Henri d’Artois, comte de Chambord (1820-1883) est le petit-fils du roi Charles X (1757-1836), le dernier des Bourbon. Alors qu’il est amené à monter un jour sur le trône sous le nom d’Henri V, il est contraint à l’exil en 1830, quand les journées révolutionnaires portent au pouvoir un Orléans...
Dès sa naissance, Henri V se démarque. Né posthume, sept mois après la mort de son père, il est surnommé "L'enfant du miracle". Son père, duc de Berry est assassiné le 14 février 1820 par Louvel, un fanatique bonapartiste. Sans la naissance providentielle du petit Henri le 29 septembre 1820, la branche aînée des Bourbons aurait complètement disparu.
Les royalistes et partisans des Bourbons sont tellement heureux d'apprendre sa naissance qu'ils lancent une souscription nationale et lui offrent le château de Chambord. Il en tirera titre et revenus mais de toute sa vie, n'y passera que deux nuits entières.
L'avènement de Louis-Philippe d'Orléans
Quelques années après sa naissance ont lieu les Trois Glorieuses, la révolution qui porte Louis-Philippe, un Orléans, au pouvoir. Il n'est alors pas roi de France mais roi des Français. Le jeune Chambord et sa famille sont alors contraints de quitter la France. Il n'a alors que dix ans et n'a régné que quelques heures sous le nom de Henri V, avant d'être pris de court par Louis-Philippe d'Orléans. A peine le temps de faire ses valises et le voilà parti pour un exil qui durera quarante ans.
Le jeune Henri est bien sûr élevé dans l'horreur de la Révolution et la haine des Orléans. Il vit dans un aréopage de monarchistes qui le traitent comme s'il était un roi avec un trône, en tout cas un monarque dont le temps viendra. Il y croit dur comme fer. Pendant dix-huit ans, il prépare un programme politique (très Ancien Régime) pour son retour. Il est d'ailleurs le seul monarque de France à avoir proposé un programme politique à ses sujets.
Le retour du comte de Chambord à Paris
En 1870, la guerre fait rage en France. La Chambre qui est élue est majoritairement monarchiste et constitue une chance unique pour le comte de Chambord de revenir sur le devant de la scène. Souvenez-vous, cela fait quarante ans qu'il est exilé.
Il revient en France, à Paris, le 2 juillet 1871. Il se rend d'abord à Notre-Dame, lieu de son baptême, pour y dire une prière, puis se fait conduire à la Sainte Chapelle avant d'aller jusqu'à son lieu de naissance, le Palais des Tuileries, qui a malheureusement brûlé durant la Commune. Dernière étape de son pèlerinage : se recueillir devant la statue de Henri IV qui est érigée au milieu du Pont Neuf.
Ses partisans veulent le convaincre d'accepter une monarchie constitutionnelle. Il n'y est pas hostile mais ne veut pas d'un régime politique où le roi n'aurait aucun pouvoir. Quant au drapeau tricolore, il refuse de l'accepter par crainte de se positionner en légitimiste de la Révolution. A ce sujet, il écrit :
Henri V ne peut abandonner le drapeau blanc d'Henri IV.
La tentative de restauration
Aux élections de 1873, le premier président élu de la République est Patrice de Mac Mahon, un monarchiste qui serait prêt à laisser sa place. Pour le comte de Chambord, l'accession au trône semble imminente et on se répartit déjà les fonctions à la Cour. Des drapeaux blancs sont même fabriqués et des monnaies frappées pour préparer la succession. Tout est prêt.
Mais il y a quelques problèmes, notamment sur la question du drapeau tricolore. Ses partisans, conscients qu'il s'agit d'un point sensible, proposent de garder un drapeau tricolore mais de le parsemer de fleurs de lys. Une autre option aurait consisté à garder le drapeau blanc et à le cravater de tricolore. Mais Chambord s'entête. Il écrit :
Je ne puis consentir à inaugurer un règne réparateur et fort par un acte de faiblesse. Ma personne n'est rien, mon principe est tout.
Malheureusement pour le comte de Chambord, cet entêtement lui coûtera le trône. Les députés votent la reconduction du vieux maréchal de Mac Mahon pour sept ans. Chambord repart en exil à Frohsdorf, en Autriche. Il garde espoir quelques temps mais les victoires successives des républicains douchent ses ambitions. Il meurt en Autriche dix ans après sa tentative de restauration de la monarchie et est inhumé dans l'actuelle Slovénie, non loin de la frontière italienne.