Les grèves SNCF et Air France, qui se conjuguent depuis deux mois, pèsent sur le tourisme d'affaires et le secteur événementiel, les professionnels craignant, au-delà d'une simple baisse d'activité, une perte d'attractivité pour la France. Entamé le 3 avril, le mouvement des cheminots a connu ce weekend sa treizième séquence de deux jours de grève sur cinq. Et à Air France, 15 journées de grève ont été organisées entre fin février et mai.
"Le plus touché est le tourisme d'affaires". "Il y a eu un impact des conflits sociaux" sur le tourisme, indique-t-on au Quai d'Orsay, ministère en charge du secteur : "l'impact est différencié car Paris tire très bien sa carte du jeu, mais d'autres secteurs comme le tourisme d'affaires et les séminaires, ainsi que certaines capitales régionales, ont été frappés", car très dépendants des transports. Dans l'hôtellerie, plus que le tourisme de loisirs, "le plus touché est le tourisme d'affaires", confirme Roland Héguy, président de la principale organisation patronale Umih.
"Arrêt net et significatif". Concernant l'activité spécifiquement liée aux congrès et aux séminaires professionnels, "on a constaté un arrêt net et significatif depuis le début de la grève, et qui va en augmentant car les entreprises ne souhaitent pas prendre de risques", souligne Roland Héguy. "On est à -50 % de chiffre d'affaires sur ce segment depuis le début des grèves et ça ne bouge pas, malgré un mois de juin traditionnellement très fort pour ce tourisme-là en France. C'est un coup dur étant donné que tout se présentait bien initialement pour 2018", déplore-t-il. D'autant que l'hôtellerie n'a pas tout à fait retrouvé ses niveaux d'avant les attentats de 2015 en termes de RevPar, le revenu par chambre disponible qui est l'indicateur clé du secteur.
7,8 milliards de retombées économiques. En France, chaque année, quelque 1.100 foires grand public et salons professionnels ainsi que quelque 2.800 congrès scientifiques sont organisés, qui se traduisent par 7,8 milliards d'euros de retombées économiques et 120.000 emplois, rappelle la filière. "Il y a et il y aura encore des retombées en raison de l'image déplorable de la France qui a été donnée, un pays où on ne peut pas se déplacer" quand il y a des grèves, renchérit Jean-Pierre Mas, président des Entreprises du Voyage qui regroupe les agences de voyage françaises. S'il est difficile de chiffrer précisément le manque à gagner, le cabinet spécialisé Protourisme estime qu'"on a largement explosé le milliard d'euros" dans l'hébergement, les transports, et pour les événements professionnels annulés.
"Nouvelles habitudes de réservation vers les concurrents". "Cela touche le tourisme mais aussi, et c'est encore plus grave, les déplacements professionnels", résume Alain Capestan, PDG de Comptoir des Voyages. "Les conséquences pour Air France sont désastreuses" car les grèves "conditionnent de nouvelles habitudes de réservation vers ses concurrents, notamment sur le segment des déplacements professionnels et des voyages haut de gamme", estime-t-il.