bruce Wayne a désormais 55 ans. Son corps est brisé. Surtout, il a remisé le costume de Batman au placard depuis 10 ans, traumatisé par la mort de son acolyte Robin, tué par le Joker. Batman au bout du rouleau, un postulat de départ étonnant qui a pourtant largement inspiré Christopher Nolan pour The Dark Knight Rises, le troisième film de sa trilogie sur Batman.
The Dark Knight Returns s’ouvre donc avec ce Batman à la retraite. Mais en son absence, les criminels ont prospéré. Les "mutants", un gang de dégénérés, met Gotham à feu et à sang. Plus pour se sauver lui-même que pour sauver sa ville, l’homme chauve-souris va devoir sortir de sa Bat-cave une dernière fois. Une ultime mission qui le mettra finalement aux prises avec son ennemi de toujours, le Joker, mais aussi son vieil ami Superman (qui, lui, ne vieillit pas).
Ce comic, que Frank Miller a écrit et dessiné seul, offre aux fans l’histoire de Batman la mieux écrite. On est pris aux tripes par cette version très noire du super-héros, désabusé, abîmé par le temps mais toujours debout. C’est là qu’on voit à quel point Batman est un personnage à part, à la fois monolithique comme symbole de la justice et terriblement faillible comme être humain. Et c’est cette dualité qui fait que 80 ans après, Batman reste le super-héros le plus passionnant.