François Mallet pour son spectacle «Heureux soient les fêlés» : «Je n’ai pas peur de parler de ma bipolarité»
François Mallet se produit tous les mardis soirs sur la scène du Métropole, à Paris, dans "Heureux soient les fêlés" un seul-en-scène drôle, sensible et lumineux où il est question de patinage, de bipolarité et d'homosexualité. Pour Europe1.fr, l'humoriste se confie sur son parcours atypique et les dessous de la création de son spectacle. Interview.
Son seul-en-scène ne vous laissera pas de marbre. Tous les mardis soirs, l'humoriste François Mallet touche un plein cœur le public de la petite salle du Métropole, à Paris, avec Heureux soient les fêlés, un vrai petit bijou mêlant confidences bouleversantes, blagues bien senties et jolies chorégraphies.
Vous avez été patineur artistique puis vous vous êtes tourné vers des études de journalisme avant de faire de l'humour. Qu'est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans le monde du spectacle ?
J'ai eu un déclic après avoir vu la pièce de café-théâtre Bienvenue dans la coloc, à Lyon. Les cinq jeunes comédiens s’éclataient sur scène. À ce moment-là, je sortais d'une période compliquée. On venait de me me diagnostiquer une cyclothymie, c’est-à-dire une forme de bipolarité, et j'avais fini mes études en journalisme mais je n’avais plus du tout envie de devenir journaliste. Grâce à cette pièce, je me suis rendu compte que je voulais faire rire. J'ai donc commencé à prendre des ateliers de comédie du soir à Lyon tout en continuant mon travail d’animateur d’évènements d’entreprise parce qu’il fallait bien vivre !
Comment vous êtes-vous lancé dans l'écriture de votre spectacle ?
Je me suis mis à écrire à la fin de mon hospitalisation. Tout ce que je voyais en atelier était tellement gros qu'il fallait que je le note dans un cahier pour m'en souvenir. J'ai d'ailleurs commencé par écrire sur Nathalie, l'art thérapeute qui fait partie de mon seul-en-scène. A l'époque, je ne savais pas ce que j'allais faire de toute cette matière mais je sentais qu'il y avait quelque chose de très drôle dans ce que j'avais vécu à la clinique.
Vous parlez ouvertement de votre bipolarité et de vos séances chez le psy. Cette mise à nu a-t-elle été difficile ?
Pas tant que ça. Je pense que mon passé de patineur m’a beaucoup aidé. Très jeune, j’ai été exposé au regard des autres. En compétition, ton corps est jugé, ta performance est notée... Ça te prépare à affronter le regard du public. Quand je suis monté sur scène pour la première fois, j’avais plus peur de louper une phrase ou de rater un passage que de parler de la santé mentale.. Je n'ai pas peur de parler de ma bipolarité.
Craigniez-vous les réactions du public ?
Non, je ne me suis jamais dit que c’était risqué ou que ça ferait peur aux gens. L'essentiel est de savoir comment parler de ce sujet-là de manière intelligente et sensible pour que le public soit touché.
Ce spectacle a-t-il été cathartique pour vous ?
La parole est libératrice, que ce soit en thérapie, avec des proches, ou sur scène. Parler de soi, surtout de manière positive, en montrant qu’on a traversé des épreuves difficiles mais qu’on les a surmontées, c’est forcément quelque chose de constructif. Il y a sûrement une dimension cathartique dans cette démarche, mais pour moi, le spectacle reste avant tout un objet artistique. Ma vie personnelle continue en dehors de ce que je raconte sur scène. Ce qui me touche le plus, c’est de voir que raconter mon parcours peut semer une graine chez les autres, les aider à voir les pathologies psychiques différemment et à mieux s’accepter.
Vous parlez également de votre homosexualité dans votre spectacle. C'était une évidence ?
Je ne me suis pas posé de questions. Le thème est venu naturellement sous des angles qui me ressemblent comme celui d’être gay et beauf en même temps. En revanche, voulais éviter à tout prix d’être dans quelque chose de stéréotypé. D’ailleurs, je désamorce ça dès le début du spectacle en disant que non, le patinage n’est pas uniquement un sport d’hommes homosexuels. C’est important de déconstruire ces idées reçues avec humour et intelligence.