"Jacqueline Sauvage, c'est moi", a clamé Muriel Robin devant Yves Rénier pour décrocher le rôle titre de Jacqueline Sauvage : c'était lui ou moi. Le téléfilm sera diffusé lundi en prime time sur TF1. Son actrice principale et son réalisateur étaient les invités de l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, dimanche, pour relater ce tournage qu'ils ont considéré comme très éprouvant.
"Jacqueline Sauvage, c'est une marque". Le film retrace l'histoire de Jacqueline Sauvage, cette femme condamnée en première instance comme en appel, en 2015, à dix ans de prison pour avoir tué son mari de trois coups de fusil dans le dos après 47 ans de violences conjugales, puis qui a été graciée par François Hollande. L'affaire a eu un énorme retentissement. "Jacqueline Sauvage, c’est une marque, tout le monde la connaît. Les gens savent", assène Yves Rénier.
Muriel Robin avait pris sa défense. Très concernée par l'affaire avant même de l'interpréter, Muriel Robin avait même écrit au président de la République pour prendre la défense de l'ancienne accusée. Un geste "qui a fait la différence dans la décision de Jacqueline Sauvage de nous donner les droits", souligne l'actrice, qui a passé du temps avec cette femme pour appréhender son rôle.
"J’ai vu en vrai quelqu’un qui s’est fait taper pendant toutes ces années et qui redécouvre la vie." Elle a aussi rencontré une taiseuse. "Ça a joué contre elle, elle ne parlait pas beaucoup Jacqueline. C’est dans le scénario. Je trouve que ce sont les plus beaux rôles, tu n’as pas de mots", décrit l'actrice qui s'est voûtée, usée, vieillie, a porté perruque et mis du maquillage pour l'incarner au plus près.
"Certaines vivent ça en vrai, tous les jours". La transformation physique était cependant moindre face à la portée psychologique du téléfilm. Les scènes de violences conjugales ont marqué les deux artistes. "En faux, c’était terrible. Et on avait tous inconsciemment dans la tête que certaines femmes vivent ça en vrai, tous les jours. Ce n’est pas un tournage sur lequel on peut rigoler", résume Muriel Robin.
"Il y avait une espèce de chape de plomb", ajoute le réalisateur. Tous deux ont pris parti : pour eux, Jacqueline Sauvage a agi en situation de légitime défense. Le titre choisi pour le téléfilm (C'était lui ou moi) en témoigne. Le réalisateur commente d'ailleurs la décision des jurés d'appel (dix ans de prison) : "Ils n’ont pas entendu du tout le passé de Jacqueline Sauvage. Et je pense qu’en plus, ils ne l’ont pas crue." Un verdict qui peut s'expliquer selon lui parce que Jacqueline Sauvage n'a pas porté plainte. "Il y a une dimension dans cette histoire, c’est que c’est une histoire d’amour. Elle est amoureuse de ce mec, raide dingue amoureuse. Si elle ne porte plainte, c’est qu’elle ne veut pas risquer de détruire cet amour qui existe entre eux", explique-t-il.
"Il faut changer la loi". Muriel Robin renchérit : "La femme peut tout à fait être tapée, ne pas porter plainte, ne pas voir le temps passer. Elle veut sauver l’homme. Au départ, elle le disait Jacqueline, elle avait mal pour lui et elle pensait que tous les hommes faisaient ça parce qu’elle avait vu son père battre sa mère." Les deux artistes vont au-delà de la compréhension : ils demandent un changement législatif. Aujourd'hui, la légitime défense nécessite, selon les textes, une riposte simultanée et proportionnée. "Il faut changer la loi pour ce cas-là. Pour ce problème-là. C’est de la légitime défense. Ça ne se discute même pas", martèle la comédienne, soutenue par son réalisateur. "Tant que cette loi n’évoluera pas, les femmes continueront à mourir tous les trois jours", conclut-il.