Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
C’est le début des vendanges, elles viennent de commencer dans le Languedoc Roussillon. Ambiance morose. 2024 a été difficile pour la vigne française.
Après la sécheresse de l’an passé, qui a frappé très fort, cette année, ça a été les grandes eaux sur une partie de la vigne française. Qui dit excès d’eau dit mildiou et grains qui se forment mal. Et puis il y a eu aussi des épisodes de gel tardif, de la grêle, un coup de chaud début août... On est au tout début des vendanges, mais on sait déjà que ça sera une petite année en volume. On sera bien en dessous des 48 millions d’hectolitres de 2023.
Dans le Languedoc Roussillon, la plus importante zone de production, après les premiers sondages, on s’attend à une baisse de 25% à 30% des récoltes.
Cela fait un moment que la vigne française est en crise.
Le changement climatique la fait souffrir de plus en plus, avec des excès en tous genres... Dans le Languedoc, on en a est à 4 mauvaises récoltes consécutives. Cultiver la vigne c’est de plus en plus difficile, coûteux et risqué.
Les consommateurs changent, eux aussi.
Le secteur du vin en France est confronté à un changement profond des marchés. La consommation de vin en France a baissé de moitié depuis les années 60. Les habitudes changent. Le goût pour le vin rouge s’érode, les pétillants se vendent mieux. Et nos vins s’exportent plus difficilement. Résultat : la France produit trop de vin. L’an passé, il a fallu en distiller une partie : 3.8 millions d’hectolitres, pour assainir le marché. Economiquement ça coince. Un grand nombre d’exploitation sont a bout de trésorerie.
C’est le grand chambardement dans la vigne française.
Oui, elle est en train de se restructurer. Déjà, l’Etat et l’Europe vont financer et indemniser l’arrachage d’hectares et d’hectares de vigne, à la demande des producteurs. 5 à 10 % des surfaces françaises dès cette année. Certains producteurs arrêteront, d’autres vont recommencer de zéro.
Comment ça ?
Il va falloir réfléchir aux cépages, à leur implantation, aux types de production à privilégier pour qu’elles se vendent. Par exemple, tout le secteur est en train de tester des cépages, espagnols, grecs, portugais, plus résistants au sec. Il va falloir modifier tous les cahiers des charges des appellations pour leur faire de la place, gros chantier. Ca aura un autre avantage : nos cépages traditionnels, aux fortes chaleurs, font du sucre et ça donne des vins très alcoolisés, dont les consommateurs ne veulent plus. On pourra corriger. Mais vous voyez, ça veut dire des quantités de traditions à bousculer, une révolution culturelle à faire.
Nécessaire !
Cruciale. La vigne structure les paysages de France et la vitalité des territoires: une exploitation agricole sur cinq en France a une activité viticole. Et puis, économiquement c’est vital : le vin, c’est une des locomotives de nos exportations. 11 milliards en 2023. C’est notre poule aux œufs d’or.