Chaque jour, François Clémenceau traite d’un sujet international.
La Cour Européenne de justice examine ce mercredi une procédure en appel de la Russie après avoir été condamnée pour ne pas avoir permis à Alexei Navalny de bénéficier d’un procès équitable. Navalny étant l’opposant n°1 de Vladimir Poutine, cette audience est donc très sensible.
Tout ce qui touche à Vladimir Poutine et à l’opposition en Russie est sensible. Des magistrats, des journalistes, des enquêteurs d’ONG, des militants écologistes, et des opposants, tous ceux qui s’opposent frontalement au régime, tel qu’il est incarné par le président russe et par son appareil de sécurité ainsi que ses relais d’oligarques dans les grandes sociétés, tous sont dans le meilleur des cas intimidés, sinon poursuivis en justice, voire finissent leurs jours dans un accident ou abattus par des criminels de droit commun.
Alors, aux yeux de la justice russe, Alexei Navalny a eu le tort, avant de s’en prendre à la corruption de clan Poutine, d’avoir voulu faire du commerce de services de livraison. Les juges accusent les frères Navalny de surfacturation et de malversations. Alexei Navalny a été condamné et cela tombe bien puisque lorsqu'on est condamné, on ne peut pas se présenter à l’élection présidentielle. Sauf que Navalny a porté son cas devant la Cour Européenne de Justice et que les juges européens ont estimé son procès arbitraire. Ils ne disent pas que sa condamnation était politiquement motivée mais que la condamnation était illégale puisqu'elle sanctionnait un délit qui n’avait pas été commis. La Cour Européenne de justice a donc condamné la Russie et c’est ce jugement qui est aujourd'hui contesté en appel par les autorités russes.
Sauf qu’il est un peu tard parce que la candidature de Navalny a été annulée pour la présidentielle du 18 mars prochain.
Oui, et c’est la raison pour laquelle il a décidé de jouer la campagne à l’envers. Plutôt que de concourir et de rassembler ses partisans afin qu’ils votent pour lui, il en appelle aujourd'hui à un boycott général de ce scrutin qu’il estime corrompu. Dimanche, dans toutes les grandes villes de la Russie, ses partisans vont défier les interdictions de manifester. Son idée est d’obtenir un effet boule de neige et de rendre l’élection inévitable de Vladimir Poutine très incomplète pour ne pas dire suspecte.
Il y a pourtant d’autres candidats autorisés à concourir.
Oui, mais ce sont toujours un peu les mêmes. Et aucun ne conteste formellement le système et les atteintes à l’état de droit. Que ce soit le parti communiste ou les partis nationalistes ou régionalistes, chacun se bat de façon très corporatiste. Le seul cas un peu plus complexe, c’est celui de Ksenia Sobtchak , c’est la fille d’Anatoli Sobtchak, l’ancien maire de Saint-Petersbourg, un très proche de Boris Eltsine et qui a surtout permis à Vladimir Poutine de se faire une place dans les plus hautes sphères du pouvoir. Ksenia Sobtchak dit aujourd'hui que Navalny a tort de boycotter, qu’il ferait mieux d’appeler à voter pour elle qui veut se battre pour plus de démocratie. Mais beaucoup doutent de sa sincérité et craignent qu’elle ne soit instrumentalisée par Poutine pour offrir un semblant de concurrence dans cette course à la présidentielle.