Ce n'est pas vraiment un bulletin de note, et l'économiste se garde bien de toute leçon professorale. Mais Jean Tirole se penche longuement, cette semaine dans le JDD, sur les réformes entreprises par Emmanuel Macron depuis son arrivée au pouvoir il y a un peu plus d'un an. Et le prix Nobel d'économie 2014, président de la Toulouse School of Economics, se montre globalement bienveillant.
Des CDI flexibles. Les ordonnances réformant le Code du travail ? Cela "va dans le bon sens" pour Jean Tirole, même si la réforme "est incomplète". Lui prône l'instauration de "contrats à durée indéterminée mais flexibles" afin d'éviter que les entreprises, échaudées par les CDI, n'embauchent qu'en CDD. Par ailleurs, l'économiste plaide pour un système de "bonus-malus" sur les entreprises, afin que celles qui licencient soient mises à contribution pour payer "une partie du coût qu'elles imposent à la Sécurité sociale" en plus des indemnités légales du salarié.
Un bonus-malus pour les entreprises qui licencient.Le plafonnement des indemnités prud'homales ? Là encore, Jean Tirole en pense "du bien". Lui ne juge pas opportun de confier l'appréciation de la légitimité d'un licenciement à une tierce personne. Et estime que, si l'on instaure le système de bonus-malus, on ne peut faire peser sur les sociétés une "incertitude légale".
Les accords de branche, une forme de "cartellisation". Sur l'inversion de la hiérarchie des normes, et le fait que des accords d'entreprise puissent primer sur les accords de branche, Jean Tirole a également une approche similaire à celle du gouvernement. Selon lui, "des règles définies à un niveau supérieur (branche, loi) conservent leur utilité dans certains domaines comme la formation continue". Mais elles ne peuvent pas tout cadrer. L'économiste fustige ainsi certains accords de branche qui sont en réalité des accords "de cartellisation". "Ils aboutissent à des arrangements entre les employeurs et les salariés contre les intérêts des consommateurs."
Plus d'Europe. La réforme de la SNCF va également "dans le bon sens" pour le prix Nobel d'économie, qui estime qu'il "faut passer par la concurrence" pour rendre le service plus performant. Sur l'Union européenne, Jean Tirole va même plus loin qu'Emmanuel Macron, prônant une intégration très poussée avec une harmonisation du droit du travail entre les États membres. "Il faut sauver l'Europe et ensuite relancer l'idéal européen", explique-t-il. "Pour cela, il faut plus de lois et de règlements communs." Mais attention, des règles communes "intelligentes plutôt que tatillonnes" afin de ne pas écraser les citoyens européens sous les normes.