L'économiste Thomas Piketty a estimé lundi que, contrairement à l'engagement du président Emmanuel Macron de ne pas alourdir la fiscalité, une hausse d'impôts avait déjà eu lieu avec la prolongation d'un prélèvement destiné à rembourser la dette sociale. "Ce qui m'embête, c'est tous les non-dit. (Emmanuel Macron) nous dit, par exemple, 'je ne vais pas augmenter les impôts'. Sauf qu'en fait, on les a déjà augmentés", a martelé l'économiste sur France Inter.
L'absence de contradiction sur le CRDS est problématique
Thomas Piketty a pointé la récente prolongation sur presque dix ans de la perception de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). L'Assemblée nationale examine lundi un projet de loi qui tient en effet compte, suite à la crise du coronavirus, de l'ajout de 136 milliards d'euros de dettes au "trou de la Sécu", que les Français rembourseront ainsi jusqu'en 2033, soit neuf ans de plus que prévu.
"Le CRDS est un bout de CSG (contribution sociale généralisée) mais qui représente quand même 0,5 % prélevés chaque mois sur tous les salaires, des plus bas jusqu'aux plus hauts. Normalement, ça devait s'arrêter (en 2024), c’est-à-dire que tout le monde aurait eu une augmentation de salaires ou de pensions de retraite de 0,5 %", a expliqué Thomas Piketty. Or, "a été adopté le principe de le prolonger pendant dix ans (...). L'absence de contradiction est problématique", a-t-il déploré.
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Piketty appelle à "un ISF renové"
Alors que "500 milliards d'euros" ont été dépensés pour faire face à la crise, Emmanuel Macron a exclu dimanche d'augmenter les impôts pour les financer. Pour Thomas Piketty, cet engagement signifie d'abord que le gouvernement ne veut pas rétablir l'impôt sur la fortune (ISF). "Mais quand il s'agit d'augmenter l'impôt sur tous les Français et pesant sur tous les salaires...", grince l'auteur du best-seller Le Capital au XXIe siècle, appelant à "un ISF rénové" avec des feuilles d'imposition "préremplies" sur les patrimoines pour éviter les sous-déclarations.
"Le principal impôt sur le patrimoine en France, c'est la taxe foncière (...). C'est un impôt très lourd, extrêmement injuste, qui augmente d'année en année (...). L'ISF corrigeait un peu ça, ça a été supprimé", alors qu'"un impôt sur la fortune des 1 % les plus riches devrait rapporter au moins 10 milliards d'euros" par an, a commenté Thomas Piketty.