Dans Historiquement Vôtre, Clémentine Portier-Kaltenbach vous raconte les amours interdites de Marie-Joséphine de Savoie (1753-1810). Belle-sœur du roi Louis XVI, Marie-Joséphine de Savoie conclut un mariage sans amour avec Monsieur, futur Louis XVIII. Jugée laide et sans esprit, elle est isolée à la cour de Versailles. Mais en 1785, Madame vit la plus belle rencontre de sa vie. Elle tombe follement amoureuse de sa nouvelle lectrice, Madame de Gourbillon.
Fille du roi de Sardaigne et belle-soeur de Louis XVI, Marie-Joséphine de Savoie épouse le futur Louis XVIII en 1771, devenant ainsi la comtesse de Provence. C'est un mariage sans amour et sans enfant. Les deux époux ne s'entendent pas et Marie-Joséphine est assez isolée à la Cour de Versailles. On la juge laide et sans esprit, ce qui la met un peu à l'écart. Sa soeur épouse le futur Charles X deux ans plus tard, mais cela n'arrange pas vraiment la situation.
Un coup de foudre immédiat
En 1785, alors qu'elle vient d'avoir 32 ans, on lui présente une nouvelle lectrice, Jeanne-Marguerite de Gourbillon. A 48 ans, elle est seize ans plus âgée que Marie-Joséphine. Elle est l'épouse du directeur des postes de Lille, qui a acheté une charge de lectrice auprès de Madame, l'épouse du frère du roi.
Marie-Joséphine est vite subjuguée par cette grande et belle femme brune. Elle en tombe amoureuse et lui ouvre son coeur en confiant tous ses petits secrets de famille. Avec Madame de Gourbillon, Marie-Joséphine découvre des plaisirs insoupçonnés, au point que bientôt, elle ne peut plus se passer d'elle. Elle lui obéit au doigt et à l'oeil et la couvre de cadeaux.
Marguerite de Gourbillon a un tel ascendant sur Marie-Joséphine que nul ne peut plus accéder à la jeune femme sans passer d'abord par elle. Dans les couloirs, cela commence à jaser mais Madame se fiche complètement du qu'en-dira-t-on. Dans sa correspondance, elle évoque les grands moments de félicité passés ensemble. Louis-Stanislas-Xavier, l'époux de Marie-Joséphine, est tout à fait au courant des passions de sa femme mais préfère fermer les yeux. Tant qu'aucun scandale n'éclate, il s'en moque.
Le scandale des Gourbillon
Mais en février 1789, on découvre que Madame de Gourbillon dilapide la fortune de Madame. Une enquête est ouverte et son mari est également mis en cause. On découvre qu'il est agent de renseignement pour les Anglais. Marguerite est renvoyée. On l'accuse non seulement de dépouiller Madame mais également de la pousser dans ses mauvais penchants en lui "servant des flacons", autrement dit en la faisant boire. Pour Marie-Joséphine, ce renvoi est un drame. Elle dépérit à vue d'oeil, perd ses cheveux, fait des crises nerveuses durant lesquelles elle vomit.
Madame n'a qu'une obsession : faire revenir Marguerite de Gourbillon. Mais pour cela, elle doit faire annuler des lettres de cachet, ce qu'elle s'évertue à faire pendant des mois. Son époux ne lui adresse plus la parole mais elle s'en moque. Quand Madame de Gourbillon est autorisée à revenir à Paris, les deux femmes essaient de se voir en cachette, mais c'est peine perdue.
C'est finalement la Révolution française qui va les réunir. Monsieur veut fuir la France mais ne veut pas s'encombrer de son épouse. Il la confie alors à Madame de Gourbillon et les deux femmes trouvent refuge en Belgique. Elles vont passer les huit années suivantes à parcourir l'Europe ensemble. Marie-Joséphine ne prend même plus la peine de cacher son amante, même si elle est rarement la bienvenue. Le futur Louis XVIII demande même au tsar de Russie de déclarer Marguerite de Gourbillon persona non grata sur son territoire, où il s'apprête à séjourner.
Les deux amantes séparées
Lorsque Marguerite est arrêtée et placée sous bonne garde dans la demeure du gouverneur, Marie-Joséphine fait une crise de nerfs et proteste à grands cris. Elle finit par se rendre en Angleterre et réclame constamment la venue de son amante. Devenu Louis XVIII, son époux n'accédera jamais à sa demande.
Marie-Joséphine traîne encore sa pauvre vie quelques années, vendant en cachette quelques bijoux pour faire parvenir de l'argent à sa chère Marguerite, qui lui demande constamment du secours. Elle rend son dernier soupir le 13 novembre 1810, sans avoir revu le seul amour de sa vie, à laquelle elle écrivait encore peu avant sa mort : "Il n'y a qu'une Marguerite au monde".