Le Parlement européen a approuvé, dans un vote final mardi, le projet de règlementation mettant fin à la vente de véhicules neufs à moteur thermique en 2035, un texte emblématique pour les objectifs climatiques européens. "Nous sommes arrivés à un accord historique, qui réconcilie l'automobile et le climat, deux frères ennemis", s'est réjouie l'eurodéputée écologiste Karima Delli, présidente de la commission des Transports. Le texte, adopté à 340 voix pour, 279 voix contre, et 21 abstentions, prévoit de réduire à zéro les émissions de CO2 des voitures et camionnettes neuves en Europe à partir de 2035.
Arrêt des ventes de véhicules neufs à essence, diesel et hybrides
Cela revient à l'arrêt de facto des ventes de voitures et véhicules utilitaires légers neufs à essence et diesel dans l'UE à cette date, ainsi que des hybrides (essence-électrique), au profit de véhicules 100% électriques. Cette règlementation, proposée par la Commission européenne en juillet 2021, avait fait l'objet de négociations entre le Parlement et le Conseil de l'UE, qui étaient parvenus à un accord en octobre 2022. Le Conseil (représentant les Etats membres) devra encore formellement approuver le texte pour qu'il entre en vigueur.
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Alors que l'automobile, premier mode de déplacement des Européens, représente un peu moins de 15% des émissions de CO2 totales dans l'UE, la nouvelle règlementation doit contribuer à atteindre les objectifs climatiques du continent, en particulier la neutralité carbone à l'horizon 2050. Il s'agit du premier accord sur un texte du paquet climat européen ("Fit for 55") destiné à réduire d'au moins 55% d'ici 2030 par rapport à 1990 les émissions de gaz à effet de serre de l'UE. Le texte entérine également des objectifs intermédiaires -à horizon 2030- de réduction des émissions de CO2 de -55% pour les nouvelles voitures et -50% pour les nouvelles camionnettes, par rapport à 2021.
Une dérogation accordée pour les constructeurs "de niche"
Une dérogation est accordée aux constructeurs "de niche" ou ceux produisant moins de 10.000 véhicules par an, leur permettant d'être équipés d'un moteur thermique jusqu'à fin 2035, soit une année de plus que pour le reste de l'industrie. Cette clause, dite parfois "amendement Ferrari", profitera notamment aux marques de luxe.
Sous la pression de plusieurs pays dont l'Allemagne, le texte aborde l'éventualité d'un feu vert à venir pour des technologies alternatives comme les carburants synthétiques (e-carburants) ou motorisations hybrides rechargeables si celles-ci permettent de supprimer totalement les émissions de gaz à effet de serre des véhicules.
"Notre industrie est prête à relever le défi de fournir des véhicules zéro émission", a déclaré dans un communiqué Sigrid de Vries, directrice générale de l'Association des constructeurs automobiles européens (ACEA). "Il est essentiel que toutes les politiques et réglementations de l'UE s'alignent sur cet objectif et le soutiennent", a-t-elle ajouté.
Des critiques venues de droite et de gauche
Mais le vote du texte a également fait grincer des dents, notamment au sein du PPE (droite), la principale formation politique au Parlement européen, qui défendait une réduction des émissions de CO2 des véhicules neufs en 2030 de 90% plutôt que 100%. "L'industrie automobile génère 12,5 millions d'emplois en Europe. Nous ne pouvons pas nous permettre de jouer aux apprentis-sorciers avec cette filière", a déclaré de son côté Nathalie Colin-Oesterlé, opposée au texte. "La transition doit se faire avec et non contre cette filière, afin de ne pas être génératrice de drames humains et sociaux", a-t-elle estimé.
La règlementation a également suscité des critiques du groupe The Left (gauche radicale), sur l'approvisionnement en métaux nécessaire pour la production de batteries. "Sommes-nous en train de nous tirer une balle dans le pied ?", a interrogé la communiste tchèque Katerina Konecna. "Nous allons dépendre des composants de batterie de Chine et d'Afrique, nous faisons la même erreur qu'avec les combustibles fossiles russes".
Les écologistes, eux, ont réclamé d'aller plus loin, et d'élaborer une règlementation similaire pour les poids lourds. "Si nous voulons prendre la neutralité carbone au sérieux, les camions doivent également atteindre le seuil de zéro émissions", a soutenu l'eurodéputé néerlandais Bas Eickhout. La Commission européenne doit présenter mardi après-midi sa proposition pour fixer des objectifs de réductions d'émissions aux véhicules lourds (camions, tracteurs, autobus...), absents du texte approuvé au Parlement européen.