Les mois passant, il devient difficile d’y voir clair. Cela fait déjà plus de trois mois que le projet de loi Travail défendu par Myriam El Khomri suscite la polémique, provoquant grèves et manifestations à répétition. Et ce n’est peut-être pas fini : le gouvernement campant désormais sur ses positions, la CGT et FO menacent d’organiser de nouvelles journées de mobilisation, d'autant que la rencontre vendredi entre le secrétaire général de la CGT et la ministre du Travail n'a pas changé la donne. En attendant de voir comment évolue le mouvement, où en est la mobilisation actuellement ?
Participation en baisse à la SNCF. Les cheminots avaient deux raisons d’être aux avant-postes de la mobilisation : ils disposent d’une capacité de nuisance non négligeable mais ils sont aussi en train de négocier un nouvel accord d’entreprise et de branche qui doit régir l’organisation du temps de travail dans le secteur. Les employés de la SNCF ont donc été parmi les plus actifs depuis le début de la contestation. Mais le temps a érodé la mobilisation et, surtout, le gouvernement a forcé la main de la direction de la SNCF, priée de ne pas mettre davantage d’huile sur le feu lors des négociations propres au secteur du rail. Résultat, la SNCF a accepté de prolonger les règles actuelles, alors qu’elle espérait améliorer la productivité de ses équipes, et la mobilisation des cheminots est allée decrescendo. Elle est pour l'instant suspendue, la SNCF évoquait jeudi des perturbations "résiduelles", en attendant de voir comment évoluent les négociations avec le gouvernement.
Retour à la normale dans le secteur pétrolier. C’est grâce à la mobilisation dans ce secteur que les syndicats opposés à la loi Travail ont réellement engagé un bras-de-fer avec le gouvernement mi-mai. Un mois plus tard, tous les sites ont redémarré leur activité : la raffinerie de Feyzin a voté la reprise du travail le 7 juin, suivie trois jours plus tard par la raffinerie de Donges puis par celle de Gonfreville-l’Orcher le 11 juin. Les terminaux pétroliers du Havre ont également voté la reprise du travail le 10 juin au soir. Hormis des débrayages le 14 juin à l’appel de l’intersyndicale, l’activité est désormais revenue à la normale dans tout le secteur.
Au final, seuls quelques blocages persistaient jeudi en région parisienne et dans les Bouche-du-Rhône, où des éboueurs ont bloqué des sites de traitements des déchets.
Mais la menace de nouvelles journées de grève persiste. Si la mobilisation contre la loi Travail ne provoque plus de perturbations majeures, les opposants n’ont pas pour autant déposé les armes : la CGT, la FSU et Solidaires prévoient toujours deux nouvelles journées d’action afin de maintenir la pression sur le gouvernement. Et la rencontre vendredi entre le secrétaire général de la CGT et la ministre du Travail n’a pas permis de faire bouger les lignes.
Les syndicats mobilisés maintiennent donc pour l’instant leur appel à des grèves, des rassemblements et des manifestations le 23 juin puis le 28 juin, jour du vote du projet de loi au Sénat. Des manifestations que le gouvernement envisage d’interdire au nom de la sécurité, une menace qui a ravivé la colère des syndicats : "Il faut arrêter de stigmatiser, de mélanger tous les sujets. Pendant ce temps, on ne parle pas de la loi travail. J'ai une colère contre le Premier ministre", a réagi mercredi le numéro un de Force Ouvrière Jean-Claude Mailly. "On a l'impression que tout ce qui se passe dans le pays, aujourd'hui, c'est de la faute de la CGT. (...) Le gouvernement, au lieu de jeter de l'huile sur le feu, devrait un peu se calmer", a renchéri jeudi Philippe Martinez.