"Chaque moment, chaque expérience correspond à une manière différente de se voir", explique Hervé Le Tellier, évoquant les thèmes abordés dans son roman. "L'Anomalie" (Gallimard), fait partie des quatre oeuvres en compétition pour le prix Goncourt, dont le palmarès sera communiqué lundi.
Plusieurs personnages, pour différents regards portés sur soi
Selon Gallimard, l'éditeur du livre d'Hervé Le Tellier, L’Anomalie explore cette part de nous-mêmes qui nous échappe. En effet, avec cette histoire, ce qui l'intéressait, dit-il, "c'était de travailler sur deux sujets simultanément : la confrontation à soi et à ce qui est essentiel à nos vies, à travers l'idée de la nécessité de partager sa vie avec quelqu'un d'autre". Dans son oeuvre, Hervé Le Tellier fait intervenir plusieurs personnages, correspondant à autant de regards portés sur soi. "Ce rapport à soi est un rapport spécifique et j'avais besoin de beaucoup de personnages pour expliciter toutes les possibilités", précise-t-il, ajoutant que l'on ne se regarde pas de la même manière quand on est un enfant, et lorsqu'on est un adulte accompli, voire un vieillard.
Un "Matrix" inversé
Alors que son roman a maintes fois été comparé à Matrix, Hervé Le Tellier affirme que L'Anomalie porte justement une hypothèse contraire. "Dans Matrix, ce sont des êtres humains qui donnent de l'énergie aux machines, alors que dans le livre, c'est l'hypothèse assez ancienne de Nick Bostrom (un philosophe suédois, NDLR), que nous ne sommes pas tout à fait certains d'exister".
D'ailleurs, alors que le roman exploite une réalité dans laquelle Donald Trump est réélu à la présidence des États-Unis, Hervé Le Tellier explique que cela permet une relecture possible de la fin du livre. "On se dit qu'on est peut-être pas dans cette réalité-là, et qu'il y en a une autre possible."
Avec L'Anomalie, oeuvre pour laquelle il a puisé dans différents types de genres littéraires, s'inspirant d'auteurs qu'il a aimés comme Manchette, ou encore Chandler, Hervé Le Tellier, qui a également travaillé sur l'univers de la littérature blanche et de l'aphorisme, espère remporter lundi le prix Goncourt 2020. Un prix social et économique qui "joue un rôle de sacralisation de la lecture", dit-il. Un prix qui selon lui, fait toute la spécificité française en matière de prix littéraires.