Ikea change de braquet : habituée aux immenses entrepôts en zone périphérique, l’enseigne d’ameublement suédoise a présenté mardi son premier concept de magasin de centre-ville, qui ouvrira à Paris le 6 mai prochain. Un magasin plus petit et conçu pour répondre aux besoins d’une clientèle urbaine, qui possède de moins en moins de voiture, indispensable pour rejoindre les entrepôts de banlieue. Cette première mondiale marque donc un tournant dans la stratégie d’Ikea.
Pourquoi un magasin en centre-ville ?
Ce nouveau concept doit permettre à Ikea de s’adapter aux nouvelles pratiques de consommation. "Ce premier magasin de centre-ville, un projet unique en France et dans le monde, a été développé pour répondre aux attentes des citadins et pour nous rapprocher des consommateurs en cherchant à être toujours plus accessible, pratique et durable", a détaillé Walter Kadnar, le PDG d’Ikea France, lors de la présentation mardi.
Concrètement, il s’agit pour Ikea d’aller chercher les clients là où ils habitent. De moins en moins de Parisiens possèdent une voiture et ne peuvent plus se rendre dans les entrepôts éloignés. Ce magasin en centre-ville doit ramener les clients chez Ikea dont le concept de présentation en situation pousse à la consommation. Par ailleurs, l’espace sera dédié aux petits appartements parisiens (un tiers des logements de la capitale sont des T2) avec des solutions d’aménagement dédiées.
Pourquoi Paris pour cette première mondiale ?
Les dirigeants d’Ikea n’ont pas donné de réponse à cette question. Mais le choix de Paris n’est pas dû au hasard. Cela fait des mois que l’enseigne réfléchissait à ce magasin en centre-ville. La France est le troisième marché dans le monde pour Ikea. Une base que les têtes pensantes de l’entreprise ont d’ailleurs mobilisée pour imaginer le magasin de La Madeleine. "Nous avons réalisé des entretiens avec 1.200 locaux pour mieux comprendre leurs besoins. Quand nous ouvrirons le 6 mai, ces échanges vont continuer pour faire évoluer le magasin en coopération avec le public. Nous donnons le pouvoir au peuple !", s’enthousiasme Jesper Brodin, PDG d’Ikea Monde, dans Les Échos.
À quoi ressemblera le magasin parisien ?
Assez logiquement, le magasin de La Madeleine sera assez différent des entrepôts traditionnels d’Ikea. Situé sur la place, il occupera un espace de 5.400 m2 sur deux étages, un espace quatre fois moins grand que les traditionnels magasins d’Ikea en périphérie. Il n’y aura ni parking ni dépôt géant en libre-service. Par conséquent, "seuls" 1.500 produits seront disponibles à l’achat sur place. Le reste du catalogue, dont l’intégralité du gros mobilier, sera disponible à la commande avec retrait en magasin et en point relais (dont le nombre va doubler d’ici août) ou, c‘est une nouveauté, avec la livraison à vélo.
À l’intérieur aussi, les habitués d’Ikea devraient être un peu déboussolés. En effet, l’enseigne abandonne son concept de circuit imposé obligeant à faire le tour du magasin pour gagner la sortie (une façon d’inciter les clients à acheter). À la place, Ikea a opté pour un découpage en cinq zones : "Hej ! Way" ("Bienvenue" en suédois, la zone d’accueil), "Social Gourmand" (table et cuisine), "Express your personality" (décoration et aménagement), "Share & Play" (salon et activités au sein de la maison) et "Detox & Recharge" (bien-être). On retrouvera toutefois un passage obligé des magasins Ikea : le restaurant avec ses spécialités suédoises.
Est-ce un tournant pour Ikea ?
Cette première ouverture d’un magasin en centre-ville constitue la première pierre de la nouvelle stratégie d’Ikea. "Comme tous les acteurs du commerce, nous n'avons d'autre choix que de nous réinventer. (Le magasin de La Madeleine) est un nouveau concept, qui servira de laboratoire. Les leçons à en tirer - en termes de logistique, de livraison, de recyclage, etc. - serviront à tout le groupe, magasins traditionnels inclus", explique Jesper Brodin, le PDG du groupe Ikea, dans Les Échos.
Pas la fin des entrepôts. Ikea a déjà d’autres projets similaires en tête. Le groupe Ikea va investir 400 millions d’euros sur trois ans en France, notamment pour des sites "intermédiaires", entre l’entrepôt et le magasin de centre-ville, à Lyon et Nice. Mais il n’y a pas de concurrence avec les immenses entrepôts classiques. "C’est une évolution de notre concept mais il ne faut pas le voir comme un magasin qui en remplacerait d’autres. C’est une offre complémentaire. Ce magasin est là pour apporter une nouvelle expérience", explique à Europe 1 Annie Bétreau, directrice du magasin Paris La Madeleine.
Les entrepôts traditionnels ont encore de beaux jours devant eux. "De par l'étendue de leur gamme, ils demeurent le meilleur endroit où puiser votre inspiration, notamment quand vous venez d'emménager. Nous investissons à égalité dans les ouvertures de centre-ville, les grands formats et le numérique. Nous n'envisageons pas de céder une partie de nos grandes surfaces, ni de les reconvertir", martèle Jesper Brodin.