Pourquoi les syndicats et la gauche sont vent debout contre le projet de rachat des RTT

salaire
Les défenseurs de la monétisation des RTT présentent la mesure comme un coup de pouce face à la hausse du coût de la vie (Illustration). © PHILIPPE HUGUEN / AFP
  • Copié
avec AFP
Alors qu'il est en passe d'être voté au Parlement, le projet de conversion des RTT contre rémunération, pour les salariés du privé, met vent debout les syndicats. Pour eux, il s'agit avant tout d'un contre-sens. "Le gouvernement remet en cause le temps de travail, sans l'attaquer frontalement", lance un syndicaliste.

"Coup de canif" contre les 35 heures, mauvaise réponse à l'inflation : les syndicats s'opposent au projet de conversion des RTT contre rémunération, pour les salariés du privé, en passe d'être voté au parlement. Soutenu par la majorité présidentielle et la droite, ce projet donne la possibilité aux entreprises du privé de racheter aux salariés des jours de RTT, si les employés en font la demande. Les défenseurs de la monétisation des RTT présentent la mesure comme un coup de pouce face à la hausse du coût de la vie.

Un contre-sens pour les syndicats

Pour les syndicats, il s'agit avant tout d'un contre-sens. "Les salariés vont voir les RTT comme une source potentielle de revenus, et renoncer à ce temps supplémentaire pour se reposer", s'inquiète mardi Vincent Gautheron, membre de la commission exécutive de la CGT. D'autant que la mesure ne concerne pas tous les secteurs, rappelle Vincent Gautheron. "Beaucoup de branches, comme l'hôtellerie-restauration et l'aide à la personne, n'ont pas de RTT, et ne verront donc pas d'augmentation de leur salaire", relève-t-il auprès de l'AFP.

Les syndicats s'insurgent avant tout d'un "coup de canif" dans le dispositif des 35 heures. Pour Vincent Gautheron, "le gouvernement remet en cause le temps de travail, sans l'attaquer frontalement". Et "invoquer sans cesse l'objectif du plein emploi tout en faisant travailler plus ceux qui ont déjà un emploi relève du paradoxe!", pointe Frédéric Souillot, secrétaire général de FO, dans un communiqué.

L'exonération de l'impôt sur les revenus pointée du doigt

Autre reproche, soulevé par Force ouvrière : l'exonération de l'impôt sur le revenu et des cotisations de l'argent reçu lors du rachat de ces RTT, comme prévu par le projet. "C'est de la perte nette pour les caisses de la Sécurité sociale", regrette Michel Beaugas, secrétaire confédéral de FO.

Interrogé par l'AFP, le président de la CFTC Cyril Chabanier considère que "les salariés qui veulent racheter leurs RTT ne sont pas ceux qui veulent travailler plus pour gagner plus, mais ceux qui veulent avant tout un salaire décent". "Les entreprises diront qu'elles n'ont pas besoin d'augmenter les salaires, puisque les salariés pourront racheter leurs RTT", redoute le président de la CFTC. Il rappelle que "les négociations sont déjà difficiles, mais cette mesure va encore plus inciter les entreprises à augmenter a minima les salaires."

La fin des 35 heures ?

Pour le député Boris Vallaud, président du groupe PS à l'Assemblée, "la droite sarkozyste en rêvait, la macronie le fait : tuer à bas bruit les 35h, avec la monétisation des RTT".

"On n'arrête pas la régression en macronie : adieu les 35h... Les entorses étaient déjà légion mais maintenant, les employeurs pourront monnayer les RTT", a réagi l'Insoumise Clémentine Autain. Tandis que pour le maire écologiste de Grenoble Eric Piolle, "l'esprit Uber continue" car l'Etat "rend possible le rachat individuel des RTT hors cadre collectif et sans cotisations sociales". A contrario, le sénateur LR Bruno Retailleau s'est félicité d'"une vraie mesure de pouvoir d'achat, dans la durée, pour ceux qui souhaitent travailler plus". "Une révolution, après que les 35h ont appauvri les Français et déclassé la France", a-t-il ajouté sur Twitter.