"Je ne sais pas si j'ai bien fait" de laisser publier les lettres d'amour de François Mitterrand, confie Anne Pingeot, interrogée sur France Culture par l'historien Jean-Noël Jeannenay. Pour la première fois, la discrète Anne Pingeot s'explique sur la publication de la correspondance que l'ancien président a entretenue avec elle (Lettres à Anne 1962-1995 et Journal pour Anne 1964-1970, qui viennent de sortir chez Gallimard). Elle revient aussi, "avec pudeur mais sans tabou", sur sa longue et clandestine histoire d'amour avec François Mitterrand. Au total, c'est une conversation de deux heures trente qui sera diffusée à 20h sur France Culture, de lundi à vendredi, à raison de trente minutes par jour. Le 1er épisode sera mis en ligne à 8h lundi sur le site de la radio.
"Une façon assez étonnante de revivre toute ma vie". Au départ, explique celle qui fut conservatrice au musée d'Orsay, l'Institut François-Mitterrand lui avait demandé, "il y a deux ou trois ans", si elle avait des lettres de l'ex-chef d'État en vue de la célébration, en 2016, du centenaire de sa naissance. Elle a alors rouvert "une correspondance qui a commencé il y a plus d'un demi-siècle". "Et puis je l'ai transcrite, ce qui était à la fois une épreuve et une façon assez étonnante de revivre toute ma vie", raconte Anne Pingeot. Si, finalement, elle a pris la décision de laisser publier ces plus de 1.200 lettres et le Carnet, c'est parce que Jean-Noël Jeannenay (membre de l'Institut François-Mitterrand) l'a convaincue de le faire. Mais Anne Pingeot avoue aussi qu'elle tenait à que ces lettres soient publiées de son vivant.
"J'ai accepté au fond l'inacceptable". Concernant sa relation avec François Mitterrand, marié et père de famille au moment de leur rencontre (en 1962) et qui ne se séparera jamais de son épouse, Anne Pingeot, de 27 ans la cadette de l'homme d'État, rappelle le poids des traditions et des familles bourgeoises de l'époque. "Je crois que ça a compté beaucoup parce que, on comprenait très bien cette trame de devoir, cette trame de limite aussi que lui a dépassée mais qu'il m'a aidée aussi à dépasser." "Que n'ai-je entendu, par exemple, sur la vision de la femme... la femme est quelqu'un qui doit être soumis, qui ne doit avoir aucune vie intellectuelle". "Ce côté de soumission a fait que j'ai accepté au fond l'inacceptable", souligne-t-elle.