Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Les boulangers pourront-ils à l'avenir ouvrir le 1er mai sans risquer des sanctions ? Une proposition de loi sera soumise bientôt à l'Assemblée.
Une proposition de loi visant à clarifier les possibilités d'ouverture de certaines activités le 1er mai, au premier rang duquel, les boulangeries. La France est un pays merveilleux où on a si peu de problèmes qu’on a réussi, l’an passé, à traîner en justice des boulangers qui avaient l’audace de vendre du pain le 1er mai (comme ils le faisaient depuis des années) et à en faire naître une controverse politico-syndicale
Avant de parler de ces boulangers inquiétés, rappelons qu’on n'est pas supposé travailler le 1er mai.
La fête du travail est un jour férié chômé. Seuls les services pour lesquels la continuité de l'activité est indispensable (les hôpitaux, les transports...) tournent. Néanmoins depuis 1986 et une prise de position gouvernementale socialiste, on considérait qu'il y avait une dérogation pour les boulangeries, comme pour le travail dominical. On pouvait servir du pain et des petits gâteaux, à condition que la paie des salariés soit double.
Mais l'an dernier, en Vendée, des boulangers ont été rappelés à l'ordre
L'inspection du travail - qui elle, ne chômait pas - a fait une descente dans cinq boulangeries le 1er mai, lesquelles ont été assignées en justice pour avoir fait travailler leurs salariés. Les boulangers risquaient 750 euros d'amende par salarié. Ils ont été relaxés la semaine passée... Mais on s'est aperçu à la faveur de cette affaire que le millefeuille juridique ancien grâce auquel la boulangerie française pensait avoir le droit de travailler le 1er mai était devenu obsolète et menaçait de s’écrouler comme une pièce montée un jour de canicule. On s’est aussi aperçu qu’un énorme contentieux potentiel s'ouvrait. Des boulangers pourraient travailler s'ils livraient des hôpitaux, par exemple, mais pas s’ils servaient un public lambda. Chaque cas était discutable. Du droit digeste comme un Paris-Brest.
D'où la proposition de loi déposée par des sénateurs centristes de clarifier et de permettre l’ouverture le 1er mai des activités « dont le fonctionnement ou l’ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l’activité ou les besoins du public », si les salariés sont volontaires, et en les payant double
Evidemment, levée de bouclier syndicale.
A commencer par la leader de la CGT Sophie Binet. « On sait survivre un jour sans avoir sa baguette de pain et c’est très important que ce jour reste férié et chômé. Il a été acquis dans le sang et dans les larmes des ouvrier ».
Ca m'a un peu énervée, ça. Parce que la branche cheminote de la CGT a décrété la grève le week end suivant, pour un autre jour férié, le 8 mai, en s’asseyant sur autre acquis social des salariés acquis dans le sang et les larmes, celui de disposer comme bon leur semble de leurs congés payés. Ca, ça ne lui pose aucun problème, à Sophie Binet. Vous noterez, d'ailleurs, que la CGT Cheminots n'appelle pas à la grève le 1er mai – mais le 8. Elle sait bien que le 1er mai, on est payé double à la SNCF, c'est la loi. On ne va pas se priver d’un bonus ! Mais visiblement les salariés de la boulangerie, eux, n'ont pas le droit d'en profiter.