Plus d'un millier de professionnels du monde de la culture ont manifesté, mardi, contre la décision de prolonger la fermeture des lieux culturels pour cause de Covid-19, dénonçant le "mépris" du gouvernement à leur égard. À l'appel de la CGT-spectacle, les manifestants se sont rassemblés pendant plusieurs heures sur la place de la Bastille à Paris. "Déconfinons la culture!", ont-ils scandé sur la place noire de monde.
Prêts à rouvrir le 15 décembre comme espéré lors de l'annonce du deuxième confinement fin octobre, cinémas, théâtres et musées ont vu leurs espoirs déçus lorsque le Premier ministre, Jean Castex, a annoncé que, face à la pression épidémique persistante, ils devraient rester fermés encore jusqu'au 7 janvier au moins.
Un recours au Conseil d'État lancé
Syndicats et artistes ont annoncé saisir le Conseil d'État via un "référé liberté", une procédure d'urgence, comme ont pu le faire ces dernières semaines les professionnels de la restauration, ou bien le secteur du ski. "On va mourir et même pas sur scène", "Le spectacle rend vivant", "L'art est une arme de construction massive", "le Mépris doit rester un film" ou encore "le théâtre, un lieu de culte", peut-on lire sur les pancartes. "Ce qui me choque le plus, c'est le deux poids deux mesures avec d'un côté les commerces et les églises qui rouvrent et de l'autre les lieux culturels qui sont pointés du doigt et privés de vivre de leur travail. C'est révoltant", explique à l'AFP Ulysse, intermittent du spectacle de 28 ans.
La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, a reconnu mardi que "le monde de la culture souffr(ait)" mais a rappelé que les lieux culturels étaient fermés "partout en Europe" et "sur la base d'un nombre d'études scientifiques". Mais pour Martin, également intermittent de 27 ans, il s'agit "d'une mise à mort", précisant que "les théâtre sont frileux à nous faire travailler car les décisions politiques changent constamment".
"Une colère inouïe"
"On veut qu'on nous dise quand on va pouvoir rouvrir car on ne rouvre pas un théâtre d'un claquement de doigt. On a été très patient, maintenant il faut que tout ça s'arrête", a martelé l'acteur Christophe Alévêque, présent à Bastille. Lors d'un rassemblement à Clermont-Ferrand, Rémi Laroere, 32 ans, salarié du cinéma indépendant Le Rio, fustige le fait que c'est "toujours les mêmes qui vont en tirer profit comme Amazon ou les plateformes de streaming". "Au printemps, nous avons joué le jeu : la santé d'abord. Puis lors du deuxième confinement on nous a dit que nous n'étions pas essentiels, on est passé sur l'humiliation. Maintenant, nous n'avons aucune perspective", regrette Jean-Marc Grangier, directeur de la Comédie. À Strasbourg, sur la place Kleber, même inquiétude chez Vincent Welter, du cirque équestre Equinote qui n'a joué que huit fois cette année. Pour lui le secteur culturel aura "besoin d'un an ou deux pour s'en remettre".
Selon Daniel Muringer, artiste musicien, il y a "une colère inouïe" après les annonces de Jean Castex, assurant que "les gens ont besoin plus que jamais, après une année terrible sur le plan psychologique, de retrouver un minimum de sociabilité, notamment dans les salles de spectacle". Dans un entretien à l'hebdomadaire Le Point, l'adjointe à la Culture à la mairie de Paris, Carine Rolland, a appelé à "désembastiller la culture".