Baisse de taxes ou chèque carburant ? Les derniers arbitrages sont en cours pour aider les Français à faire face à la hausse des prix des carburants. Pour l'exécutif, échaudé par la crise des gilets jaunes, le dossier est ultrasensible, à moins de six mois de l'élection présidentielle. Mais "la solution technique est difficile à faire atterrir", concède-t-on au sein du gouvernement. Le chef de l'État veut en effet à tout prix éviter que l'opinion publique s'enflamme. Et c'est bien ce paramètre qui est dans tous les esprits à l'Élysée.
Éviter "des manifs de cols blancs"
Si rien ne fuite pour l'heure, les quelques conseillers qui acceptent de parler aux journalistes ont deux mots à la bouche : "gilets jaunes". Il y a trois ans, quasiment à la même période de l'année, ce mouvement prenait corps, déclenché entre autres par la taxe carbone et la limitation de la vitesse à 80km/h. Et c'est bien ce que beaucoup redoutent dans l'entourage du chef de l'État : que cette colère endormie finisse par se réveiller cet automne au pire des moments, à six mois de la présidentielle.
C'est pour cette raison que la hausse des prix du gaz, de l'électricité et maintenant des carburants sont prises très au sérieux et qu'Emmanuel Macron et Jean Castex prennent autant de temps avant de trancher. Le chef de l'État et le Premier ministre entendent également ne pas exclure de ces mesures une partie de la population. "Après les gilets jaunes, on ne veut pas non plus des manifs de cols blancs", analyse un conseiller.
Le chèque carburant "va renforcer le clivage"
Du côté des consommateurs, on est formel. Le chèque carburant mis sur la table par le gouvernement n'est pas une option envisageable. C'est ce qu'explique Pierre Chasseray, délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes. "Cette mesure va renforcer le clivage qui existe entre ceux qui vont le toucher et ceux qui ne vont pas le toucher. Donc il faut oublier. La seule mesure possible, c'est la baisse des taxes", a-t-il estimé, se disant en total désaccord avec les propos tenus par Bruno Le Maire lundi matin sur Europe Matin, qui a jugé cette piste trop coûteuse pour le gouvernement.
"Non, ce n'est pas vrai, une baisse des taxes de 1 centime ne crée pas un manque à gagner dans les caisses de l'Etat de 500 millions d'euros. Le prix moyen d'un litre de diesel et de sans plomb en 2018 et 2019 était 15 centimes inférieur à ce qu'on a aujourd'hui. Donc actuellement, quasiment 10 centimes de trop sont perçus par l'État sur le compte de l'augmentation de la fiscalité", a détaillé Pierre Chasseray. "Ramené à l'année, le trop-perçu sur le dos de l'automobiliste est de 5 milliards", a-t-il poursuivi.
Des annonces imminentes
Outre les pistes envisagées par le gouvernement, le délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes a donné quelques astuces pour faire des économies, comme couper son moteur lorsque l'on est à l'arrêt plus d'une dizaine de secondes ou encore l'écoconduite. Mais il n'y a pas selon lui de remède miracle. "Quand on roule au diesel, on peut juste attendre une baisse de la fiscalité. Et pour ceux qui roulent à l'essence, la solution est de regarder si son véhicule est éligible au kit de conversion "flexfuel" bioéthanol, qui permet de rouler deux fois moins cher", a-t-il indiqué.
Après le Conseil des ministres, qui s'est terminé mercredi midi, Emmanuel Macron et Jean Castex ont déjeuné ensemble. Des réunions doivent également avoir lieu mercredi après-midi à Bercy et à Matignon afin de caler ce qui aura justement été décidé lors de ce déjeuner au sommet. Toujours est-il que ce qui circule dans les coursives du palais, c'est que la fin du suspens est proche. Après dix jours de tergiversations, les annonces sont imminentes. Jean Castex devrait s'exprimer mercredi soir ou jeudi matin.