La vente à perte de carburants sera autorisée à partir de "début décembre" et pour une durée de six mois, a annoncé ce lundi le ministre de l'Économie Bruno Le Maire. Une manière de faire face à la hausse du prix de l'essence, qui flirte avec les 2 euros le litre dans de nombreuses stations services. Pourtant, cette pratique est interdite depuis 1963. Mais pour quelles raisons ?
Que dit la loi ?
Tout d'abord, comme l'indique le site de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), "il est interdit de revendre ou d'annoncer la revente d’un produit en l’état au-dessous de son prix d'achat effectif, notion qui détermine le seuil de revente à perte".
Seules exceptions : lorsque les ventes sont forcées par "la cessation ou le changement d’une activité commerciale", lors des "fins de saisons", en cas "d'obsolescence technique ou de produits démodés", si le "réapprovisionnement est à la baisse", en cas d'"alignement sur un prix plus bas légalement pratiqué dans la même zone d'activité", lorsque les produits concernés sont "périssables et menacés d'altération rapide" ou pour les "produits soldés".
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En cas de non-respect de ces règles, les commerçants risquent une amende pouvant atteindre 375.000 euros. L'enseigne Intermarché en a d'ailleurs fait les frais, après avoir vendu des pots de Nutella à -70% en 2018, provoquant des scènes d'émeutes dans plusieurs magasins.
Pourquoi cette interdiction a été mise en place ?
La vente à perte est donc interdite depuis la loi du 2 juillet 1963. Les premiers hypermarchés arrivaient en France. Au départ, cela a été mis en place pour protéger les petits commerces de la concurrence des plus grandes enseignes.
L'objectif était d'éviter que les grandes enseignes, en vendant moins cher leurs produits, obligent les petits commerçants à faire de même, alors que ces derniers n'auraient pas les moyens de tenir sur le long terme.
Cela va-t-il changer quelque chose pour les automobilistes ?
A priori, même si les distributeurs revendent à perte, la baisse des prix des carburants ne devrait pas être énorme. Le prix du baril de Brent continue d'augmenter, et le gouvernement a affirmé qu'il ne baisserait pas les taxes sur l'essence. Bruno Le Maire s'est également opposé à une nouvelle ristourne de 10 ou 15 centimes sur le litre de carburant, prise en charge par l'État, comme cela avait été mis en place l'année dernière.
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Il faut donc s'attendre à une baisse de 1 ou 2 centimes à la pompe. "Un distributeur qui n'est pas un producteur, comme Total, a finalement très peu de marge là-dessus. On parle d'un ou deux centimes, selon les carburants, de marge. C'est une baisse qui est quand même assez faible et qui ne va pas être suffisante pour les automobilistes", explique à Europe 1 Fabrice Godefroy, expert mobilités et environnement pour l'association 40 millions d'automobilistes.
Impossible aussi de savoir quelles stations services accepteront de vendre à perte, d'autant qu'une telle mesure pourrait être difficile à mettre en place pour les pompistes indépendants. En attendant, TotalEnergies a annoncé poursuivre son opération de plafonnement du prix de l'essence à 1,99 euro "au-delà du 31 décembre 2023".