Paris, Francfort, Londres... Comment expliquer l'effondrement des Bourses mondiales ?

Après les annonces de Donald Trump imposant de nouveaux droits de douane à différents pays du monde, les Bourses mondiales ont commencé à plonger, et cela se poursuit avec un lundi noir. Comment expliquer ces baisses brutales sur les marchés financiers, peu après ces annonces ? Europe 1 fait le point.
Un vent de panique s'empare des Bourses mondiales depuis les annonces de Donald Trump sur les droits de douane. Le 2 avril dernier, le président des États-Unis a dévoilé les nouveaux tarifs douaniers appliqués à bon nombre d'États, allant de 10% à 50%, faisant dès lors chuter les principaux indices. Ce lundi encore, le CAC 40, indice vedette de la Bourse de Paris qui reflète la performance des plus grandes entreprises françaises, dévissait de 4,78% pour s'établir à 6.927 points, alors qu'il en comptait près de 8.000 juste avant la prise de parole du locataire de la Maison Blanche.
En Europe, les principales places boursières ont continué de perdre ce lundi : -4,13% à Francfort, -4,64% à Londres... Et ces chutes sont aussi observées ailleurs dans le monde, comme en Asie, où les principaux indices du continent ont connu un lundi noir.
La Bourse, "le reflet de la santé des entreprises"
Cette situation est directement liée aux annonces de Donald Trump, car l'application, encore potentielle, de ces nouveaux droits de douane ce mercredi 9 avril représente "un impact énorme sur les entreprises, et la Bourse n'étant que le reflet de la santé des entreprises, il est normal que les investisseurs agissent" en vendant leurs actions, explique Matthias Baccino de Trade Republic, courtier en ligne.
En réalité, "le cours de la Bourse est le reflet d'une anticipation. De ce que l'on pense que les entreprises vont délivrer comme résultats dans les années qui viennent", poursuit l'expert en marchés financiers. L'entrée en vigueur de ces droits de douane suscite donc beaucoup d'inquiétudes du côté des investisseurs. "Quand le nombre de vendeurs est important, et supérieur aux acheteurs, il y a une baisse, c'est la loi du marché", complète Philippe Crevel, journaliste spécialiste des questions macroéconomiques.
Pourquoi les investisseurs décident-ils donc de vendre en même temps ? "Ils estiment que le rendement à venir des actions sera plus faible que ce qu'ils escomptaient, et ils veulent s'en débarrasser en disant 'j'aurai un rendement faible, je préfère me détourner des actions au profit de titres, de valeurs qui vont me garantir, dans les prochains mois, les prochaines années, un rendement supérieur'. C'est pourquoi beaucoup vendent des actions pour acheter des obligations", où "il y a une certitude, avec une garantie de capital et un rendement qu'on connait", souligne-t-il.
Un risque de récession au niveau mondial
Matthias Baccino note que la déroute actuelle des Bourses provient également de la riposte de la Chine, qui a pris des mesures de rétorsion vendredi 4 avril contre les taxes, du même niveau que les États-Unis. "Si cela escalade, et que les tarifs douaniers sont vraiment mis en place, on va avoir des conséquences très directes pour les entreprises (...) Si elles ont de moins bons résultats, la Bourse baisse", pointe le spécialiste auprès d'Europe 1.
Un deuxième facteur justifie la réaction des marchés observée actuellement, c'est le risque de récession aux États-Unis, "à cause de l'inflation générée par les tarifs douaniers", continue Matthias Baccino. "L'économie américaine dépend énormément des consommateurs. Et s'il y a de l'inflation à cause des tarifs douaniers, ils vont moins consommer, et alors l'économie américaine entrera en récession. Dans ce cas-là, il y a de fortes probabilités que le monde entre aussi en récession", souligne l'expert.
Il existe toutefois un moyen pour le président américain d'éviter la récession : convaincre le président de la Fed, la Banque centrale américaine, de baisser les taux. "Il n'est pas exclu que l'un des objectifs de Donald Trump dans ses annonces mercredi, qui ne sont encore que des annonces, est de forcer" son dirigeant, hostile à son encontre, "à baisser les taux, pour relancer l'économie et surtout faire baisser le coût de la dette", avance Matthias Baccino.
Négocier ou riposter aux États-Unis, la décision attendue de l'UE
Une question se pose désormais : la chute des principales Bourses mondiales va-t-elle se prolonger ? "À court terme, il faut surveiller si ces tarifs seront bien mis en place", note le spécialiste des marchés financiers, ajoutant qu'il y a, à moyen terme, deux autres éléments à observer.
"L'Europe va-t-elle répliquer, comme l'a fait la Chine ? Si oui, et avec des droits de douane élevés sur les produits américains, ce sera très négatif pour les marchés financiers puisque l'on sera dans le scénario d'une escalade, et pas dans la négociation. Et que va faire la Fed en mai et en juin ? Si elle baisse ses taux, Donald Trump aura gagné, l'économie américaine n'entrera probablement pas en récession. Sinon, avec une récession aux États-Unis, ce sera très mauvais pour les marchés financiers", qui continueront dès lors de dévisser.
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Dans cette optique, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a indiqué que l'UE avait proposé aux États-Unis une exemption de droits de douane totale et réciproque pour les produits industriels, afin de tenter d'éviter une guerre commerciale, tout en se disant prête "à répondre par des contre-mesures et à défendre nos intérêts". Les négociations ne font que commencer.