Il s’agit de l’attentat le plus sanglant en France depuis 50 ans. Mercredi, deux terroristes ont ouvert le feu dans les locaux de Charlie Hebdo. Douze personnes au moins sont mortes au cours de cette sanglante attaque et quatre se trouvent entre la vie et la mort. Une véritable mise à mort de l’hebdomadaire satirique, puisque les dessinateurs historiques de Charlie Hebdo, Charb, Cabu, Wolinski et Tignous ont été tués dans l'attaque. Deux policiers ont également été tués dans cette tuerie perpétrée par des hommes aguerris aux armes de guerre. Récit.
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"Ils voulaient entrer, monter, j’ai tapé le code". 11h30, mercredi. Deux hommes cagoulés et lourdement armés pénètrent dans le bâtiment qui accueille la rédaction de Charlie Hebdo. Ils demandent alors aux personnes de l'accueil où se trouve la rédaction. Ces derniers s'exécutent et les informent que l'équipe est située au deuxième étage. Avant d'y monter, les suspects tirent sur l'un des membres du personnel de maintenance et le tue, rapporte François Molins, le procureur de la République, lors d'un point presse.
Corinne Rey, dessinatrice à Charlie Hebdo, vient toute juste d’aller chercher sa fille à la garderie, lorsqu’elle croise le chemin de deux hommes qui lui demandent, sous la menace, d’accéder aux locaux de la rédaction, situés dans le 11eme arrondissement de Paris. "Ils voulaient entrer, monter. J’ai tapé le code", confie-t-elle à l’Humanité. La suite, tragique, est désormais connue de tous.
Quand les deux hommes vêtus de combinaisons noires, cagoulés et notamment armés de Kalachnikov et de fusils d'assaut, font irruption dans l'immeuble, toute l’équipe de Charlie Hebdo organise sa traditionnelle conférence de rédaction. L’unique de la semaine. Celle qui regroupe nombre de journalistes, dessinateurs et contributeurs du journal satirique. Là, ils crient : "nous avons vengé le prophète !" et "Allah akbar", confirme le procureur de la République de Paris, François Molins.
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Détermination et sang-froid. Avec méthode et sang-froid, les terroristes tirent alors "en rafales" sur toutes les personnes présentes dans la rédaction. Au total, une trentaine de coup de feu sont tirés. Les témoins décrivent des hommes méthodiques qui ont tiré avec sang-froid sur toutes les personnes qui se trouvaient devant elles. "Ça a duré cinq minutes. Je m’étais réfugiée sous un bureau. Ils parlaient parfaitement le français et se revendiquaient d’Al-Qaïda", raconte encore Corinne Rey.
Les dessinateurs historiques de Charlie Hebdo, Charb, Cabu, Wolinski et Tignous sont tous tués dans l'attaque. D'après des témoins sur place, Charb, la figure emblématique de Charlie Hebdo, est particulièrement visé. L'un des deux assaillants lui réserve en effet un acharnement particulier en lui tirant plusieurs balles dans la tête. Le policier, chargé de la garde rapprochée du dessinateur Charb, est lui aussi tué.
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"Tu voulais me tuer ?" Les deux tireurs regagnent ensuite leur Citroën C3 noire en criant : "on a vengé le prophète Mahomet, on a tué Charlie Hebdo". Durant leur fuite, ils croisent plusieurs patrouilles de policiers, et des coups de feu sont échangés. Lorsqu'ils croisent la troisième patrouille, ils sortent du véhicule et tire sur un des policiers. Sur une vidéo filmée par un riverain, on voit le policier blessé se rouler parterre.
Un des tireurs s'approche alors de lui et lâche : "tu voulais me tuer ?". Apeuré, le policier, un gardien de la paix âgé de 42 ans, répond : "non, c’est bon chef", levant le bras vers lui pour se protéger. Le tueur se rapproche alors un peu plus de lui en trottinant et lui tire dessus à bout portant, le tuant de sang-froid", détaille François Molins. Avant de remonter dans le véhicule, le passager ramasse une basket au sol, et prend la fuite.
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Ils braquent un automobiliste et poursuivent leur fuite. Arrivé à hauteur de la porte de Pantin, les deux hommes abandonnent leur véhicule volé et braque un automobiliste, qui leur demande de récupérer son chien. Les deux tireurs repartent alors au volant d’une Clio grise, actuellement recherchée par les forces de l’ordre, qui ont perdu leurs traces depuis mercredi midi. Un témoin qui a aperçu les tireurs durant leur cavale près de pantin a, pour sa part, fait état de trois assaillants dans le véhicule.
La Citroën abandonnée porte de Pantin a toutefois été retrouvée avec un chargeur de Kalachnikov et deux sacs de sport à l’intérieur. Le véhicule, qui présentait de nombreux impacts de balles, a été embarqué vers 14 heures sur le plateau d’un camion de la préfecture de police. Elle va être passée au crible dans une cabine cyano-acrilate pour retrouver d’éventuelles traces ADN des suspects.
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Une enquête a été ouverte notamment pour "assassinats en lien avec une entreprise terroriste", a indiqué le parquet de Paris. Tout est mis en œuvre pour "neutraliser le plus rapidement possible les trois criminels qui ont été à l'origine de cet acte barbare", a déclaré Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur. En effet, les enquêteurs n'excluent pas qu'un troisième homme ait accompagné les deux tireurs.