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Brieuc Boschet et AFP, édité par Gauthier Delomez / Crédits photo : Thibaut Durand / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP , modifié à
Selon les données publiées par la Banque de France, l'argent dormant sur les comptes courants des particuliers repart timidement à la hausse au deuxième trimestre, une première depuis l'été 2022. Comment expliquer ce phénomène ? Europe 1 a recueilli l'avis de l'économiste Philippe Crevel.

Les dépôts à vue ont-ils atteint leur plancher ? L'argent dormant sur les comptes courants des particuliers repart timidement à la hausse au deuxième trimestre, selon les données publiées jeudi par la Banque de France, une première depuis l'été 2022. "Les premières données (encore partielles) couvrant les principaux placements financiers des ménages pour le deuxième trimestre 2024 indiquent notamment un arrêt du mouvement de décollecte (flux net négatif, NDLR) sur les dépôts à vue", explique la Banque de France dans son rapport trimestriel sur l'épargne et le patrimoine des ménages.

554 milliards d'euros en juin

Après avoir végété juste en dessous des 550 milliards d'euros entre février et mai, les dépôts à vue des ménages se situaient à 554 milliards d'euros au mois de juin. Cette masse d'argent dormant sur les comptes courants n'avait cessé de croître, depuis aussi loin que remonte l'historique public de la Banque de France (janvier 2003), pour culminer à 639 milliards d'euros à l'été 2022.

La hausse des taux d'intérêt, répercutée dans les principaux produits d'épargne à capital garanti (Livrets A, comptes à terme...) a, à ce moment-là, poussé les épargnants à mieux utiliser cet argent en le plaçant sur des produits rémunérateurs pour eux.

Perte d'argent en période d'inflation

Détenir autant d'argent sur des dépôts à vue ne rapportent rien, et peut même faire perdre de l'argent en période d'inflation comme l'explique au micro d'Europe 1 l'économiste Philippe Crevel. "L'inflation érode le montant du patrimoine, de l'épargne. Quand il y a une inflation de 5% sur un an, la valeur du patrimoine du dépôt à vue a diminué de 5%", expose-t-il.

Comment expliquer ce phénomène qui représente tout de même 10% du patrimoine total des Français ? Selon Philippe Crevel, il y a trois explications : les taux d'intérêts faibles qui rendent les placements comme le Livret d'épargne populaire (LEP) moins attractifs, un climat d'anxiété politique et économique - les Français ont envie d'avoir des ressources à disposition -, et, pour les plus riches qui possèdent un Livret A plafonné, la difficulté de se tourner vers la Bourse. Ils choisissent donc la sécurité.

Mauvaise nouvelle pour les banques

Une mauvaise nouvelle pour la rentabilité des banques : les dépôts à vue sont en effet bien plus lucratifs pour elles, puisque les établissements bancaires ne les rémunèrent pas ou infiniment peu. La rémunération moyenne des dépôts à vue s'élève à 0,07%, dix fois moins que les entreprises pour le même produit (et peu ou prou le même encours total), et très loin des taux pratiqués pour les crédits.

Les données publiées jeudi montrent par ailleurs un regain d'intérêt des épargnants pour les fonds euros de l'assurance-vie et une désaffection pour les fonds immobiliers, qui font face à des dévaluations de parts et à des demandes de retraits. Le patrimoine financier des ménages a atteint 6.267,6 milliards d'euros au premier trimestre, selon les dernières données disponibles, un record.