Stéphane Bern propose chaque jour, dans Historiquement vôtre avec Matthieu Noël, de partir à la découverte de ces expressions que l'on utilise au quotidien sans forcément connaître leur origine. Mercredi, l'animateur nous explique les racines piscivores et moyen-âgeuses de l'expression "être poissard".
Il y a des jours où tout semble se goupiller de guingois, et il y en a d'autres où, au contraire, tout roule comme sur des roulettes. Si vous appartenez à ceux pour qui tout va de travers, il y a peut-être une explication, vous avez la poisse ! Avoir la poisse, c'est jouer de malchance. Sauf qu'au 18e siècle, un poissard ou une poissarde est une personne vulgaire et ayant des mœurs attribués au bas peuple. Cela vient de la marchande de poisson, qui, en plus de ne pas avoir des manières très distinguées, pouvait aussi chercher à vous arnaquer quant à la qualité des produits proposés et aux montants des transactions commerçantes.
Mauvaise patte et pied froid
Mais le poissard, c'est celui qui a, au sens propre, les mains enduites de poix, une sorte d'enduit faite de résine de pin, de sapin ou de goudron de bois. Cette matière est particulièrement collante. Elle donne, au 16e siècle, le verbe poisser. Il est difficile de s'en débarrasser, tout comme la malchance qui parfois '’acharne.
Au Moyen-Âge, on ne d'ailleurs jetait pas d'huile bouillante sur les assaillants, car l'huile était trop précieuse. On le faisait avec cette poix qui non seulement brûlait, mais qui en plus empêchait toute progression. En Espagne, on ne dit pas "avoir la poisse", mais "tener mala pata", soit "avoir mauvaise patte". Au Brésil, c'est "ser pé friod". Cela signifie "avoir le pied froid". Retour en France : on dit aussi "avoir la guigne". La guigne, c'est guigner, loucher. Cela revient à attirer le mauvais œil. Pour être complet, n'oubliez pas : "Avoir de la chance, c'est naître dans une famille riche. Et fils unique." Un bon mot de l'écrivaine québécoise Alice Parizeau.