C'est un coup de tonnerre pour l'immobilier parisien. Le tribunal administratif de Paris a annulé mardi les arrêtés fixant l'encadrement des loyers à Paris, au motif que ce dernier aurait dû concerner l'ensemble de l'agglomération parisienne, et non la seule capitale, pour être conforme à la loi, soit le même argument qui a conduit à l'annulation de l'encadrement des loyers à Lille en octobre. Comme vous l'annonçait Europe 1 dès le rendu de la décision, le gouvernement va faire appel, comme il l'a fait dans le dossier de Lille, a annoncé Jacques Mézard, le ministre de la Cohésion des territoires, en charge du logement.
Plusieurs motifs de contestation. Le tribunal administratif a estimé que "ce dispositif d’encadrement des loyers ne pouvait être mis en œuvre dans la seule commune de Paris, mais aurait dû l’être dans les 412 communes de la région d’Île-de-France comprises dans la 'zone d’urbanisation continue' de l’agglomération parisienne", comme le prévoit le décret d'application. "Le tribunal a retenu nos arguments et le fait que les arrêtés préfectoraux de 2015, 2016 et 2017 n’aient concerné que Paris, alors que le dispositif d’encadrement des loyers, instauré par la loi Alur, doit concerner une 'zone d’urbanisation', en l’occurrence l’agglomération parisienne et non simplement la ville de Paris", appuie Me Alain Cohen-Boulakia, avocat qui a plaidé le dossier au nom de l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI).
L'UNPI avait développé deux autres arguments pour obtenir l'annulation de l'encadrement des loyers, mais ils n'ont pas été retenu. D'une part, "une base de référence obsolète", l'encadrement ayant été instauré "à partir des 80 quartiers de Paris, suivant un découpage datant de 1860". D'autre part, "l'uniformité des loyers médians", l'encadrement des loyers ne tenant pas compte "de l'environnement, du standing, de l'étage, de la présence d'un ascenseur, de l'ensoleillement, de l'absence ou la présence de nuisances sonores…".
Déception à la Mairie de Paris. "C’est une décision que je regrette beaucoup puisqu’elle va pénaliser les Parisiens et notamment la classe moyenne parisienne. La conséquence concrète que tout cela aura, c’est que les loyers risquent de flamber à nouveau dans la capitale alors même que nous avions réussi à les stabiliser", déplore Ian Brossat, adjoint à la Mairie de Paris en charge du logement, au micro d'Europe 1. "Je souhaite que le gouvernement agisse pour rétablir l’encadrement des loyers dans la capitale. Soit en faisant appel, et dans ce cas, je souhaite que ce soit un appel suspensif afin que l’encadrement des loyers continue à s’appliquer pendant la durée de l’appel. Ou alors en procédant à une modification législative afin de clarifier les choses et faire en sorte que Paris puisse appliquer l’encadrement des loyers."
"L'encadrement des loyers n'est pas une bonne mesure". La décision du tribunal fait en revanche des heureux chez les acteurs de l'immobilier. "Nous, acteurs de terrain, savons tous que l'encadrement des loyers n'est pas une bonne mesure. C'est une mesure partisane, politique et absolument pas économique", dénonce Francis Abraham, patron du réseau d'agences immobilières Guy Hoquet, au micro d'Europe 1. "L'encadrement des loyers n'a absolument pas facilité l'accès au logement des locataires, ni même réduit le montant des locations. Pour les petits propriétaires, c'était même un épouvantail qui oblitérait leur capacité de rentabilité", ajoute-t-il. "Résultat, il y avait moins d'appartements à louer sur Paris : au sein du parc privé de petits propriétaires de Guy Hoquet, cela représente une baisse des locations de 15% depuis mars 2014, date de l'annonce de l'encadrement des loyers."